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L’héritage des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024, c’est la vasque qui fera son retour dans le jardin des Tuileries chaque été jusqu’en 2028. Mais, plus important pour la vie quotidienne de millions des salariés, cela pourrait aussi passer par des dispositions concrètes sur la santé et la sécurité au travail, inspirées de la Charte sociale qui a permis, selon ses promoteurs, de diviser par quatre la sinistralité au travail sur les chantiers d’où sont sorties les infrastructures de l’événement sportif. «La démonstration est faite qu’on peut faire baisser l’accidentologie [dans le BTP], alors qu’un mort au travail sur deux en est issu», affirmait à Libération l’ancien secrétaire général de la CGT Bernard Thibault, coprésident du comité de suivi de ladite charte. A condition que pouvoirs publics et employeurs y mettent du leur, alors que près de 760 salariés sont morts des suites d’un accident au travail en 2023.
Lundi 3 février, la ministre du Travail, Astrid Panosyan-Bouvet, a profité d’un Conseil national d’orientation des conditions de travail (CNOCT) pour dévoiler quelques mesures allant dans ce sens. Ainsi, elle a annoncé la mise en place d’un «groupe de contact», qui sera parrainé par Bernard Thibault et l’autre coprésidente du comité de suivi de la Charte sociale, la vice-présidente du Medef, Dominique Carlac’h, afin de pousser les branches les plus touchées par des accidents à recourir au dialogue social pour prendre des mesures de prévention. Parmi les secteurs concernés figurent notamment l’intérim et le BTP.
Côté ministères, deux instructions devraient voir le jour prochainement, indique le ministère du Travail. L’une, conjointement avec Bercy, pour «responsabiliser» les donneurs d’ordre public dans leur politique d’achat, afin que celle-ci «valorise davantage les démarches de prévention ambitieuses de leurs prestataires». L’autre, avec le ministère de la Justice, pour «renforcer la coopération entre les services judiciaires et l’inspection du travail», afin que les pratiques délictueuses constatées par la seconde fassent plus souvent l’objet de sanctions. D’autres mesures portent sur la formation des salariés ainsi que sur la mise en place du document unique d’évaluation des risques professionnels, censément obligatoire dans toutes les entreprises, mais effectivement mis à jour dans moins d’une sur deux.
«Les JOP ont permis de montrer que là où on met de la concertation, du contrôle, des engagements, on gagne en attractivité, en performance, et en respect de la santé des travailleurs. Ça donne un ton à ce CNOCT», se réjouit Isabelle Mercier, représentante de la CFDT. Mais elle déplore que tout cela se fasse «à moyens constants», notamment s’agissant de l’inspection du travail qui est notoirement en sous-effectif. Or, un des enseignements des JO est précisément que des contrôles renforcés permettent de réduire la fréquence des accidents. Faute d’un effort sur ce terrain, pour Bernard Thibault, «le risque est de ne retenir des JO qu’un bon épisode, dont tout le monde se félicite, mais pour dire ensuite “revenons à la réalité quotidienne”».
Même s’il reconnaît qu’«il y a longtemps qu’on n’avait pas eu un vrai discours sur la santé au travail», Jérôme Vivenza, représentant de la CGT au sein du CNOCT, se montre également réservé quant au fait que tout est décidé à «cadre légal constant», sans contrainte imposée aux employeurs. Le ministère du Travail exclut en effet de passer par une loi pour mettre en œuvre des dispositions telle que la limitation des niveaux de sous-traitance à deux, quand il y en a parfois quatre voire cinq actuellement. Sauf à ce que les acteurs sociaux concluent un accord national interprofessionnel. Rien de tel ne figure pour l’instant à l’agenda des organisations syndicales et patronales, mais elles auront déjà l’occasion de discuter pénibilité dans le cadre du «conclave» sur les retraites voulu par le Premier ministre, François Bayrou, et qui doit démarrer dans la deuxième moitié de février.
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