Le patron de l’Eglise anglicane révèle son lien ancestral avec un esclavagiste

L’archevêque de Canterbury, Justin Welby, a annoncé ce mardi 22 octobre qu’il avait récemment appris que son arrière-grand-père était un propriétaire d’esclaves. Il a rappelé l’engagement de l’Eglise pour lutter contre l’héritage de cette époque.

Les secrets de famille finissent toujours par ressortir. Justin Welby, l’archevêque de Canterbury, a révélé ce mardi 22 octobre celui de l’un de ses ancêtres. Le chef de l’Eglise anglicane a annoncé avoir récemment découvert que son père biologique défunt, Sir Anthony Montague Browne, un des secrétaires privés de Winston Churchill, «avait une connexion ancestrale avec l’esclavagisme en Jamaïque et à Tobago», écrit-il dans un communiqué.

«Mon récent voyage en Jamaïque m’a aidé à faire face aux conséquences de l’esclavage dans les Caraïbes et à la responsabilité envers ceux qui souffrent encore des effets de ce commerce néfaste», ajoute également l’archevêque. Avant de rappeler : «Je réitère l’engagement des commissaires de l’Eglise en faveur d’un programme de recherche approfondi et précis» sur l’esclavage.

Jamais pu rencontrer son père biologique

Ce chamboulement familial a démarré en 2016, quand l’archevêque a fait un test ADN lui apprenant qu’il y avait 99,98 % de probabilité que son père biologique soit en fait Sir Anthony Montague Browne, mort en 2013, et non Gavin Welby comme il le pensait jusqu’alors. La naissance de l’homme d’Eglise est le fruit d’une brève aventure entre sa mère et Anthony Browne, juste avant qu’elle se marie avec Gavin Welby. Sa mère, morte en 2023, avait à l’époque assuré que cette révélation «était un choc incroyable» pour elle. Justin Welby aurait ensuite pris conscience de sa filiation avec James Fergusson, un propriétaire d’esclaves à la plantation Rozelle de Saint Thomas, en Jamaïque, mort en 1838. Et de fait son arrière-grand-père.

L’archevêque de Canterbury n’a jamais pu rencontrer son père biologique, mort avant qu’il n’apprenne la vérité. Il assure n’avoir ainsi jamais reçu d’argent de son père et ses ancêtres.

D’après le Centre pour l’étude des héritages de l’esclavage britannique, la plantation Rozelle de l’arrière-grand-père de Justin Welby comptait environ 200 esclaves qui y travaillaient. Quand l’esclavage a été aboli, la famille Fergusson a reçu 3 591 livres sterling en 1836 (estimée à environ 3 millions de livres sterling aujourd’hui, soit environ 3,5 millions d’euros), dans le cadre d’une indemnisation du gouvernement britannique pour les propriétaires qui perdaient leurs esclaves, rapporte le Guardian. Au total et dans tout le pays, c’est une somme colossale de 20 millions de livres, qui représentait alors 40 % du budget de l’Etat, qui a été consacrée à ces indemnités.

«Profondément désolé»

L’archevêque de Canterbury est engagé de longue date dans la reconnaissance par l’Eglise anglicane du bénéfice historique qu’elle a tiré de l’esclavage transatlantique. La publication d’un rapport en 2023 retraçant les origines du fonds de dotation de l’église de 9 milliards de livres sterling avait permis d’établir un lien formel avec l’esclavage. Justin Welby avait alors déclaré qu’il était «profondément désolé de ces liens» et qu’il était «désormais temps d’agir pour remédier à notre passé honteux».

L’Eglise anglicane a par ailleurs promis un don de 100 millions de livres sterling pour lutter contre l’héritage de l’esclavage. Auprès du Jamaica Observer, l’archevêque a également présenté ses excuses quant au passé esclavagiste du pays dans un article publié ce mardi : «Je ne peux pas parler au nom du gouvernement du Royaume-Uni mais je peux parler avec mon propre cœur et représenter ce qui se dit actuellement en Angleterre. Nous sommes profondément, profondément, profondément désolés. Nous avons péché contre vos ancêtres.»