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Documentaire
Dans le minibus qui sillonne la campagne, les bouleversants témoignages de familles ukrainiennes condamnées à l’exil.
«Regarde, ce si beau coucher de soleil… On dirait un immeuble qui brûle. » C’est marqués par leur passé qu’ils se dirigent vers leur futur. «Ils», ce sont ces quelque 400 Ukrainiens qui, depuis le 24 février 2022 ont emprunté le van de Maciek Hamela pour fuir leur pays en guerre et rejoindre la Pologne. Un taxi bénévole pas comme les autres qui a décidé de venir en aide à ces familles condamnées à l’exil. Au fil des kilomètres, l’intimité se dévoile et la caméra installée face aux cinq ou six passagers filmés en plan fixe recueille les témoignages authentiques de ces hommes, femmes et enfants déracinés qui, pour la plupart, quittent pour la première fois de leur vie leur village.
S’étant imposé un protocole éthique, celui de ne pas «exploiter la fragilité de ces personnes», le réalisateur-chauffeur polonais nous offre dans ce surprenant film Pierre, Feuille, Pistolet, 1 h 20 d’immersion au sein de cette agora ambulante, fragile rempart face à l’horreur à travers une vingtaine de saynètes correspondant à autant de voyages.
Programmé dans le cadre dela 23e édition du festival du Grand Bivouac d’Albertville, le road-movie ukrainien plonge le public dans une atmosphère lourde et triste. Des au revoir qui espèrent ne pas être des adieux, des familles séparées, des animaux abandonnés, les bombardements omniprésents… Pierre, Feuille, Pistolet — du nom du jeu rebaptisé par une petite fille confrontée trop tôt à la guerre — touche notre humanité. La guerre, matérialisée par les cadavres de tanks et les ponts détruits, n’empêche pourtant pas les plus jeunes et leurs aînés de garder foi en l’avenir. Dépourvu de commentaires, l’improvisé taxi et marchand d’espoir, laisse à ses passagers le choix de parler ou de se taire, de raconter les horreurs de la guerre, les morts et les viols, ou de se souvenir des jours heureux et du temps d’avant.
On a envie de dire merci à Maciek et son van pour ces quelque 100 000 km parcourus sur des routes désertes et cabossées. On a envie de dire merci à ces réfugiés pour nous avoir fait partager leur histoire. On a envie de leur dire merci à tous pour nous avoir offerts, ici, un poignant témoignage de ce qu’est l’exode. Un exode qui a touché un tiers de la population ukrainienne en l’espace d’un an.
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