En Syrie, un probable charnier découvert à une trentaine de kilomètres de Damas

Depuis la chute de Damas le 8 décembre et la fuite de Bachar al-Assad, des milliers de personnes sont à la recherche des proches, disparus parfois depuis des années après avoir fini entre les mains des forces du régime. La plupart s’inquiètent de les retrouver morts, enterrés avec des dizaines d’autres personnes dans des fosses communes ou derrière les murs d’une prison. Ce mercredi 25 novembre, l’horreur imaginée semble se dessiner : d’après un secouriste des Casques blancs et un militant en Syrie, un probable charnier a été mis au jour dans la journée, renfermant les ossements de détenus emprisonnés par les forces de Bachar al-Assad ou de combattants tués pendant le conflit.

Une équipe de journalistes confirme avoir vu mercredi, sur un terrain vague à une trentaine de kilomètres au nord-est de Damas, des fosses alignées les unes à côté des autres, formant une tranchée de plus d’un mètre de profondeur, chacune recouverte de dalles de béton qui ont été déplacées. Dans ce secteur de Jisr Bagdad, plusieurs sacs étaient visibles dans une fosse, certains portant l’inscription d’un nom ou la mention «13 – numéro de la tombe». Dans un sac, une journaliste a vu un crâne humain et des ossements.

«Nous pensons que c’est une fosse commune. Nous avons trouvé un caveau ouvert avec sept sacs remplis d’ossements», explique Abdel Rahmane Mawas, un secouriste des Casques blancs dont les équipes ont visité le site ces derniers jours. Ces sacs – dont six avaient un nom – ont été «transférés en lieu sûr», a-t-il ajouté, précisant que «des tests ADN» seront effectués. Il assure que si «d’autres caveaux ont été ouverts, il est probable que des civils y sont venus. Mais il faut s’éloigner des charniers et laisser les autorités compétentes s’en occuper».

«La route sera longue avant de découvrir qui est enterré»

Depuis la chute du régime de Bachar al-Assad, sous le coup d’une offensive de groupes armés islamistes entrés dans Damas le 8 décembre, les nouvelles autorités et les habitants des environs de la capitale ont commencé à identifier des sites qui abriteraient des fosses communes. Le sort de dizaines de milliers de prisonniers et disparus constitue l’un des aspects les plus douloureux du drame syrien, dans un pays déchiré par 13 ans d’une guerre dévastatrice qui a fait plus d’un demi-million de morts.

Le site de Jisr Bagdad se trouve à une vingtaine de kilomètres de la localité de Sednaya, abritant la redoutable prison éponyme, devenue symbole des pires sévices infligés par le régime. Diab Serriya, cofondateur de l’Association des détenus et des disparus de la prison de Sednaya (ADMSP), dit avoir eu connaissance du site pour la première fois en 2019, via «le témoignage d’un déserteur des services de renseignements». «Ce charnier contient probablement des détenus, mais aussi d’anciens combattants du régime ou de l’opposition tués pendant les combats, assure-t-il. Il se peut que les sacs d’os aient été transportés d’autres charniers. La route sera longue avant de découvrir qui est enterré.»

Mohamed Ali, président adjoint du conseil municipal de la localité d’Adra, à quelques kilomètres de Jisr Bagdad, assure que les habitants ignoraient tout du site, situé près d’une position de l’armée syrienne. Et pour cause : «Il était interdit de s’en approcher ou de prendre des photos car c’était une zone militaire.»