Fin des discussions
Les pays développés se sont engagés, dans la nuit de samedi 23 novembre à dimanche 24 novembre à Bakou,a à financer davantage les pays pauvres, au terme d’un sommet climat chaotique. Mais le texte ne satisfait pas les pays en développement.
C’est très loin des 1 000 milliards de dollars rêvés par les pays du Sud, et même des 500 milliards espérés. Après deux semaines de négociations chaotiques, les 197 pays réunis à Bakou en Azerbaïdjan pour la 29e conférence des Nations unies sur le climat (COP29) ont approuvé, dans la nuit de samedi 13 novembre à dimanche 14 novembre, un accord prévoyant au moins 300 milliards de dollars de financements annuels pour les pays en développement. Ces derniers en exigeaient beaucoup plus pour pouvoir investir dans des énergies bas carbone, au lieu de développer leurs économies en brûlant du pétrole et du charbon, et pour faire face aux effets dévastateurs du changement climatique. Mais ils se sont résignés à accepter ce nouvel objectif financier à l’horizon 2035.
Plus précisément, les pays européens, les Etats-Unis, le Canada, l’Australie, le Japon et la Nouvelle-Zélande, historiquement responsables du réchauffement, s’engagent, sous l’égide de l’ONU, à augmenter de 100 milliards aujourd’hui à «au moins 300 milliards de dollars» annuels d’ici 2035 leurs prêts et dons aux pays en développement. Premier bailleur mondial de la finance pour le climat, l’Union européenne n’était pas prête à aller au-delà de ce montant : de nombreux Etats membres connaissent une dégradation de leurs finances publiques et des secousses politiques. Mais elle estime avoir contribué à un résultat historique. «La COP29 passera à la postérité comme le début d’une nouvelle ère pour la finance climatique», veut croire le commissaire Wopke Hoekstra. De son côté, le secrétaire britannique à l’Energie, Ed Miliband, a salué ce deal sur le fil, y voyant un «accord critique de la dernière heure [pris] à la dernière heure pour le climat». «Ce n’est pas tout ce que nous ou d’autres voulions mais c’est un pas en avant pour nous tous», a-t-il ajouté.
La France, par la voix de sa ministre de la Transition écologique, Agnès Pannier-Runacher, a jugé l’accord «décevant» et «pas à la hauteur des enjeux». Joe Biden y a vu de son côté «un grand pas en avant» tout en reconnaissant qu’il restait «beaucoup de travail à réaliser pour atteindre nos objectifs climatiques».
«Une montagne de travail à accomplir»
Mais l’accord, adopté après d’épuisantes tractations et salué par les applaudissements de quelques délégués, laisse un goût amer à de nombreux participants. Le représentant des 45 pays les plus pauvres de la planète le juge ainsi «pas ambitieux». Le chef des négociateurs du groupe africain, le Kényan Ali Mohamed, regrette un engagement financier «trop faible» et «trop tardif» et «trop ambigu dans sa mise en œuvre». «Nous quittons Bakou en sachant que nous avons réalisé des progrès dans certains domaines, mais que ce que nous avons réalisé est loin d’être ce que nous espérions», a-t-il détaillé. «Aucun pays n’a obtenu tout ce qu’il voulait, et nous quittons Bakou avec une montagne de travail à accomplir, a reconnu le chef de l’ONU climat, Simon Stiell. Ce n’est donc pas l’heure de faire des tours d’honneur.»
La gestion des négociations climatiques par l’Azerbaïdjan est sévèrement jugée. L’Allemagne lui a reproché sa proximité avec des pays pétroliers, et les Etats les plus pauvres de la planète ont claqué la porte d’une réunion samedi, estimant n’avoir pas été pleinement consultés. Bakou fut une «expérience douloureuse», a dit Marina Silva, la ministre de l’Environnement du Brésil, qui accueillera la prochaine COP dans un an.
La transition hors des énergies fossiles a disparu
Autre déception, l’appel à la «transition» vers la sortie des énergies fossiles, acquis principal de la COP28 de Dubaï combattu par l’Arabie saoudite, n’apparaît pas explicitement dans les principaux textes finaux présentés à Bakou. L’appel à «opérer une transition juste, ordonnée et équitable vers une sortie des combustibles fossiles dans les systèmes énergétiques» avait été arraché dans la douleur en 2023. En revanche, les «combustibles de transition», le terme de l’industrie gazière pour le gaz naturel, a droit a une mention explicite. Les Européens, qui espéraient plus d’ambition sur la baisse des émissions de gaz à effet de serre, ne retrouveront pas non plus dans le texte la création du dispositif d’un suivi annuel des efforts de transition hors des fossiles (charbon, pétrole, gaz) qu’ils espéraient.
Cet échec relatif, ou ce demi-succès selon les interprétations, survient à la fin d’une année, 2024, qui sera vraisemblablement la plus chaude jamais mesurée. Et, neuf ans après l’accord de Paris, l’humanité va encore brûler plus de pétrole, de gaz et de charbon que l’année passée. Pendant les deux semaines de sommet en Azerbaïdjan, des tempêtes ont tué aux Philippines et au Honduras, l’Espagne a continué de panser ses plaies après des inondations meurtrières, l’Equateur a déclaré l’urgence nationale à cause de la sécheresse et des incendies.
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