Marc Ferracci : «Les éoliennes en mer doivent être une dimension importante de notre souveraineté énergétique»

Marc Ferracci : «Les éoliennes en mer doivent être une dimension importante de notre souveraineté énergétique»

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Une fois de plus, c’est dans un grand port français que, ce lundi 17 février, un acte de la transition énergétique française a eu lieu. Au Havre, Marc Ferracci, ministre de l’Industrie et de l’Energie, est venu poser la première pierre de l’extension de l’usine de Siemens Gamesa, qui prévoit d’y assembler des pales parmi les plus grandes du monde. Il a profité de cette visite en Seine-Maritime pour annoncer que les prochains appels d’offres comporteraient désormais des critères – dits «de résilience» – permettant de favoriser des usines et entreprises européennes plutôt que chinoises. Mais derrière les grandes annonces, la France fait preuve d’un certain retard en matière d’énergies renouvelables. Auprès de Libération, Marc Ferracci défend les «choix» du gouvernement «dans un cadre budgétaire contraint» et «une vision de long terme d’un mix équilibré entre les renouvelables et le nucléaire».

En septembre, la Commission européenne regrettait le fait que la France n’allait pas suffisamment vite sur le développement des énergies renouvelables. L’extension de l’usine Siemens Gamesa et les nouveaux critères pour favoriser les entreprises européennes sont-ils une première réponse ?

La France met tout en œuvre pour respecter ses engagements. Ce que prévoit la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) [qui doit être publiée en avril, ndlr], c’est d’évoluer de manière extrêmement puissante sur les énergies renouvelables : d’ici 2035, multiplier par 2 la production de chaleur renouvelable, par 2 l’éolien terrestre, par 4 le solaire. Mais nous avons aussi porté au niveau européen une position très claire sur la nécessité d’articuler les ambitions climatiques avec la politique industrielle, qui permettrait de préserver les emplois et les usines dans nos territoires. Il faut conjuguer souveraineté énergétique et souveraineté industrielle, ce que permettent les énergies renouvelables.

Que peuvent changer ces nouveaux critères annoncés ce lundi pour l’industrie européenne du secteur ?

Nous avons une concurrence vive, qui ne s’exerce pas toujours dans des conditions loyales, avec des produits venus de Chine, massivement subventionnés. Le principe des critères de résilience, c’est de faire en sorte que les chaînes de valeur puissent être localisées en Europe. Cela a été rendu possible par le règlement européen pour une industrie «zéro net», qu’il nous faut maintenant concrétiser pour qu’il nous offre une forme de protection commerciale. Lors de mon déplacement pour l’extension de l’usine de pales d’éoliennes de Siemens Gamesa, j’ai rappelé que les éoliennes en mer doivent être une dimension importante de notre souveraineté énergétique.

L’Allemagne, dont l’industrie et l’économie restent dépendantes de la Chine, va-t-elle vous suivre ?

Il faut être confiant. Les lignes bougent à Bruxelles, notamment en raison de l’ambiance de guerre commerciale que fait peser Donald Trump. Dans mes discussions avec mes homologues allemand, italien ou polonais, je constate que l’Europe est en train de sortir de la naïveté dans laquelle elle a longtemps été vis-à-vis du commerce international. Cela se voit notamment sur les évolutions de Bruxelles concernant les aides à l’investissement ou les commandes publiques. La France est très motrice sur ce sujet-là.

La visibilité sur l’éolien en mer existe, les appels d’offres se succèdent, les échéances sont plutôt claires. La branche énergie de General Electric a pourtant confirmé la suppression de 300 postes dans les usines de Montoir-de-Bretagne et Nantes. Comment interprétez-vous cette décision sociale ?

Je ne veux pas commenter une décision d’entreprise ponctuelle. Ce que je constate, c’est qu’au global l’emploi progresse dans les industries en lien avec la transition énergétique. Il ne faut pas s’arrêter à une annonce qui peut tenir à un certain nombre de paramètres spécifiques à l’entreprise, à son marché ou à son positionnement technologique – qui évolue très vite.

Alors que les objectifs d’installations solaires pourraient être moins ambitieux que prévu dans le PPE, selon le site spécialisé Contexte, votre projet de décret qui prévoit de diminuer les aides de l’Etat pour les petites installations photovoltaïques, publié mercredi 12 février, hérisse le secteur. Ne craignez-vous pas que ce texte atrophie le développement du solaire ?

Le principe de l’autoconsommation est un bon principe que nous continuons à soutenir. Nous allons d’ailleurs étendre le taux de TVA réduit aux très petites installations. Mais quel choix fait-on sur l’électricité qui irrigue le marché ? Quels types d’installations doit-on subventionner ? Nous avons été en surcapacité de production d’électricité en 2024 et nous sommes dans un cadre budgétaire contraint, il faut donc faire des choix. Nous recentrons les aides sur les installations qui permettent aux consommateurs d’obtenir de l’électricité au meilleur prix, en particulier sur les grandes installations photovoltaïques car c’est plus efficace économiquement.

EDF estime qu’elle pourrait avoir 2 GW de puissance en plus si elle engageait des travaux sur ses barrages hydrauliques. Mais si cette entreprise ou Engie font ces travaux, leur concession serait remise en jeu en raison d’un règlement de l’UE. Tout est donc à l’arrêt. Comment faire pour sortir de cette situation ubuesque ?

L’UE souhaite une mise en concurrence des barrages, pas la France. Or cette situation juridique entraîne en effet une perte d’énergie pilotable, décarbonée, ancrée dans nos territoires. Il faut sortir de ce statu quo. Une mission parlementaire doit bientôt rendre ses conclusions et ses recommandations, sur lesquelles nous nous appuierons pour que les investissements puissent avoir lieu. Il faudra également à cette occasion réfléchir à la manière dont on peut faire profiter cette électricité pilotable aux industriels.

Les anti-énergies renouvelables affirment qu’elles seraient plus coûteuses que d’autres énergies, comme le nucléaire…

Les technologies sur l’éolien terrestre et en mer s’améliorent, les coûts de production baisseront, ces industries sont porteuses d’une empreinte industrielle et de créations d’emplois… Il faut aborder l’ensemble de ces sujets et pas seulement celui du prix de l’électricité à court terme, mais plutôt rester sur une vision de long terme d’un mix équilibré entre les renouvelables et le nucléaire, notamment parce qu’ils sont complémentaires.

Nous sommes en phase de discussion entre l’Etat et EDF sur les conditions de financement du programme du nouveau nucléaire. Les choses avancent de manière satisfaisante et nous ferons des annonces dans les prochains mois sur le schéma de financement, qui doit atteindre deux objectifs : la soutenabilité du modèle économique d’EDF et celui de donner accès à un prix d’électricité compétitif.

L’Etat pourrait-il participer à ce financement ?

Les programmes similaires lancés en Europe s’appuient sur un soutien financier de l’Etat sous forme de prêts. Et c’est une hypothèse sur laquelle nous travaillons.

Libération

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