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L’ex-président géorgien, Mikheïl Saakachvili, a vu ce mercredi 12 mars sa peine s’alourdir à neuf ans de prison pour détournement de fonds, au moment où une grave crise politique secoue la Géorgie depuis l’automne dernier. Mikheïl Saakachvili, 57 ans, avait déjà été condamné en 2018 par contumace à six ans de prison pour abus de pouvoir. Des accusations qui, selon des ONG de défense des droits humains, étaient politiques.
Il a été arrêté en Géorgie en 2021, à son retour d’exil en Ukraine, pour purger cette peine. Mercredi, le tribunal municipal de Tbilissi «a condamné Mikheïl Saakachvili à neuf ans de prison», en rajoutant ainsi trois ans de détention à sa peine initiale, a annoncé son avocat Dito Sadzaglichvili.
La justice géorgienne a reconnu l’ex-président coupable d’avoir détourné neuf millions de lari (près de trois millions d’euros) de fonds publics entre 2004 et 2013 alors qu’il était au pouvoir en Géorgie, a-t-il précisé, en dénonçant des accusations «montées de toutes pièces».
Incarcéré en 2021, Mikheïl Saakachvili est hospitalisé à Tbilissi depuis 2022 et n’a pas assisté à l’audience mercredi. «Il souffre de plusieurs maladies chroniques, et son état de santé se détériore périodiquement», selon Zourab Tchkaïdzé, le directeur de l’hôpital où est soigné Mikheïl Saakachvili. En effet, alors qu’il purgeait sa peine pour «abus de pouvoir» et «détournements de fonds», l’ancien chef de l’Etat a été empoisonné aux métaux lourds.
Le Parlement européen a appelé à sa libération immédiate, alors que le président ukrainien Volodymyr Zelensky a réclamé que Mikheïl Saakachvili, qui a un passeport ukrainien depuis 2019, soit transféré à Kyiv.
Mikheïl Saakachvili, qui a étudié aux Etats-Unis et en France et parle couramment cinq langues, avait été porté au pouvoir après avoir mené en 2003 en Géorgie la «Révolution des Roses», qui avait évincé pacifiquement les vieilles élites héritées de la période soviétique. Lors de sa présidence, il a mené une croisade efficace contre la corruption, a réformé une police touchée notoirement par ce fléau, emprisonné des chefs criminels et reconstruit des infrastructures en ruines.
Mais de nombreux critiques ont dénoncé sous sa présidence des atteintes aux libertés et un penchant autoritaire, citant notamment la violente répression de manifestations antigouvernementales. Malgré sa détention, il reste une figure de l’opposition au gouvernement du Rêve géorgien, accusé de dérive autoritaire et de vouloir se rapprocher de Moscou. Lors de sa présidence en Géorgie, Mikheïl Saakachvili n’a eu de cesse de se présenter en pourfendeur des oligarques qui, disait-il, «étouffent ce qu’il reste de démocratie en Europe orientale».
Signe d’une popularité dans son pays, plusieurs dizaines de milliers de Géorgiens avaient manifesté après son arrestation en octobre 2021 pour réclamer sa libération. Malgré cette démonstration de force, le gouvernement était resté inflexible. Après huit ans d’exil, notamment en Ukraine, il était rentré clandestinement en Géorgie avant des élections locales en 2021, mais avait été immédiatement arrêté pour purger la peine de six ans de prison pour «abus de pouvoir» décidée par contumace. Il avait toujours rejeté ces accusations, se disant victime d’une cabale de son grand rival, le milliardaire Bidzina Ivanichvili, fondateur du parti au pouvoir Rêve géorgien et considéré comme l’actuel homme fort du pays.
L’alourdissement de sa peine intervient alors que la Géorgie est secouée depuis plusieurs mois par des manifestations quotidiennes contre le parti au pouvoir. La crise politique a commencé fin octobre dernier, quand le Rêve Géorgien, au pouvoir depuis 2012, a revendiqué sa victoire aux législatives, truquées selon l’opposition.
Elle s’est aggravée le mois suivant, quand le parti a décidé de reporter ses efforts pour intégrer l’Union européenne, une décision perçue par ses critiques comme l’illustration d’un rapprochement avec la Russie. Des militants accusent le pouvoir d’avoir lancé une campagne d’intimidation, de passages à tabac et d’arrestations pour punir opposants et manifestants.
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