Indonésie : des ONG dénoncent le plan «destructeur» de conversion de millions d’hectares de forêt à des fins alimentaires et énergétiques

Indonésie : des ONG dénoncent le plan «destructeur» de conversion de millions d’hectares de forêt à des fins alimentaires et énergétiques

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L’identification de 20 millions d’hectares de zones forestières pouvant être converties en réserves de nourriture, d’énergie et d’eau, annoncée fin 2024 par le ministre des Forêts de ce pays, Raja Juli Antoni, suscite l’inquiétude des organisations de protection de l’environnement. Dans un communiqué publié ce lundi 20 janvier, la Clean Transition Coalition, qui regroupe plusieurs ONG, dénonce un projet «illogique et destructeur sur le plan environnemental». Selon les militants, cela risque de nuire «de manière irréversible à l’environnement et à la biodiversité de l’archipel».

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Le président indonésien Prabowo Subianto, qui a pris ses fonctions en octobre 2024, s’est engagé à renforcer l’autosuffisance alimentaire et énergétique de l’archipel. L’exécutif a déjà identifié 1,1 million d’hectares de terres qui pourraient produire jusqu’à 3,5 millions de tonnes de riz par an, soit l’équivalent des importations totales de riz d’Indonésie en 2023, a précisé le ministre des Forêts indonésien. Le gouvernement envisage également de planter des palmiers à sucre comme source de bioéthanol, afin de limiter les importations de carburant. Le plan concernera une superficie près de deux fois plus grande que Java, la principale île indonésienne.

«Hot spot» de la biodiversité

De quoi faire réagir les militants écologistes, alors que l’Indonésie abrite la troisième plus grande forêt tropicale de la planète, derrière le Brésil et le Congo. Véritable poumon vert, cet écosystème constitue l’un des derniers refuges pour de nombreuses espèces, notamment les orangs-outans. Un «hot spot» de la biodiversité qu’il est impératif de protéger. Il y a deux ans, à Glasgow, lors de la COP 26 sur le climat, l’Indonésie faisait la promesse du «zéro déforestation» en 2030, aux côtés de 130 pays. Mais face aux intérêts économiques, l’archipel peine à respecter ses objectifs. C’est notamment ce que montrait le Forest Declaration Assessment, une analyse produite par une trentaine d’organisations, publiée en octobre 2024. L’Indonésie fait figure de très mauvais élève, sur la seconde place du podium derrière le Brésil : le pays a ainsi déforesté 1,18 million d’hectares de forêt en 2023, sur les 6,4 millions perdus au niveau mondial la même année.

«Le projet (de convertir) 20 millions d’hectares de terres augmente considérablement le risque d’expansion de l’huile de palme», a déclaré le directeur exécutif de l’organisation de lutte pour la justice écologique Sawit Watch, Achmad Surambo. Les recherches de l’ONG environnementale Satya Bumi ont montré que les plantations de palmiers à huile existantes couvrent déjà 17,77 millions d’hectares dans tout l’archipel.

L’Indonésie est d’ailleurs le premier producteur mondial d’huile de palme, avec un total de 55 millions de tonnes en 2023, représentant une part impressionnante de 54 % du marché mondial de l’huile de palme, selon le Jakarta Post. Ces plantations sont vivement contestées en raison de leur impact écologique et humain : la culture d’huile de palme nécessite de défricher les forêts et d’assécher les tourbières, ce qui induit des pertes majeures pour la biodiversité. C’est également parfois la cause de déplacement des populations locales et autochtones.

Relancer la production d’huile de palme

Mais cela ne semble pas être un problème pour le nouveau président indonésien, qui souhaite relancer la production d’huile de palme. Lors de la consultation nationale sur la planification du développement qui s’est tenue à Jakarta le 30 décembre dernier, Prabowo Subianto a affirmé sa volonté «d’étendre massivement les plantations de palmiers à huile», considérant que celles existantes étaient «le patrimoine de la nation». Après des années de moratoire sur la délivrance de nouveaux permis et licences depuis 2011, l’Indonésie autorise à nouveau le développement de plantations de palmiers à huile.

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Malgré l’inquiétude des militants, ministère indonésien des Forêts et porte-parole présidentiel n’ont pas immédiatement répondu aux demandes de commentaires de l’AFP. Juli Antoni Raja a rejeté la semaine dernière les préoccupations liées à la déforestation, promettant que ce projet ne supprimerait pas la forêt mais «maximiserait» sa fonction à travers un système agroforestier, ont rapporté les médias locaux. Le gouvernement a également précisé qu’il ciblerait les terres déjà concédées dans le cadre de concessions aux entreprises privées, plutôt que les forêts vierges.

Les organisations de protection de la nature ont averti que même une conversion massive des terres agricoles pour des cultures d’exportation serait préjudiciable. «Au lieu de défricher les forêts, le gouvernement devrait se concentrer sur l’optimisation des terres agricoles existantes, sur le respect des droits des peuples autochtones et sur la mise en œuvre d’une véritable réforme agraire», a rétorqué la coalition.

Libération

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