Covid-19 : cinq ans après, ces fake news qui résistent aux faits

Covid-19 : cinq ans après, ces fake news qui résistent aux faits

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L’événement aura marqué toute une génération : traumatisant pour la plupart, un bon souvenir pour quelques-uns qui ont su en profiter pour se reposer, repenser leur vie, et une communion dans un effort commun, teinté de soutien aux soignants. Le premier confinement, déclaré il y a tout juste cinq ans afin de limiter les dégâts du Covid-19 en France, alors que les hôpitaux étaient submergés dans l’Est et en Ile-de-France, restera quoi qu’il arrive dans les mémoires.

C’est aussi avec lui qu’a commencé la propagation de nombreuses fausses informations et théories du complot, alimentées par des réseaux cherchant à nuire aux institutions ou souhaitant profiter de la peur ambiante et du manque d’informations, et même par certains chercheurs, médecins ainsi que des politiques.

Des vaccins anti-Covid dangereux…

Les fake news les plus persistantes restent celles relatives aux vaccins anti-Covid, accusés d’inefficacité, d’être responsables d’une liste d’effets indésirables illimités, voire de perturber l’ADN humain. Après plus de 13 milliards de doses administrées dans le monde selon l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) – plus de 150 millions en France – et quatre années de recul, les systèmes de pharmacovigilance internationaux ont établi un profil de sécurité clair des différents vaccins anti-Covid. Ce sont même les médicaments les plus étudiés de l’histoire.

Comme l’indique la Société française de pharmacologie et de thérapeutique (SFPT), les effets indésirables graves sont très rares. Les plus préoccupants sont l’allergie (anaphylaxie), la paralysie faciale périphérique, les troubles menstruels transitoires, ou encore les myocardites et péricardites, soit une inflammation du muscle cardiaque, mais dont la fréquence et la gravité restent, selon de nombreuses études, plus faibles que les allergies, paralysies, troubles menstruels et myocardites post-infection. Il convient de rappeler une règle qui vaut pour les vaccins : depuis que la vaccination existe (en 1885), les injections n’ont jamais provoqué d’autres effets secondaires que ceux que la maladie engendre, à quelques très rares exceptions près. Surtout, les complications entraînées par les vaccins sont toujours moins fréquentes, graves et durables que celles que la maladie provoque.

“Il y a eu une dizaine de morts en France liés aux vaccins AstraZeneca, c’est une dizaine de trop, mais pour des millions de vies sauvées, rappelle Mathieu Molimard, professeur de médecine, pharmacologue, pneumologue, chef de service au Centre hospitalo-universitaire de Bordeaux et membre de la SFPT. Ces morts ont été identifiées très rapidement et les vaccins AstraZeneca ont été réorientés vers des personnes moins sensibles à ces réactions. Il ne faut pas non plus oublier qu’au début nous n’avions pas suffisamment de vaccins par ARN messager, nous n’avions pas le choix”.

D’autres effets indésirables sont encore en cours d’exploration – ils ne sont ni confirmés ni écartés -, tels que la réactivation virale comme le zona, l’élévation de la tension artérielle, ou encore le déclenchement d’acouphènes. Enfin, les risques de thrombose veineuse profonde ou embolie pulmonaire, d’infarctus du myocarde, de fausse couche ou d’accident vasculaire cérébral ont tous été réfutés grâce à des études spécifiques. De la même manière, aucun signal concernant un surrisque de décès ou d’aggravation de cancer n’a été détecté avec ces vaccins. Toutes les données de pharmacovigilance issues des Centres pour le contrôle et la prévention des maladies américains, de l’Agence européenne des médicaments (EMA) et de l’ANSM en France convergent : le rapport bénéfice/risque reste largement en faveur de la vaccination, même dans les populations les plus jeunes.

Des injections inefficaces

Les plus farouches opposants aux vaccins continuent de critiquer leur efficacité, en affirmant que les infections survenues chez des personnes vaccinées sont la preuve de cet échec. Néanmoins, les essais cliniques initiaux ont toujours indiqué que l’objectif principal des vaccins était de prévenir les formes graves, les hospitalisations et les décès, et non d’empêcher toute infection. Avec les premières souches, les vaccins ont eu un bénéfice supplémentaire en protégeant en partie de l’infection. Mais l’émergence de variants plus transmissibles comme Omicron et ses sous-lignées a diminué cet avantage. La protection contre les formes graves, elle, est restée solide.

Les théories selon lesquelles l’ARNm vaccinal pourrait modifier notre ADN ou être dangereux pour la santé ont heureusement perdu du terrain, bien qu’elles aient été relayées par des figures médiatiques, dont Didier Raoult, ex-directeur de l’IHU de Marseille. Ce dernier avait affirmé que l’ADN résiduel dans les vaccins serait dangereux pour la santé et provoquerait des cancers en s’intégrant à notre ADN. La présence d’ADN dans les vaccins Covid-19 à ARNm en quantité inférieure aux limites autorisées est connue des autorités et rien n’indique que cela pose un problème de santé. En outre, d’autres vaccins contenant des fragments d’ADN, comme celui contre la varicelle, sont utilisés depuis plus de 25 ans. Par ailleurs, aucune preuve n’a jamais démontré que l’ARNm parviendrait à pénétrer dans le noyau cellulaire où se trouve notre ADN.

Les vaccins contre le Covid-19 ont permis de sauver un nombre considérable de vies. Selon une étude publiée dans The Lancet Infectious Diseases, la vaccination mondiale aurait permis d’éviter près de 20 millions de décès. En Europe, le vaccin a sauvé 1,6 million de personnes entre 2020 et 2023, dont 125 000 en France.

Des traitements miracle censurés par “Big Pharma”

Hydroxychloroquine, ivermectine, zinc, vitamine C et D… Ces traitements ont été présentés comme des solutions peu chères et efficaces délibérément écartées par les laboratoires pharmaceutiques, en quête de profits. Pourtant l’hydroxychloroquine (HCQ), propulsée sur le devant de la scène dès le début de la pandémie par le Pr. Raoult, ne fonctionne pas, comme les essais Recovery au Royaume-Uni, Solidarity de l’OMS ainsi qu’une méta analyse Cochrane (une étude qui compile les résultats de nombreux autres travaux), l’ont mis en évidence. La première étude de l’IHU de Marseille censée démontrer son bénéfice a d’ailleurs été rétractée pour de multiples abus et erreurs. “De plus, cette étude avait été révisée et corrigée en une seule journée, ce qui est hautement anormal en science et que l’IHU de Marseille avait tenté de dissimuler”, ajoute Lonni Besançon, chercheur en visualisation de données à l’université Linköping (Suède) impliqué dans la lutte contre la désinformation médicale.

L’ivermectine, antiparasitaire utilisé en médecine humaine et vétérinaire, a eu un parcours similaire et connaît même un regain aux Etats-Unis ces derniers mois, puisqu’on lui attribue désormais des bénéfices contre le cancer. L’enthousiasme pour ce médicament a été alimenté par quelques études observationnelles et petits essais, souvent entachés de biais méthodologiques importants. “Une méta-analyse avait montré une efficacité de l’ivermectine, sauf qu’elle avait intégré des études frauduleuses. Une fois ces travaux retirés, la nouvelle conclusion montrait son absence de bénéfice”, indique Lonni Besançon. Des essais cliniques rigoureux ont confirmé son inefficacité et une méta analyse Cochrane a conclu qu’il n’existe pas de preuves fiables démontrant que l’ivermectine réduise la mortalité, le besoin en ventilation mécanique, les admissions à l’hôpital ou le temps de récupération clinique. Comme pour l’hydroxychloroquine, ces études ont été menées par des institutions publiques et universitaires, sans conflit d’intérêts avec l’industrie pharmaceutique.

Quant au zinc, aux vitamines C et D, s’ils jouent un rôle important dans le bon fonctionnement du système immunitaire, aucune étude n’a établi d’effet thérapeutique chez les patients atteints de Covid-19, à l’exception peut-être d’un effet modeste chez les personnes présentant une carence. “Des millions de personnes ont pris ces traitements. A présent, plus personne ou presque n’y croit. Mais il y a eu un déploiement de moyens colossaux alors qu’il n’y avait aucune base pharmacologique solide. La communauté scientifique a mené des centaines d’études portant sur l’hydroxychloroquine, l’ivermectine, le zinc et les vitamines C et D et malgré tout cela, aucune preuve d’efficacité n’a été mise en évidence”, insiste le Pr. Molimard. “Il y a eu un gâchis d’efforts scientifiques et une potentielle perte de chance pour les patients, parce qu’il y a eu un gaspillage d’argent qui a manqué à d’autres recherches sur des traitements plus intéressants, mais aussi parce que cela a entraîné une fausse confiance de certains citoyens qui pensaient que la potion magique du Pr. Raoult était un remède miracle qui leur permettait de n’avoir rien à craindre du Covid”, ajoute de son côté Lonni Besançon.

Les masques, au mieux inutiles, au pire dangereux

La communication initiale du gouvernement français sur les masques, jugés inutiles, a été problématique. “Cela a été le péché originel, qui a entaché la crédibilité du gouvernement pour toute la suite de la pandémie”, relève le Pr. Molimard. Si les autorités se sont défendues en expliquant, plus tard, que leur communication était influencée par la pénurie mondiale d’équipements de protection, les dégâts ont été importants, notamment en favorisant la défiance envers les autorités et les autres recommandations sanitaires.

Aujourd’hui, le rapport de la population française envers les masques n’a quasiment pas évolué. Peu de personnes en portent lorsqu’elles sont malades, alors que cette pratique, courante dans de nombreux pays asiatiques, est bénéfique contre de nombreuses maladies. Les recherches ont démontré que l’utilisation du masque réduit significativement le risque de transmission du Covid-19. Les théories selon lesquelles le port prolongé pourrait provoquer hypoxie (une réduction d’oxygène dans le sang), hypercapnie (un excès de CO2 dans le sang) ou infections bactériennes ont toutes été réfutées. Des mesures d’oxygénation sanguine chez des personnels soignants portant des masques pendant de longues périodes n’ont par exemple montré aucune réduction significative du taux d’oxygène. Des recherches sur des personnes souffrant d’insuffisance respiratoire chronique ont confirmé que même pour ces populations fragiles, le port du masque chirurgical n’altère pas significativement les échanges gazeux.

Les fausses informations propagées durant la pandémie ont au moins eu le mérite de susciter une réaction bienvenue de l’Association médicale mondiale. “Elle a ajouté, en 2024, un article (le 8) dans la déclaration d’Helsinki. Il stipule qu’en situation d’urgence de santé publique, si de nouvelles connaissances et interventions peuvent s’avérer impérativement nécessaires, il reste essentiel de respecter les principes éthiques, souligne Hervé Maisonneuve médecin et éminent spécialiste de l’intégrité scientifique. Sans être explicite, ce sont les comportements de collègues parfois complotistes qui sont visés”.

La pandémie aura aussi rappelé que la méthode scientifique demeure un excellent outil face aux théories du complot, et que la rigueur intellectuelle et l’esprit critique restent les meilleures défenses contre la désinformation. Ce qui implique de toujours vérifier la source et la qualité des informations, distinguer les faits établis des opinions ou hypothèses, reconnaître nos propres biais cognitifs et accepter la complexité et l’incertitude. Cinq ans après le début de cette crise, il faut espérer que ces leçons soient retenues.

L’Express

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