Les défaillances d’entreprises au plus haut, au moins 200 000 emplois menacés

Les défaillances d’entreprises au plus haut, au moins 200 000 emplois menacés

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Cette fois, on y est. Le mur de faillites finit par se dresser. Après des années marquées par un nombre de défaillances historiquement faible liées aux mesures exceptionnelles mises en place par l’Etat pendant les confinements à répétition pour soutenir les entreprises, le rattrapage a bien commencé et devrait se poursuivre cette année. La dernière livraison de statistiques de la Banque de France fait état de 65 764 entreprises entrées en redressement judiciaire ou en liquidation judiciaire pendant l’année 2024. C’est à la fois davantage que l’an dernier (56 313) et surtout davantage que la moyenne d’avant la pandémie (59 342 dans les années 2010 à 2019).

Le secteur de la construction, dont les organisations patronales n’ont cessé d’alerter sur la gravité de leur situation ces derniers mois, figure, avec le commerce, parmi les secteurs les plus touchés : 14 743 entreprises sont concernées par ces procédures, en hausse de 25 % par rapport à l’an dernier. Cela dit, c’est un secteur qui enregistre traditionnellement davantage de défaillances que son poids dans l’économie, et l’augmentation par rapport à la décennie 2010 est seulement de 0,4 %. Les activités immobilières, celles financières et d’assurances ainsi que le transport et l’entreposage accusent les progressions les plus significatives, autour de 30 % de plus que l’an dernier et nettement au-dessus de leur moyenne pendant la précédente décennie. Par ailleurs, tous secteurs confondus, les entreprises défaillantes sont plus grandes qu’avant la pandémie : 65 grandes entreprises et entreprises de taille intermédiaire sont concernées par un redressement judiciaire ou une liquidation, ce qui représente une hausse record de 97 % par rapport à la moyenne 2010-2019.

Les syndicats inquiets

Si tous les emplois concernés ne sont pas forcément détruits, puisque les sociétés en redressement judiciaire ne mettent pas toutes la clé sous la porte, il n’en reste pas moins qu’ils sont nombreux à être en péril. Combien ? Plus de 192 300 emplois ont été menacés en 2024 par une procédure collective, constate le Conseil national des administrateurs judiciaires et mandataires judiciaires. C’est moins que l’année précédente (213 000), marquée notamment par les difficultés de Casino ou d’Orpea. D’autres sources, comme le groupe bancaire BPCE, avancent des estimations plus élevées, à 250 000 emplois.

Le sujet inquiète particulièrement les syndicats comme le patronat, qui, dans la foulée de la censure du gouvernement de Michel Barnier en décembre, se sont fendus – fait sans précédent – d’une déclaration commune unissant sept organisations sur les huit représentatives au niveau national. «D’ores et déjà en France, des projets d’investissement sont gelés, les intentions d’embauche sont révisées, les défaillances d’entreprises de toutes tailles se multiplient au point d’atteindre un niveau inconnu depuis longtemps», y lisait-on. Les signataires (CFDT, FO, CFE-CGC et CFTC côté salariés, Medef, CPME et U2P côté employeurs) alertaient sur «les conséquences d’une instabilité prolongée». Seule la CGT faisait exception, sa secrétaire générale, Sophie Binet, expliquant en début de semaine sur France Info que «dans cette tribune, il manquait une chose, à savoir la stabilité pour quoi faire : si c’est avoir un gouvernement stable qui continue sa politique de régression sociale, c’est sans nous».

«Cas de figure différents»

Si le constat apparaît en grande partie partagé, les conclusions diffèrent. Côté patronal, l’accent est mis sur la nécessité de baisser la dépense publique, à laquelle «nous sommes drogués», diagnostiquait récemment Patrick Martin, le président du Medef, selon qui «on est à un niveau de dépenses sociales qui devient insupportable». Pas question pour autant, à ses yeux, de toucher aux quelque 160 milliards d’euros d’aides directes et indirectes dont bénéficient les entreprises, dont presque 80 milliards d’euros d’exonérations de cotisations sociales compensées par l’Etat : il faudrait au contraire, plaident les représentants des employeurs, poursuivre la politique d’allègement du «coût du travail».

Côté syndicats, on veille, à la CFDT par exemple, à distinguer les situations. «Il y a des cas de figure très différents, expliquait ainsi Marylise Léon dans un entretien récent à Libération, des entreprises qui n’ont pas anticipé les grandes mutations, comme la grande distribution, ce qui nécessite un accompagnement des salariés en reconversion ; des secteurs comme l’automobile, qui sont frappés de plein fouet par la transformation écologique, où il faut une responsabilisation des entreprises, notamment des constructeurs vis-à-vis des sous-traitants ; et puis des entreprises qui restructurent parce qu’elles veulent optimiser leurs résultats.» Mais «dans tous ces cas, estime la secrétaire générale de la CFDT, il faut renforcer le dialogue social et le poids des représentants du personnel». Le mur des défaillances ne devrait décidément pas voir sa hauteur baisser cette année.

Libération

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