A Saint-Etienne, un logement en mission émancipation

A Saint-Etienne, un logement en mission émancipation

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Yassine a deux spécialités : les sandwichs à l’omelette au pesto et le doublage de films. La première, il a pu la peaufiner, avec du pain de mie complet, depuis qu’il vit seul dans son appartement. Et la seconde, c’est l’activité qu’il a proposée pour animer l’une des soirées mensuelles réunissant les locataires de son immeuble. Le jeune homme est un fin connaisseur des vidéos qu’on trouve en ligne pour s’entraîner à «faire la voix et jouer le personnage» de tel film ou tel dessin animé. Ce loisir le «rend heureux», tout comme il apprécie désormais ce rendez-vous régulier entre voisins, «qui permet après une semaine chargée de se détendre pour passer ensuite un week-end agréable». Parfois, la demi-douzaine d’habitants – en majorité des hommes – organise une sortie en ville. Leurs logements se trouvent dans un quartier calme, proche d’un centre commercial, à une poignée d’arrêts de tram du centre de Saint-Etienne (Loire).

Avant d’emménager l’été dernier dans son T1 de 40 m², Yassine, 24 ans, vivait avec ses parents. Titulaire d’un BTS comptabilité et gestion, il recherche un emploi. En attendant, il a entamé un service civique à France Travail. Il est posté à l’accueil, afin d’«aider les usagers pour l’actualisation et la réinscription ou scanner des documents», détaille-t-il. Yassine juge certaines missions «simples», d’autres encore «compliquées» : «Il y a eu beaucoup de stress comme je viens de débuter, j’espère apprendre beaucoup de choses à l’avenir.» Conquérir son autonomie, trouver un équilibre, avoir un chez-soi : le défi est semblable à tout jeune qui rentre dans la vie active. Si ce n’est que Yassine et ses voisins sont atteints de troubles du spectre autistique. «On tient à leur émancipation, il faut être vigilant au fait que ce sont d’abord des jeunes gens avec des envies de jeunes adultes», souligne Marine Billard, éducatrice spécialisée et coordinatrice de parcours au sein de leur résidence.

La création de ce lieu répond à une formule innovante : le Dispositif d’accompagnement au logement inclusif pour adultes autistes (Daliaa). Son objectif : «Proposer une solution d’habitat pérenne avec un accompagnement souple, adapté et personnalisé, pour sécuriser ces jeunes et leurs familles, indique Isabelle Bru, responsable de la maîtrise d’ouvrage d’insertion chez Soliha Loire. Ce n’est pas du logement en foyer, c’est du logement de droit commun, les personnes sont titulaires de leur bail.» Et depuis l’arrivée des premiers locataires au printemps 2023, «ça se passe très bien». Acquis par l’investisseur solidaire Soliko, l’immeuble a été cédé à Soliha en bail à réhabilitation pour trente-cinq ans. La surface habitable de 265 m² compte six appartements autonomes, plus un logement «tremplin» pour que la personne puisse se tester, avant de rester ou d’envisager une autre solution. Le loyer reste modique : 242 euros par mois.

Au rez-de-chaussée, un espace est réservé au personnel accompagnant (des éducatrices spécialisées, une accompagnatrice éducative et sociale, et une neuropsychologue) à côté d’une grande pièce destinée à des ateliers pédagogiques. Acteur de l’économie sociale et solidaire et spécialiste du logement des personnes défavorisées, fragiles et vulnérables, Soliha est partenaire d’autres associations du champ médico-social, PEP 42 et COS Autonomia. Unique en France, le projet a été lancé par la présidente de l’association Autisme France, Danièle Langloys. Son fils de 40 ans, qui travaille dans un établissement d’insertion, est le doyen des locataires de Daliaa à Saint-Etienne : «Il n’a aucun diplôme mais il est très débrouillard, il est très fier de vivre chez lui, sans moi. Les parents ne sont jamais l’avenir de leurs enfants, handicapés ou non. L’autisme n’est pas monolithique et surtout, il peut changer dans le temps, il peut toujours y avoir une dynamique.»

Avec Daliaa, pas un locataire «n’est resté comme il était, ils ont tous buté sur des difficultés mais ils ont tous avancé», salue Danièle Langloys. «Ces personnes ont des problèmes exécutifs, alors on cherche les bons outils de déclenchement. Ça peut être la présence d’une personne sur un tout petit créneau ou l’utilisation d’outils technologiques et numériques, pour les inciter à prendre les bonnes routines, à créer des habitudes de fonctionnement jusqu’à l’automatisation», explique la neuropsychologue du dispositif, Coline Alba. Yassine, lui, n’a pas encore dompté sa bête noire, «les tâches administratives». Mais ses entretiens réguliers avec la praticienne l’«aident à dégager le stress, la colère» en lui donnant «des astuces, des conseils». Pour, dit-il, «améliorer ses atouts dans la vie quotidienne».

Libération

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