Passoires thermiques et précarité énergétique : comment lutter ? Par Cécile Duflot

Passoires thermiques et précarité énergétique : comment lutter ? Par Cécile Duflot

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Pour Cécile Duflot, ancienne ministre du Logement et directrice générale d’Oxfam France, la rénovation énergétique de l’habitat doit s’imposer comme une priorité politique afin de réduire les inégalités mais aussi de créer des emplois.

La précarité énergétique est une problématique centrale des discussions autour des inégalités face au logement car il s’agit, d’une part, d’un enjeu de santé publique et de pouvoir d’achat pour les citoyens, mais aussi d’un axe de progression énorme afin de réduire les inégalités financières, sociales et environnementales en France. Afin d’accélérer ce processus, la création d’un service public de la rénovation thermique serait une solution.

Précarité énergétique : une inégalité sociale de plus

Sur les 30 millions de résidences principales que compte le pays au 1er janvier 2022, environ 5,2 millions de logements (soit 17 % du parc de résidences principales) sont des passoires énergétiques (classées F ou G au diagnostic de performance énergétique, le DPE). Leurs points communs : ils sont dans des vieux bâtiments, pour la moitié d’entre eux construits avant 1975, date des premières réglementations thermiques.

Conséquence : ces logements très mal isolés sont difficiles à réchauffer l’hiver et à refroidir l’été. En outre, leurs habitants souffrent de plusieurs difficultés qui caractérisent leur précarité énergétique. Parmi les plus touchés, environ 60 % des locataires sont en précarité énergétique. Les jeunes (entre 18 et 34 ans) et les propriétaires occupants sont de leur côté entre 30 % et 35 % à subir cette précarité. Sans surprise, les ménages en plus grandes difficultés, tels que les familles monoparentales (principalement des femmes), les jeunes, les chômeurs et les personnes en situation de handicap, sont, eux aussi, parmi les plus touchés.

La rénovation thermique des bâtiments, un pari gagnant-gagnant-gagnant

Pour les citoyens, la rénovation signifie plus de confort, plus de santé et moins de facture. Des températures intérieures basses occasionnent un taux plus important d’humidité et l’apparition de moisissures dans les pièces à vivre qui ont pour conséquence le développement de l’asthme, notamment chez les enfants, les réactions allergiques (maux de gorge, conjonctivites, rhinites allergiques) ou les effets respiratoires (infections ou difficultés respiratoires, toux, bronchites), en particulier chez les personnes âgées. Le collectif Rénovons estime qu’il est possible d’économiser 10,8 milliards d’euros sur la facture énergétique des ménages, soit 1 100 euros en moyenne par ménage et par an.

Du côté des pouvoirs publics, c’est l’assurance de la création de milliers d’emplois qualifiés, bien rémunérés, non délocalisables et qui ont un sens. Ouvriers du bâtiment, chefs de chantier, architectes : le ministère du Travail estime qu’il faudra créer 170 000 à 250 000 emplois supplémentaires d’ici 2030 dans la rénovation énergétique des bâtiments.

Enfin, pour la santé et l’environnement, si la France s’engage dans la rénovation performante et généralisée, cela entraînerait une baisse des dépenses de santé et des émissions de gaz à effet de serre. En effet, la généralisation de la rénovation permettrait d’économiser 700 millions d’euros par an pour le système de soins, dont 614 millions d’euros pour la Sécurité sociale. Dans l’Hexagone, le bâtiment est le deuxième secteur le plus émetteur de gaz à effet de serre. Il représente à lui seul 27 % des émissions de CO2 et près de 45 % de la consommation d’énergie.

Qu’attendons-nous ?

Pourtant, la rénovation thermique des bâtiments est aujourd’hui à la traîne. Baisse du budget de MaPrimRenov’, retour au mono-geste (c’est-à-dire le fait de ne réaliser qu’un seul travail de rénovation par opération, ce qui est moins, voire pas du tout efficace) : les pouvoirs publics semblent naviguer à vue et ne pas donner de signaux clairs à un secteur, le BTP, qui a besoin de stabilité pour recruter. Aujourd’hui, le traitement technique et minimaliste de la réponse gouvernementale masque l’absence de prise en compte du problème essentiel des inégalités dans la question du logement. Face à cette incertitude, la création d’un service public de la rénovation serait une solution durable et permettrait le développement de filières d’excellence françaises. Une certitude : il est nécessaire d’intégrer la dimension écologique et sociale dans les politiques du logement et de l’accession à la propriété.

Libération

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