Le baptême de Violette Dorange dans les mers du Sud et les aléas de la navigation en solitaire n’affectent en rien ses bonnes manières.
Ponctuelle d’habitude, la skippeuse de 23 ans, qui a 45 minutes de retard pour son rendez-vous téléphonique hebdomadaire avec Le Monde, se confond en excuses.
« J’étais en train de scier un bout de rail [pièce d’accastillage] que je collerai dès que les conditions seront plus calmes, et j’ai oublié l’heure », explique-t-elle.
Dans son espace de vie grand comme une chambre de bonne, la benjamine de la 10e édition du Vendée Globe a dû sortir la boîte à outils pour pallier les menues casses occasionnées par sa toute première rencontre avec une coriace dépression australe.
Vendredi 6 décembre, dans une mer désordonnée et des courants agités, elle a doublé le cap de Bonne-Espérance (Afrique du Sud) suivi, 75 milles (120 km) plus à l’est, du cap des Aiguilles, qui marque l’entrée dans l’océan Indien.
Partis le 10 novembre des Sables-d’Olonne (Vendée) pour sa première course autour du monde en solitaire, sans escale et sans assistance, Violette Dorange et DeVenir, son monocoque de 18 mètres, naviguent dans la traîne d’une tempête qui a « fait un peu peur » à la jeune femme.
Des phénomènes « plus soudains et plus violents »
Au passage de Bonne-Espérance, elle a décacheté une enveloppe glissée avant le départ par sa maman, Carole, vétérinaire de campagne en Charente-Maritime, dans un sac étanche : « Passer le cap de Bonne-Espérance, c’est affronter les tempêtes pour découvrir des horizons nouveaux. Chaque vague est un défi, chaque vent, une promesse : celle de revenir plus fort, plus sage et toujours plus libre. » Des mots désormais épinglés au-dessus de la table à cartes de l’insatiable skippeuse.
« Ça y est ! Je fais des routages qui m’emmènent maintenant jusqu’en Australie ! C’est dingue ! », jubile cette boulimique de grand large.
Pour l’heure, elle trouve le surnom de « pays de l’ombre » dont on affuble couramment l’austère zone qu’elle traverse un tantinet exagéré. « Entre les dépressions, il fait quand même beau », constate celle qui s’attendait « à ne plus voir le soleil pendant un mois ». Elle concède naviguer en salopette, bottes et bonnet. Et elle vient d’offrir à sa chevelure de sirène un « dernier petit shampooing dans de l’eau à peu près tempérée » avant longtemps.
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