«Une grande victoire pour les Ouïghours» – Libération

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Droits humains

La répression des Ouïghours en Chinedossier

Après avoir nié durant des années les crimes contre l’humanité commis par la Chine et la probabilité extrêmement élevée de travail forcé, le constructeur automobile allemand a annoncé vendre son usine et sa piste d’essai au Turkestan oriental «pour des raisons économiques».

«Vous n’êtes pas au courant de l’internement d’un million de Ouïghours dans les camps chinois de rééducation, au Xinjiang, sous prétexte de lutte antiterroriste ?» «Non, je ne suis pas au courant», répondait avec aplomb Herbert Diess, alors patron de Volkswagen, à un journaliste de la BBC, en avril 2019. Il se disait même «absolument fier» d’exploiter une usine dans cette région de l’ouest de la Chine, appelée aussi Turkestan oriental, et dont les douze millions d’habitants musulmans étaient l’objet d’une campagne génocidaire menée par Pékin. Ce mercredi 27 novembre, plus de cinq ans plus tard, le premier constructeur automobile européen a annoncé cesser ses activités au Xinjiang «pour des raisons économiques», et vendre son usine d’Urumqi et la piste d’essais de Turpan à une entreprise chinoise de Shanghai. «Il s’agit d’une grande victoire pour les Ouïghours. Cette mesure était attendue depuis longtemps», réagit auprès de Libération le chercheur allemand Adrian Zenz, à l’origine des premières révélations.

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«Nous réclamions ce retrait depuis des années», renchérit l’ONG internationale Campaign for Uyghurs. L’annonce intervient alors que Volkswagen, talonné par la concurrence chinoise, voit s’ajouter au naufrage moral un naufrage financier, qui pourrait conduire à des milliers de licenciements et des fermetures d’usines en Allemagne. «Au lieu d’innover, Volkswagen a choisi le travail forcé et la soumission au Parti communiste chinois comme modèle d’entreprise. Résultat : des voitures chinoises moins chères qui écrasent [l’entreprise], des suppressions d’emplois massives en Allemagne et une réputation mondiale entachée en matière de droits de l’homme», estime, sur X, la défenseuse des droits humains Yaqiu Wang. Lors de l’interview lunaire de Herbert Diess à la BBC, Volkswagen employait 700 ouvriers locaux et fabriquait 50 000 voitures par an en partenariat avec l’entreprise chinoise SAIP, alors que des médias, notamment Libération, dénonçaient depuis des mois la répression et l’emprisonnement de pans entiers de la population du Xinjiang.

Audit douteux et politique assimilationniste

En mai 2022, trois mois après que l’Assemblée nationale française avait reconnu le génocide commis contre le peuple ouïghour, Herbert Diess répétait qu’il «ne prévoyait pas de suspendre les activités» de Volkswagen dans la région, et assurait au journal allemand Handelsblatt «que la présence de Volkswagen conduit à une amélioration de la situation pour les gens». Quelques semaines plus tard, le rapporteur spécial des Nations unies, Tomoya Obokata, affirmait que l’Etat chinois organisait au Xinjiang du travail forcé à grande échelle, voire de la réduction en esclavage. Puis, le 31 août 2022, Michelle Bachelet, haute-commissaire aux droits de l’homme aux Nations unies, reconnaissait «de graves violations des droits humains» à l’encontre des Ouïghours, des violences sexuelles, des «pratiques de torture ou de mauvais traitements, notamment de traitements médicaux forcés et de mauvaises conditions de détention», soit des «crimes internationaux, en particulier des crimes contre l’humanité». Le lendemain, un nouveau PDG, Oliver Blume, par ailleurs toujours président du directoire de Porsche, prenait la tête de Volkswagen, et maintenait sans sourciller la production dans la région.

Depuis qu’en février le géant allemand de la chimie BASF a décidé, enfin, de plier bagage, à la suite d’une enquête mettant au jour «de graves allégations faisant état d’activités incompatibles avec les valeurs de BASF», la pression a continué à monter sur Volkswagen. Depuis le mois de septembre, le constructeur automobile allemand était sous le feu des critiques après avoir tenté de prouver l’absence de travail forcé parmi les quelque 200 employés locaux encore présents, en faisant réaliser par un cabinet d’avocats douteux un audit empli de lacunes méthodologiques, une manœuvre que le journal Der Spiegel avait qualifiée de «bluff de Volkswagen sur les droits humains». En octobre, après des révélations sur la politique assimilationniste appliquée au sein de l’usine contre les ouvriers locaux, 19 députés de l’Alliance interparlementaire sur la Chine, dont les Français Bernard Guetta et Raphaël Glucksmann, avaient envoyé une lettre ouverte à Oliver Blume pour demander la transparence sur son management et son retrait urgent du Turkestan oriental, l’accusant de «complicité morale». «Malheureusement, il aura fallu la pression de l’opinion publique pour que la décision soit enfin prise, et la mise en évidence de l’ampleur de l’imposture de l’audit», déplore Adrian Zenz. Et que les bénéfices ne soient plus au rendez-vous.

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