Pourquoi la consommation d’eau risque de doubler d’ici à 2050 en France

Pourquoi la consommation d’eau risque de doubler d’ici à 2050 en France

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La guerre de l’eau pourra-t-elle être évitée ? Alors que l’or bleu disponible va se raréfier l’été en France sous l’effet du changement climatique, la demande d’eau risque de bondir si la tendance actuelle se poursuit. La consommation annuelle pourrait même doubler d’ici à la moitié du siècle, par rapport à l’année 2020. C’est l’un des enseignements de la nouvelle note d’analyse de France Stratégie, commandée à l’automne 2023 par l’ex-Première ministre Elisabeth Borne et publiée ce lundi 20 janvier.

«Afin d’anticiper d’éventuels conflits d’usage, il s’avère aujourd’hui indispensable d’étudier des trajectoires d’évolution de la demande», explique la note de cette institution autonome rattachée au Premier ministre. Cette étude prospective nous plonge donc dans la France de 2050 avec trois différents scénarios, en fonction des choix de société qui seront faits. Le premier chemin possible est le «tendanciel», c’est-à-dire qu’il poursuit la tendance actuelle, sans changements supplémentaires. Le deuxième, baptisé «politiques publiques», intègre l’effet de toutes les mesures récemment annoncées si celles-ci se concrétisaient (notamment le plan eau annoncé en 2023 après la sécheresse historique de 2022). Le troisième, dit «de rupture», se caractérise par un usage sobre de l’eau dans tous les domaines, avec notamment une réduction de la consommation de viande de 50 % au profit des cultures de fruits et légumes, avec une forte augmentation des pratiques agroécologiques qui permettent de garder l’humidité dans les sols. Cela s’accompagnerait d’une baisse de la consommation d’énergie, des biens matériels et d’une forte réutilisation des eaux usées des particuliers à l’échelle des bâtiments.

L’agriculture, secteur le plus gourmand

Pour chaque scénario, les auteurs ont étudié l’évolution des prélèvements d’eau dans les rivières et nappes, qu’ils appellent aussi la «demande», et ce dans sept domaines : l’irrigation, l’élevage, l’énergie, l’industrie, le tertiaire, le résidentiel et les canaux de navigation. Cette analyse détaille les effets dans les quarante bassins-versants de la métropole, et pour chaque mois de l’année, un niveau de détail inédit.

Au final, dans tous les scénarios, l’agriculture deviendra le secteur le plus demandeur d’eau (30 % du total), passant devant le secteur énergétique. Cela s’explique par la hausse de l’irrigation, notamment en été, car la chaleur accrue assoiffera les cultures. A cette saison, la demande montera encore plus en flèche dans les scénarios les moins sobres, tandis que le reste de l’année, elle pourra être bien plus faible qu’aujourd’hui. De manière générale, «la demande en eau sera davantage concentrée au cours des mois les plus chauds de l’année, quand la ressource en eau est au plus bas dans les milieux aquatiques», avertit France Stratégie. Cela risque donc de mettre à rude épreuve la biodiversité. Et les bassines agricoles, que le gouvernement souhaite multiplier sur le territoire, ne feront pas une grande différence : «Le rôle des retenues de substitution pour réduire les prélèvements entre les mois de mai et de septembre apparaît modéré», car le pic de demande en irrigation ne serait réduit que de 6 %, poursuivent les auteurs de l’étude.

Au final, si l’on additionne les changements dans tous les domaines et sur l’ensemble de l’année, «dans la configuration climatique la plus défavorable étudiée, la demande annuelle stagne dans le scénario tendanciel (+ 1 %) et diminue dans les scénarios politiques publiques (- 24 %) et de rupture (- 47 %)», calcule l’institution.

En hausse dans tous les scénarios

Mais la note ne s’arrête pas là. Elle s’intéresse aussi à la consommation d’eau future en France, c’est-à-dire la part des prélèvements qui n’est pas directement restituée à la nature (car, par exemple, les centrales nucléaires pompent de l’eau pour se refroidir, mais elles la restituent à la rivière, contrairement à l’eau utilisée pour irriguer un champ). Cette consommation est en hausse dans tous les scénarios pour 2050. Dans le pire des cas, c’est-à-dire le scénario tendanciel, la consommation pourrait être multipliée par deux en France avec un réchauffement particulièrement marqué. Le fort besoin d’irrigation pourrait même localement faire tripler la consommation en été dans les bassins-versants agricoles de l’Escaut (tout au nord de la France) et de l’Adour (dans le sud-ouest). «Seul le scénario de rupture permet de contenir les consommations en eau dans le cas d’un printemps-été sec», précise France Stratégie. Même s’il est le plus sobre, il aboutit néanmoins à une augmentation de 10 % sur l’année.

Maintenant que l’on sait quels seront les besoins, plus ou moins grands selon la direction prise, reste à déterminer s’il y aura assez d’eau disponible. Car le changement climatique bouscule le cycle de l’eau et accentue les extrêmes hydriques. «La ressource en eau est en baisse de 14 % sur les quinze dernières années et dans le futur cette tendance devrait s’accentuer, notamment dans le sud de la France», a rappelé lors d’un point presse lundi Hélène Arambourou, adjointe au directeur du département développement durable et numérique de France Stratégie, en citant l’étude Explore 2 sur le futur de l’eau en France. Pour poursuivre la prospective, «un travail de confrontation de la demande à la ressource potentiellement disponible» sera donc publié «d’ici la fin du semestre», précise l’institution. Une étape cruciale pour faire les bons choix politiques et éviter les conflits futurs.

Libération

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