:quality(70)/cloudfront-eu-central-1.images.arcpublishing.com/liberation/NOHC5YK32JDQ3OY3LQE347EKEU.jpg)
Victoire du droit
Un tribunal de Rome a estimé ce vendredi 18 octobre que la rétention de douze hommes envoyés par l’Italie en Albanie ne remplit pas les conditions prévues par leur accord, concernant la «sûreté» de leur pays d’origine. Ils vont être rapatriés en Italie, après une décision saluée par les ONG de défense des droits de l’homme.
Le gouvernement italien enfreint son propre accord. Les juges de la section immigration du tribunal de Rome ont invalidé, ce vendredi 18 octobre, la rétention dans des centres albanais de douze demandeurs d’asile, qui faisaient partie du premier transfert par bateau opéré cette semaine. Ces hommes doivent immédiatement être rapatriés en Italie.
Le tribunal a estimé que les migrants concernés, originaires d’Egypte et du Bangladesh, ne remplissaient pas l’un des critères de transfert vers l’Albanie, prévus par l’accord signé en novembre 2023 entre l’Italie et le pays balkanique. Ce critère, c’est celui des pays «sûrs».
Selon les termes de cet accord, qui prévoit la création de deux centres en Albanie dédiés à la demande d’asile, les migrants doivent être originaires d’un pays «sûr» afin d’être rapidement renvoyés si le statut de réfugié ne leur était pas accordé. L’Italie, qui souhaite envoyer un maximum de migrants dans ces centres, a ainsi comptabilisé 22 pays dans sa liste. Or, un arrêt de la Cour de justice européenne, rendu le 4 octobre, affirme que pour qu’un pays soit considéré comme étant sûr (aucune persécution, discrimination ni torture), il devait l’être sur l’ensemble de son territoire et pour chaque individu.
L’Egypte et le Bangladesh ne répondant pas à ces critères, ils ne peuvent être considérés par l’Italie comme «sûrs». De fait, la liste se réduit à seulement 7 pays : le Cap-Vert, la Serbie, le Monténégro, la Macédoine du Nord, le Kosovo, la Bosnie et même… l’Albanie.
«Nous lisons les lois»
D’après le journal national italien La Repubblica, les douze migrants repartiront dès samedi matin de l’Albanie pour être rapatriés à Bari, dans les Pouilles italiennes. S’ils étaient seize à leur arrivée sur le sol albanais mercredi, quatre d’entre eux avaient immédiatement été ramenés en Italie, deux affirmant être mineurs et deux autres ayant besoin de soins médicaux. Leur transfert vers l’Albanie aura coûté 250 000 euros, selon le quotidien. Et les centres albanais, opérationnels depuis le 13 octobre avec une capacité d’accueil de 1 000 places, seront donc à nouveau vides.
Ce retournement de situation a été salué par l’ONG Sea-Watch Italy, qui participe au sauvetage des migrants en mer Méditerranée. «Le spectacle médiatique organisé par le gouvernement Meloni se heurte au droit national et international», s’est félicité l’association sur X. «Nous l’avions dit, non pas parce qu’on a la boule de cristal mais parce que nous lisons les lois», a également réagi Elly Schlein, la patronne du principal parti d’opposition, le Parti démocrate (PD, centre-gauche).
A lire aussi
De son côté, le parti de Giorgia Meloni, Fratelli d’Italia, n’apprécie guère la décision «absurde» rendue par le tribunal de Rome, fustigeant des «magistrats politisés». «Impossible de rapatrier qui entre illégalement, interdit de rapatrier les clandestins. Ils voudraient abolir les frontières de l’Italie, nous ne le permettrons pas», a ajouté le parti d’extrême droite. Le parti anti-immigration du vice-chef du gouvernement Matteo Salvini, Lega, a de son côté dénoncé une décision «inacceptable et grave» et s’en est pris aux magistrats «pro-immigrants», les invitant à «se présenter aux élections».
L’accord entre Rome et Tirana, d’une durée de cinq ans, concerne les hommes adultes interceptés par la marine ou les garde-côtes italiens dans leur zone de recherche et de sauvetage dans les eaux internationales. La procédure prévoit un premier contrôle sur un navire militaire, avant un transfert dans un centre du nord de l’Albanie, au port de Shengjin, pour une identification, puis vers un second centre, sur une ancienne base militaire à Gjader. Le coût pour l’Italie est estimé à 160 millions d’euros par an.
Leave a Comment