Défense européenne : Macron reprend du galon

Il y a deux mois encore, personne n’aurait parié sur le retour en grâce d’Emmanuel Macron. Les premiers pas de François Bayrou à Matignon étaient laborieux et le chef de l’Etat ne savait plus quoi imaginer pour stopper sa glissade dans les sondages et reprendre la main après sa dissolution ratée. Des référendums pour permettre aux Français de «trancher des sujets déterminants» comme il l’avait suggéré lors de ses vœux ? Rien qui permette vraiment d’entrevoir une embellie. Et puis soudain le président américain a abandonné l’Ukraine à Vladimir Poutine et lâché l’Europe comme une vieille chaussette trouée. Emmanuel Macron s’est retrouvé non seulement une mission mais aussi une légitimité. Lui qui avait inauguré son premier mandat sur les notes de l’hymne de l’Union européenne (l’Ode à la joie de Beethoven) a aussitôt enfilé son costume de chef de guerre. Président du seul pays de l’UE à détenir l’arme nucléaire et donc seul à même de dissuader un ennemi de s’en prendre au pays, il a endossé en quelques heures le rôle de leader européen, n’excluant pas de faire profiter ses partenaires de son «parapluie nucléaire» et relançant cette défense commune pour laquelle il milite depuis des lustres, seul face aux oppositions.

Cette fois, devant la peur inspirée par le duo Donald Trump-Vladimir Poutine, personne ne moufte vraiment, ou alors mezza voce car l’opinion est majoritairement en faveur du soutien à l’Ukraine. Emmanuel Macron a compris qu’il tenait là de quoi redorer son image et affaiblir ses adversaires politiques, notamment le RN pris en tenailles entre ses sympathies trumpistes et sa grande indulgence pour la Russie de Poutine. Le chef de l’Etat en profiterait-il, au prétexte qu’il faut financer le réarmement du pays, pour étouffer le débat renaissant sur l’opportunité de sa sacro-sainte réforme des retraites et affaiblir le modèle social ? Ce serait dommage. Et un jeu périlleux. L’opinion a peur mais elle sait reconnaître une entourloupe.