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L’édito d’Alexandra Schwartzbrod
Depuis la chute de Bachar al-Assad, dimanche 8 décembre, les Syriens déambulent dans les lieux de pouvoir du régime et découvrent la face cachée de Damas. Notre envoyé spécial est entré dans la funeste prison de Sednaya, où des dizaines de milliers d’habitants ont été torturés et tués.
Les Syriens osent aujourd’hui porter leur regard là où, cinquante ans durant, ils n’ont même pas tenté de le faire par crainte d’être instantanément foudroyés. C’est ce qu’a confié lundi à Libération un retraité de 69 ans qui n’a jamais quitté la banlieue de Damas et qui n’en revenait pas de pouvoir déambuler dans les bureaux désertés des terribles moukhabarat, ces services de renseignement syriens qui ont fait trembler de peur plusieurs générations. Et il n’est pas le seul. Depuis dimanche, notre envoyé spécial à Damas, Arthur Sarradin, sillonne les rues et les lieux de pouvoir de la capitale au côté de milliers d’autres qui, sidérés, découvrent la face cachée de la ville qui est la leur. Et notamment les centres de détention d’où émergent des hommes cadavériques et hagards, croyant vivre encore sous le joug de Hafez al-Assad.
La prison la plus terrible ne se trouve pas à Damas mais à une trentaine de kilomètres de là, à Sednaya. Ce n’est même pas une prison, plutôt un abattoir où des dizaines de milliers d’hommes et de femmes ont été exécutés dans des souffrances atroces, certains y auraient été emmurés vivants, le bâtiment comptant plusieurs étages sous terre. Libération s’en était longuement fait l’écho en 2017 quand Amnesty International avait tiré la sonnette d’alarme, publiant de nombreux témoignages accablants de détenus libérés, d’anciens gardiens ou d’anciens juges. Un rapport qui n’a malheureusement eu aucun impact sur la communauté internationale. N’ayons pas peur des mots : le sadisme et la cruauté avec lesquels les hommes de Bachar torturaient ceux qui passaient entre leurs mains rappellent par leur ampleur et leur côté systémique les méthodes employées par les nazis. Et l’on ne sait pas encore tout. Notre envoyé spécial a pu pénétrer lundi au cœur de cette maison de l’horreur où, des décennies durant, la dynastie Assad s’est livrée en toute quiétude à des crimes contre l’humanité.
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