Le naufrage de l’Essex, au cœur des ténèbres de l’océan

Le naufrage de l’Essex, au cœur des ténèbres de l’océan

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A l’heure des festivalsdossier

Retour par Nathaniel Philbrick sur la destruction du baleinier par un cachalot au XIXe siècle. Un drame qui inspirera Melville pour son «Moby Dick».

Avec la véritable histoire de Moby Dick, Nathaniel Philbrick, nous plonge directement dans les coulisses du roman d’Herman Melville. «Nous avons été attaqués par un cachalot» est donc la phrase du point de départ de cette aventure. «Comme un majestueux rapace, le baleinier remontait la côte occidentale de l’Amérique du Sud, zigzaguant sur une mer d’huile vivante. Car tel était le Pacifique en 1821 : un vaste réservoir de ces barils d’huile à sang chaud qu’on appelle cachalots». Des «expéditions» de chasse à la baleine qui n’étaient pas une mince affaire, car elles pouvaient durer trois ans. La mer, toute nourricière qu’elle fut, était également capricieuse, et pour se garder du mauvais sort, on l’entourait de rites et de croyances diverses, essayant tant bien que mal de prédire le destin des navires, d’éviter celui-ci ou de monter à bord de tel autre…

La destruction du baleinier Essex par un cachalot enragé fut l’une des catastrophes les plus célèbres du XIXe siècle. Une grappe d’hommes attachés à leur vie, «coques de noix sur un océan implacable», écrit l’écrivaine Catherine Poulain dans la préface. «Violence incontrôlable de la mer, sa splendeur, celle du vivant qui l’habite, de la nature tout entière, de ses forces face aux sociétés humaines, autres puissances, terrifiantes et obscures»…

Un livre captivant. À partir d’une histoire vieille de plusieurs siècles, Philbrick signe une enquête historique qui se lit comme un thriller… Scrupuleusement documenté et écrit dans un style particulièrement évocateur, ce récit aurait certainement valu à son auteur l’admiration de Melville.

On y suit les tribulations de l’équipage sur leurs canots de fortune, se battant pour ne pas mourir de faim, succomber au délire, ou à des pratiques cannibale, que réprouve l’Eglise qui, elle, a peu connu la faim. Bref, l’auteur n’a pas volé son National book Award, ni celui de se voir offrir une place de finaliste du prix Pulitzer, grâce à cette enquête menée de main de maître.

Lentement, au fil des pages, l’aventure initiale de la chasse à la baleine et la perspective de la bonne fortune se retrouvent reléguées au rang des vieux souvenirs. Place au drame. «Leurs tourments physiques montaient dans un crescendo terrible. Ils étaient comme empoisonnés par les effets combinés de la soif et de la faim […] Leurs cheveux tombaient par touffe. Leur peau était tellement brûlée et couverte d’ulcères qu’une éclaboussure d’eau de mer les faisait souffrir comme de l’acide. Avec leurs yeux enfoncés dans leurs orbites et leurs pommettes saillantes, ils commençaient à se ressembler tous. Leurs identités se perdaient dans la déshydratation et la faim.» Un des hommes de bord décrit ainsi le fond de son sentiment. «Patience et longue souffrance, tel était le refrain de nos lèvres, et une détermination aussi forte que pouvait en forger l’âme, à rester en vie tant qu’il restait en nous un souffle et de l’espoir». L’occasion également de constater que les inégalités entre noirs et blancs persistent, même au milieu de l’océan, alors que tout le monde doit se battre pour un seul unique but : survivre… Avec au final, cet inquiétant dilemme. Mangera-t-on ses semblables pour s’en sortir vivants ?

Au cœur de l’océan, Nathaniel Philbrick, éditions Paulsen, 352 pp., 28 euros.

Libération

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