Zone à trafic limité dans l’hypercentre de Paris : «A terme, les gens vont utiliser d’autres modes de déplacement»

Zone à trafic limité dans l’hypercentre de Paris : «A terme, les gens vont utiliser d’autres modes de déplacement»

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Environnement

Le déploiement de la ZTL dans l’hypercentre parisien ce lundi 4 novembre n’a pas échappé aux critiques de l’opposition et des commerçants. Les craintes se portent sur la perte de clientèle, le report du trafic ou encore sur la mise en place de contrôles. La mairie et des experts se veulent rassurants.

C’est une petite révolution pour les automobilistes habitués à emprunter l’hypercentre de Paris. La zone à trafic limité (ZTL) entre en vigueur à partir de ce lundi dans les quatre premiers arrondissements de la capitale. 5,5 km² interdits aux véhicules motorisés de «transit», c’est-à-dire ceux qui passent simplement par là, sauf pour les véhicules de secours, autobus, taxis, personnes à mobilité réduite, automobilistes y résidant ou y travaillant. Le trafic «de destination» est également autorisé, à savoir ceux dont les points de départ et d’arrivée se trouvent dans le secteur, pour un rendez-vous médical, faire des courses, aller au cinéma… Ariel Weil, maire de Paris Centre (les Ier, IIe, IIIe et IVe arrondissements de Paris), espère voir une baisse de la circulation «de 10 à 15 %». Un dispositif, selon lui, «très efficace en combinaison avec les effets de la modification du plan de circulation pour Paris Centre» afin que cette zone ne soit plus un «raccourci».

Mais cette nouvelle mesure, qui a pour but de limiter la circulation très dense dans cette zone ainsi que la pollution sonore et de l’air, a été vivement critiquée par l’opposition municipale de droite. Dans un communiqué, le groupe Changer Paris, qui rassemble principalement des élus Républicains, fustige un dispositif à «l’impact écologique nul» et qui favorise «l’éviction des Parisiens au profit des touristes». «Le contrôle du respect de cette ZTL sera très mal assuré et suscitera de nouvelles contraintes bureaucratiques kafkaïennes pour les Parisiens», ajoutent-ils.

Une perte de clientèle pour les magasins ?

Certains commerçants craignent également un impact sur leur chiffre d’affaires. Le Figaro a interrogé plusieurs d’entre eux. «Ça va être une catastrophe. Ma clientèle se compose essentiellement de touristes mais le midi, j’ai beaucoup de travailleurs qui s’arrêtent normalement en voiture», explique le responsable d’une boulangerie. Un représentant des commerçants du quartier situé dans le IVe arrondissement est encore plus catégorique : «Si la municipalité veut tuer le commerce de proximité, elle ne peut pas mieux s’y prendre». «Le jeu de massacre des commerces originaux et atypiques qui contribuent à l’âme de Paris Centre se poursuit avec la ZTL idéologique», estime quant à lui sur X Aurélien Véron, élu au conseil de Paris et porte-parole du groupe Changer Paris.

Décryptage

Pourtant, à entendre des experts sur les questions de déplacements urbains, ces inquiétudes n’ont pas lieu d’être. Selon Lucile Ramackers, consultante en mobilité urbaine, «il y a eu pas mal d’études et de contre-exemples sur le trafic de transit : en réalité, les gens ne s’arrêtent pas quelque part par hasard. Et finalement, le trafic de transit représente surtout des nuisances pour l’activité et pour les riverains.» Une opinion partagée par Mathieu Chassignet, ingénieur spécialiste des mobilités durables, qui souligne qu’une récente étude de l’Atelier parisien d’urbanisme montre que seuls 3 % des clients qui se rendent dans Paris Centre le font en voiture. «Finalement avec moins de trafic de transit, cela va être plus agréable pour les piétons et pour les cyclistes qui vont venir plus souvent consommer dans cette zone», résume-t-il. Mathieu Chassignet ajoute que d’autres villes qui ont mis en place ce système «malgré une levée de boucliers au départ» des commerçants «se rendent compte qu’ils en bénéficient et ensuite, ils demandent que ce soit prolongé». Ariel Weil rappelle que la mairie a pris la décision de ne pas piétonniser l’hypercentre de Paris et que «les livraisons et les clients pourront toujours venir sur place. On a même été plus loin avec une dérogation totale pour les commerçants et les artisans», précise-t-il.

«Une baisse des nuisances sonores et des émissions» à Barcelone et à Londres

L’opposition craint aussi que le trafic dans les arrondissements voisins explose. «Les reports de circulation pourraient atteindre jusqu’à 40 % sur certains axes», affirme Changer Paris, déplaçant alors simplement la pollution et les nuisances dans les autres quartiers. Une conséquence que les spécialistes interrogés par Libération partagent, tout en la tempérant. «Cela peut être compliqué pendant quelque temps. Mais ensuite, les gens s’habituent et il y a un système d’évaporation du trafic. On constate qu’au bout d’un moment, il y a juste moins de déplacements de voiture. Pour les cas de Barcelone et de Londres, où ce dispositif a été mis en place à certains endroits, on constate une baisse à la fois des nuisances sonores et des émissions», explique Lucile Ramackers. Même constat pour Mathieu Chassignet : «Il y a forcément une petite augmentation du trafic. Mais ce seront sur des boulevards qui peuvent l’absorber. Et il ne faut pas oublier que dans ce genre de situation, une partie du trafic disparaît car les gens vont finalement se mettre à utiliser d’autres modes de déplacement.»

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Le contrôle des véhicules qui ignoreraient les règles pose également question. Jugés «flous» par l’opposition, la mairie souhaite dans un premier temps qu’ils soient effectués aléatoirement par des policiers municipaux avant de potentiellement mettre en place un système de contrôle automatique. «L’Italie est en avance à ce sujet. On peut suivre une plaque d’immatriculation et calculer que la voiture ne s’est pas arrêtée pour faire une course ou pour aller au restaurant. C’est assez facile quand on peut estimer le trajet qui a été parcouru et le temps», détaille Lucile Ramackers. Ariel Weil a beau être «très favorable» à la vidéoverbalisation grâce aux caméras de surveillance, le dispositif ne peut pas encore être mis en application, faute d’un cadre législatif qui le permette.

Libération

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