En politique, tout peut aller très vite. A peine sorti du commissariat de police où il était entendu, Andy Kerbrat a eu la surprise de découvrir qu’un article de presse mentionnant sa petite virée à Paris était déjà en ligne. Très en lien avec la police et pas vraiment copain avec La France insoumise, le site Valeurs Actuelles se faisait un plaisir d’épingler l’achat de drogue de synthèse par le jeune député insoumis.
Les faits se sont déroulés le jeudi 17 octobre en soirée sur le quai de la station de métro Lamarck-Caulaincourt, dans le 18e arrondissement de Paris. Le député a acheté 1,35 gramme de 3-MMC à un dealer de rue, mineur, selon les enquêteurs. La « 3-méthylméthcathinone » est une drogue de synthèse apparue au début des années 2010. Présentée comme la nouvelle cocaïne en moins cher, elle « suscite une inquiétude grandissante en Europe » parmi les spécialistes de la santé.
Ces révélations de la presse ont évidemment agacé le principal concerné, qui n’avait pas encore eu le temps d’en parler à ses proches. Cette affaire « interroge une nouvelle fois sur la porosité entre des sources policières et les médias d’extrême droite », a dénoncé le député dans un communiqué. Amer, il peut sans doute creuser dans ses relations houleuses avec la police pour comprendre comme l’information a fuité, lui qui avait notamment demandé la suppression des brigades anticriminalité (Bac) de la police.
« On ne guérit pas d’avoir été une victime »
Âgé de 34 ans, Andy Kerbrat était auparavant téléconseiller à Nantes, où il réside depuis son adolescence. Né à Toulouse, il a officié comme délégué syndical pour la CGT pendant quatre ans et figurait sur la liste des insoumis pour les municipales en 2020 et les régionales en 2021. En 2022, il se présentait pour la première fois à titre personnel dans la 2e circonscription de Loire-Atlantique, traditionnellement ancrée à gauche. En 2024, il avait même été réélu dès le premier tour.
Militant LGBT, Andy Kerbrat avait révélé avoir été victime d’abus sexuels lors du mouvement #MeTooGarçons. « On ne guérit pas d’avoir été une victime, mais on peut se réparer, lentement, et même devenir député. J’ai été abusé de mes 3 à 4 ans par un prédateur, mort depuis, donc sans possibilité d’avoir justice », avait-il avoué sur X. Une information que le député n’avait pas même révélée à ses amis mais qu’il avait choisi de rendre publique en février au moment des révélations de l’acteur Aurélien Wiik, connu pour son rôle dans la série TV Munch. L’élu nantais avait d’ailleurs porté plainte après avoir subi des tags homophobes devant son domicile.
Bruno Retailleau et « le devoir d’exemplarité »
Comme bon nombre de députés insoumis, Andy Kerbrat n’a pas sa langue dans sa poche et ne s’est pas fait que des amis depuis son entrée en politique. Sans surprise, les révélations concernant sa consommation de drogue ont fait l’objet d’un déferlement de réactions de la part de ses opposants. Selon Bruno Retailleau, le député insoumis « doit tirer les conséquences de ses actes ». Le ministre de l’Intérieur rappelle qu’un député « a un devoir d’exemplarité ». La veille, le ministre originaire de Vendée avait été étrillé par le député sur X. « Bruno Retailleau fait toujours partie du problème, jamais de la solution », avait balancé l’élu insoumis. Foulques Chombart de Lauwe, conseiller municipal et candidat Les Républicains à mairie de Nantes, va plus loin, estimant que le député « doit démissionner ». Un message largement repris à droite.
Sur les réseaux sociaux, on a aussi vu une interview de Télénantes refaire surface. Et notamment l’extrait concernant la lutte contre le trafic de drogue. « Je pense que vous ne connaissez pas mes positionnements contre les plaques tournantes qu’il peut y avoir sur les quartiers Malakoff ou Gauthière », lançait alors l’élu de la République en référence à ces quartiers sensibles de sa circonscription. Depuis les révélations, l’élu a reconnu qu’il faisait « face à des problèmes personnels et des fragilités psychologiques » et promis qu’il allait « suivre un protocole de soins ». Des aveux qui lui ont valu plusieurs messages publics de soutien à gauche, comme ceux de Mathilde Panot ou encore de Sandrine Rousseau. « Reviens-nous en forme », a fait savoir la députée écologiste.
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