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La commission indépendante de l’ONU qui enquête sur l’Ukraine met en lumière le fait que deux tiers des personnes agressées sexuellement par les troupes russes sont des hommes. Pourtant, leurs souffrances sont encore peu entendues.
Lentement, la parole de ceux qui ont subi des atrocités se fait entendre. L’ancien marin Oleksii Sivak est l’un de ceux qui osent raconter leur histoire. Dans les médias internationaux, il se fait le porte-parole d’Ukrainiens, qui, comme lui, ont été victimes de violences sexuelles. Il se livre ainsi auprès d’Euronews, puis du Guardian. Il raconte les décharges électriques sur ses testicules infligées par les troupes russes en 2022, comment il a été détenu pendant deux mois dans un sous-sol de Kherson, sa commune natale. Occupée par les Russes pendant huit mois, jusqu’à sa reprise par les Ukrainiens en novembre 2022, la ville a abrité plus de vingt salles de torture de masse, installées par les troupes du Kremlin et découvertes après leur retrait.
L’histoire d’Oleksii Sivak est loin d’être unique. Depuis 2022 et l’invasion de l’Ukraine par la Russie, le Conseil des droits de l’homme (CDH) de l’ONU a établi une commission d’enquête internationale indépendante sur le pays. Le 23 septembre 2024, son président, Erik Mose, dresse un constat accablant : «La plupart des victimes étaient des hommes. Nous avons recueilli des preuves de violences sexuelles utilisées comme torture, principalement contre des hommes en détention, et des viols visant des femmes dans des villages sous contrôle russe.» Les agressions incluent «le viol, la tentative de viol, les menaces de viol et de castration, les coups ou l’administration de chocs électriques sur les parties génitales, la nudité forcée répétée et l’humiliation sexualisée», détaille le CDH. La commission précise que l’usage de ces violences est une caractéristique commune à presque tous les centres de détention russes.
Des actes de barbarie dénoncés dès le début de la guerre
Depuis le début de l’offensive du Kremlin le 24 février 2022, l’ONU a documenté 342 cas de violences sexuelles perpétrées par des membres des forces armées russes. Sur ce total, plus des deux tiers des victimes sont de sexe masculin (236 hommes, et 2 mineurs). Ces chiffres se basent sur 875 entretiens réalisés par la commission d’enquête, mais seraient bien en deçà de la réalité. Dans un rapport de 2023, l’organisme All Survivors Project, qui documente les agressions sexuelles subies par les hommes dans des situations de conflits, estime que seuls 25 % des cas de ces violences seraient signalés.
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Dès le début de la guerre, les actes de barbarie commis par les Russes ont été dénoncés, notamment par le président ukrainien, Volodymyr Zelensky. A peine deux mois après le début de l’invasion russe, en avril 2022, il parlait déjà «des centaines de cas de viols» dans les zones occupées par Moscou. Après le massacre de Boutcha en mars 2022, des emballages de préservatifs déchirés et un préservatif usagé sont retrouvés près de cadavres, décrit un article du New York Times. La première dame ukrainienne, Olena Zelenska, a annoncé en avril 2024 un dédommagement financier pour les femmes identifiées comme victimes d’agressions sexuelles ou de viols. Une mesure qu’elle qualifiait alors de «pas important vers le rétablissement de la justice».
Les souffrances endurées par les hommes restent pour le moment moins reconnues et sont rarement évoquées même en Ukraine. Comme le souligne le Guardian, alors que les images de soldats ukrainiens amputés sont devenues banales dans le pays, «il n’existe pas d’affiches ou d’articles de magazines décrivant les blessures largement cachées des violences sexuelles».
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