A Saint-Denis, une collecte s’organise pour Mayotte : «En cas de catastrophe, l’Etat n’en fait jamais assez»

A Saint-Denis, une collecte s’organise pour Mayotte : «En cas de catastrophe, l’Etat n’en fait jamais assez»

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Cyclone Chidodossier

L’ONG Outre-mer-solidarités-catastrophes recueille des dons jusqu’en février, et organise leur acheminement vers l’archipel mahorais dévasté par le cyclone Chido.

Les feux d’un petit sapin papillotent dans un coin du hall de la bourse du travail, à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis). Ils n’ont pas d’emballages cadeaux, mais des dizaines de cartons s’amoncellent à son pied. Les donateurs affluent dans le local prêté par la mairie pour déposer conserves, vêtements, médicaments, et produits d’hygiène… Comme Ryan : «J’apporte du savon et quelques vêtements. Ce n’est pas grand-chose, mais il faut se montrer solidaire.»

L’ONG Outre-mer-solidarités-catastrophes (OMSC) organise une opération de collecte pour venir en aide à l’archipel mahorais, sinistré depuis le passage du cyclone Chido il y a dix jours. Du lundi au samedi, entre 10 heures et 17 heures, chacun est invité à déposer des dons qui seront envoyés par bateau vers Mayotte dans les prochains jours. Estampillé AGS, le conteneur est mis à disposition sans frais par la société de transport. Alain Providenti, directeur commercial, détaille : «Le conteneur peut embarquer environ 800 cartons. Il faut compter huit semaines de traversée et être bien organisé. Le port de Mayotte est encore très encombré.» AGS pourrait libérer un deuxième conteneur dans les semaines à venir : «La collecte rencontre du succès. Les gens répondent présent pour le moment», poursuit le responsable.

Eau, fournitures scolaires, antimoustique

Jean-Luc Cyprien, président d’OMSC, décrit l’importance de la coordination avec les associations sur place et les services de l’Etat : «Leurs informations sont précieuses. Dans ces situations, la générosité fait rarement défaut. Mais il faut surtout identifier les vrais besoins, les dons doivent être cohérents avec la demande pour ne pas être gâchés.» Une liste à été établie et relayée par l’association : il faut de l’eau, des fournitures scolaires mais aussi de l’antimoustique et des moustiquaires. «Les épidémies de dengue sont fréquentes dans la région et l’eau stagnante risque de ne pas aider», commente Jean-Luc Cyprien. Il se veut optimiste quant à la remise en service de l’unique aéroport de l’île, endommagé par la tempête : «Cela permettra d’acheminer les vivres prioritaires en moins de vingt-quatre heures.» OMSC a l’habitude de gérer ce genre de situation : elle s’était notamment mobilisée après la tempête Fiona, qui avait dévasté la Guadeloupe en 2022.

«Ra Hachiri», scande Sitti Maliki dans le local où a lieu la collecte. La devise mahoraise signifie «Nous sommes debout.» La manager de l’ONG se réjouit d’un élan de solidarité : «Nous avons lancé un appel sur les réseaux sociaux et par toutes les autres voies possibles. Et cela n’arrête pas, nous avons déjà fermé des dizaines de cartons depuis ce [lundi] matin.» Fleur de Ylang-Ylang (un symbole de Mayotte) épinglée au col, Sitti a mis de côté son emploi après le passage du cyclone pour venir en aide à son île d’origine : «Je suis une sinistrée, je pleure. Je suis ici mais ma tête, mon cœur son là-bas, avec les victimes.» Anciennement présidente des Mahorais de France, Sitti fera près de deux heures de route chaque jour pour coordonner les opérations à Saint-Denis jusqu’à la fin de la collecte, début février. Elle décrit des communications difficiles avec ses proches sur l’archipel : «Les échanges avec ma famille sont parcimonieux. La plupart du temps, ils laissent le téléphone éteint pour économiser de la batterie. Ils n’ont plus rien.»

«La situation de Mayotte est indigne d’un pays comme la France»

Si elle s’émeut de la solidarité et est déterminée à aider les Mahorais, Sitti ne cache pas sa colère après l’intervention en bras de chemise d’Emmanuel Macron devant les sinistrés : «Je me suis sentie insultée. Il doit rassurer et apaiser. Il se présente devant le malheur et le chaos en nous exhortant à le remercier comme si nous n’étions pas Français comme lui.» Un constat partagé par les autres membres de l’ONG. A l’évocation du nom du chef de l’Etat et de sa visite sur place, Franck Pétrose, secrétaire général de l’ONG, affecte une moue dubitative. Puis soupire : «C’est encore une façon de se montrer proche du peuple. Des maisons de bric et de broc, en tôle… Depuis des années, la situation de Mayotte est indigne d’un pays comme la France.» Il préfère souligner le travail des bénévoles et des ONG : «En cas de catastrophe, la détresse est telle que l’Etat n’en fait jamais assez», diagnostique-t-il. Si le travail en bonne intelligence avec les services gouvernementaux est essentiel pour une aide efficace, il souligne que ce sont les associations «qui portent les choses et effectuent le gros du boulot sur le terrain».

Libération

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