La vie de guerres d’une mère – Libération

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A l’heure des festivalsdossier

Tchétchénie, Afghanistan, Irak, Ukraine… Le récit du métier de grand reporter raconté par Dorothée Olliéric à ses enfants.

C’est une autre aventure que nous conte la grand reporter Dorothée Olliéric avec Maman s’en va-t-en guerre. Dans sa préface, elle écrit ainsi : «Je ne sais pas si je vais trouver des réponses à mon choix de cette drôle de vie. Comment fais-tu pour laisser tes enfants et partir sur une ligne de front ? Est-ce que tu as peur de mourir ? Qu’est ce qui te pousse à retourner encore et encore dans les pays en guerre ? Pourquoi n’arrêtes-tu pas ? Ton capital chance est plus qu’entamé, il serait temps de poser ton sac.»

Ce qu’elle va écrire, elle nous le décrit dès le début, pour nous mettre dans l’ambiance. «Il va y avoir des horreurs, mais aussi beaucoup de moments de bonheur. Des larmes et des rires. Du sang, des morts et du courage. Des tirs de kalachnikovs, l’artillerie lourde qui tonne, des grenades dégoupillées. Des snipers embusqués, des ennemis introuvables. Des confrères qui ne reviendront pas. Des cauchemars […] Des vallées splendides, des aigles au bras des fauconniers. Des talibans, hiératiques, debout sur des chars, qui débarquent pour la première fois en Afghanistan […] Des millions d’étoiles. Des hommes et des femmes exceptionnels. La peur de mourir. Les fous rires encore et toujours […] L’amitié souvent, l’amour parfois et la guerre, toujours.»

De son enfance nantaise à cette envie furieuse de comprendre et de témoigner, c’est un tourbillon que ce livre qui nous emmène aussi bien au Chili face au vieux général Pinochet qu’au Caire où Dorothée Ollieric vivra un simulacre d’exécution («une petite voix me dit de rester calme, d’éviter tout mouvement brusque. J’ai le sentiment, la certitude que si je parle, si je me retourne, si je supplie, je prendrai la première balle dans la tête. Un instinct de survie pour quelques secondes, quelques minutes, je ne sais pas. Là en cette matinée du sept août 2013, je me dis que je vais mourir») ou en Angola, en 1993, où les égouts débordent. Des marées noirâtres s’étalent au carrefour. «Mes premières impressions : chaleur, moiteur, puanteur. J’ai envie de vomir, mais je respire à pleins poumons. J’assume. Si la guerre c’est d’abord ça, alors je m’en emplis. Je la fais mienne. J’apprivoise mon dégoût. Les immeubles sont éventrés. La ville est en ruine, sale, pauvre.»

Dorothée Olliéric a du talent, le sens de la description. Elle nous embarque avec elle et, avec ses simples mots, fait en sorte qu’on voit et ressente ce qui se passe. Ainsi cette anecdote au Congo Kinshasa : un rebelle lui dit : «tu es Française et je vais te tuer». Intervient un légionnaire, originaire d’un pays de l’Est, qui s’interpose en prononçant des mots qui sauvent. «Toi laisser gonzesse tranquille, nous parler entre hommes !» Et puis, enfin, l’Ukraine et d’autres images insoutenables.

«Je rêvais le monde en grand, en très grand. Je visais l’horizon, l’autre bout du monde, de l’autre côté du jour». Pari réussi. On espère que ses enfants comprendront.

Maman s’en va-t-en guerre, ma vie de grand reporter, de Dorothée Olliéric, éditions du Rocher, 304 pp., 19,90 euros.

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