Education à la sexualité et à la vie affective : ce que contient le futur programme, légèrement retouché

Education à la sexualité et à la vie affective : ce que contient le futur programme, légèrement retouché

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Un exercice d’équilibriste pour d’un côté calmer les plus réfractaires et de l’autre éviter de se mettre à dos les enseignants. Nommée au ministère de l’Education il y a un mois, Elisabeth Borne a hérité du dossier de l’éducation à la vie affective et sexuelle, au cœur d’une bataille idéologique. Théoriquement obligatoire depuis vingt-cinq ans dans les écoles, collèges et lycées avec au moins trois séances par an, cet enseignement est en réalité très peu appliqué.

Pour y remédier, la rue de Grenelle prépare depuis des mois un programme dont la version dévoilée par la presse en novembre 2024 avait provoqué l’ire des associations réactionnaires, des élus de droite et d’extrême droite. Qui le jugeaient «woke» et demandaient le retrait de toute référence à la notion d’identité de genre. Même au sein du précédent gouvernement, le ministre délégué à la Réussite scolaire, Alexandre Portier, avait exprimé son rejet du texte, faisant croire que la «théorie du genre» figurait dans le programme – une idée fausse affirmant que l’école cherchait à nier les différences entre filles et garçons.

Libération a pu consulter la toute dernière version du programme passé entre les mains d’Elisabeth Borne et qui doit être examiné mercredi 29 janvier par le Conseil supérieur de l’éducation, une instance consultative regroupant notamment les syndicats enseignants et les représentants des parents d’élèves. Elisabeth Borne, qui a jugé cette éducation à la vie affective et sexuelle «absolument indispensable» sur France Inter ce jeudi 23 janvier, a opéré quelques retouches, loin d’être anodines, sans modifier l’essentiel du texte présenté par sa prédécesseure Anne Genetet.

L’asexualité disparaît

Le programme reste obligatoire de la maternelle au lycée, dans les établissements publics et privés sous contrat, mais «sans se substituer au rôle des parents et des familles des élèves», est-il cette fois précisé histoire de caresser dans le sens du poil les opposants. Toujours dans cette optique, la notion d’identité de genre n’apparaît plus que neuf fois, au lieu de vingt dans la précédente version du programme. Et elle est désormais abordée à partir du lycée, et non plus en cinquième. Selon la ministre, les discriminations envers l’identité de genre faisant «partie du code pénal, c’est important d’expliquer aux lycéens».

L’asexualité, le fait de ne pas ressentir d’attraction sexuelle pour autrui, disparaît totalement du programme, en étant supprimé en classe de quatrième. L’existence de personnes intersexes, qui naissent avec des caractéristiques sexuelles ne correspondant pas aux définitions normées des corps féminins et masculins, n’apparaît plus qu’au lycée alors qu’elle figurait en CM2 dans la précédente version du texte.

Pour le reste, l’objectif reste le même : «Transmettre des valeurs de respect de soi et des autres», «promouvoir l’égalité entre les filles et les garçons», «lutter contre les stéréotypes et contre les violences et le harcèlement». Les contenus des séances doivent être adaptés à l’âge et à la maturité des élèves. Pour chaque niveau, trois axes du programme sont développés : d’abord, «se connaître, vivre et grandir avec son corps», puis «rencontrer les autres et construire avec eux des relations, s’y épanouir» et enfin «trouver sa place dans la société, y être libre et responsable».

Les professeurs ont «la responsabilité première», de ces séances, en lien avec les personnels éducatifs, sociaux et de santé de l’éducation nationale. Les «partenaires extérieurs, comme des associations» agréées, peuvent intervenir au collège et au lycée, toujours en présence de membres de l’équipe éducative avec qui ils devront «systématiquement» préparer leur intervention. Les chefs d’établissements devront eux veiller à la tenue de cet enseignement.

Un partage plus égalitaire de la cour de récré

Dans le premier degré, le niveau jugé le plus sensible, «les questions liées à la sexualité ne sont pas abordées» tient à préciser le ministère. En maternelle, les élèves découvrent les notions de respect de soi et des autres. Ils apprennent à nommer les différentes parties de leurs corps, à identifier leurs quatre émotions de base (joie, peur, tristesse, colère), à prendre conscience de ce qu’est l’intimité. Ils sont initiés à la notion du consentement et à dire «non» ou «stop», comme lorsqu’on leur demande : «Est-ce que je peux te prendre la main ?», «Est-ce que je peux m’asseoir à côté de toi ?» L’égalité entre les filles et les garçons et le respect des différentes «formes de familles» sont aussi abordés.

Avant 4 ans, les enfants apprennent à nommer, à partir d’albums ou de jouets, les zones de leurs corps (la notion de «parties intimes» a été retirée) «en partant des dénominations spontanées pour aller vers un vocabulaire spécifique». A partir de 4 ans, ils découvrent ce qu’est une grossesse et une naissance et qu’il existe des comportements interdits, même avec un adulte de confiance.

En élémentaire, la notion d’intimité est approfondie, comme celle du consentement. Les petits sont éduqués à connaître les changements dans leurs corps, à respecter les autres, à repérer des situations de harcèlement et à lutter contre les stéréotypes. Exemple en CE1, où ils sont invités à les dénicher dans les catalogues de jouets et les publicités. Ils peuvent aussi réfléchir sur un partage plus égalitaire de la cour de récré entre garçons et filles. La puberté et les menstruations sont abordées en CM2, tout comme les violences sexistes ou sexuelles, dont l’inceste.

Repérer l’emprise ou la violence

Dans le second degré, le programme aborde les notions biologiques d’anatomie et de reproduction, de prévention des risques. Il apprend à lutter contre les discriminations ou à prévenir le harcèlement et les violences sexuelles.

Les sixièmes doivent bien comprendre la puberté, la liberté d’être soi-même et le respect des autres. Il est précisé que les règles douloureuses nécessitent une consultation médicale et on commence à les sensibiliser sur les dangers d’Internet. Les cinquièmes apprennent à différencier sexe, genre et orientation sexuelle, et que «tout acte de nature sexuelle non désirée constitue une violence sexuelle». En quatrième, les ados sont invités à repérer l’emprise ou la violence au sein d’un couple, la marchandisation des corps et à prendre conscience de ce que représente la pornographie. En troisième, place aux notions de désir, d’excitation ou de plaisir ou à développer leur capacité à maîtriser les «impulsions, émotions et sentiments».

Enfin, les lycéens se voient enseigner la lutte contre les préjugés et les stéréotypes et leurs droits. On explique que les différences biologiques entre les femmes et les hommes «ne déterminent pas les expressions, les comportements et les rôles attribués aux genres masculin et féminin». En seconde notamment, on prend conscience que le sexe biologique peut ne pas correspondre à son identité de genre ou qu’il existe des personnes intersexes. En première, les élèves doivent aussi apprendre que toute hésitation ou incertitude ne valent pas consentement.

Après la consultation du Conseil supérieur de l’éducation, c’est Elisabeth Borne qui tranchera en faveur de la version finale de ce programme, dont l’entrée en vigueur est prévue en septembre 2025.

Libération

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