Paulette Brucale frissonne dans son manteau bleu mais ne se plaint pas. Arrivée en avance, elle patiente dans la longue queue qui s’est formée devant le café Le Saint-Louis où Jordan Bardella est attendu, vendredi 22 novembre en début de soirée, pour une séance de dédicace, à Sète, dans l’Hérault.
La retraitée de 87 ans tient le livre du président du Rassemblement national (RN), Ce que je cherche (Fayard, 324 pages, 22,90 euros), serré contre elle, dans un sac en plastique. « Un gars calme et rassurant, qui sait où il va », commente cette ancienne gardienne dans un centre commercial qui, avec son mari maçon, a élevé dix enfants, ce qui lui a valu une médaille de la famille française. « Le RN est le seul parti capable de nous défendre », poursuit Paulette Brucale.
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Le livre de Jordan Bardella, un objet marketing propulsé par Vincent Bolloré
Elle est veuve depuis près de quarante ans, touche 1 000 euros de retraite, aimerait « avoir un peu plus pour vivre ». Un « vrai changement sur la sécurité », aussi, et « plus de médecins », parce qu’« on a le temps d’être mort dix fois avant d’être soigné ».
Son fils Didier, poissonnier dans un supermarché, l’a accompagnée. Ses nombreux frères et sœurs ont quitté Sète : l’un vend des légumes en Bourgogne, un autre a été maçon dans l’Aveyron, un autre encore a tenté sa chance au Canada, où il est bûcheron. Ils ne se voient qu’une fois par an, par visio. Lui, le « numéro sept », est resté avec Paulette. Il acquiesce quand sa mère réclame une « immigration zéro », évoquant ces « voitures chameaux » qui, chaque été, partent vers l’Algérie ou le Maroc, les toits saturés de valises et de paquets. « Ils pleurent mais ils ont plus d’aides que nous… », cingle le poissonnier.
Née en 1938, Paulette se souvient du « bruit de bottes » des Allemands : « Ils les ciraient avec du beurre, alors qu’on manquait de tout. » Son père douanier, qui l’a élevée durement, était secrétaire du Parti communiste français (PCF), à la section de Sète. Comme lui, elle a d’abord voté pour le PCF, avant de choisir le Front national (FN, l’ancien nom du RN), parce que la gauche – des « rigolos ! » – a abandonné « les ouvriers et les personnes âgées ». En 1981, elle votait déjà pour Jean-Marie Le Pen. Et attend patiemment, depuis, la victoire de son parti. Encore une fois, celle-ci s’est dérobée, aux élections législatives des 30 juin et 7 juillet. « Il y a eu de la triche », accuse-t-elle, sans expliquer où, quand, encore moins comment. « Deux partis seulement, ce serait bien, et non pas cinquante, tous unis contre un », ajoute son fils, furieux contre le front républicain. « Ce n’est pas ça, la démocratie ! »
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