«Sous un ciel crépitant d’étoiles, je m’allonge et je sens le long de mon dos une poussée : je suis en train de tomber vers le ciel», par Nicolas Bourgeois

Pour le géographe, qui a participé à la création de la première réserve de ciel étoilé d’Europe, au pic du Midi (Hautes-Pyrénées), la lutte contre la pollution lumineuse est en train de gagner la bataille des idées. Une bonne nouvelle pour tous ceux qui aiment admirer les étoiles et peuvent désormais ressentir physiquement, intimement, leur lien avec les astres.

Chaque nuit passée sur le sommet du pic du Midi de Bigorre, dans les Pyrénées, est l’occasion pour moi de faire un point sur l’état de la lutte contre la pollution lumineuse. Appuyé au garde-corps de l’observatoire, à presque 3 000 mètres d’altitude, je balade mon regard vers le nord, sur les plaines et vallons de l’Occitanie. J’ai devant les yeux une vue qu’on peut avoir depuis un avion en vol de nuit. A la différence près que je ne suis pas derrière un hublot. Je suis au grand air et reçois dans toute son intensité le paysage nocturne qui s’étend sous mes pieds. J’ai le sentiment d’observer la Terre comme un astronaute. Je vois les villes, minuscules vues d’ici, leur myriade de lampadaires qui composent une grande maille scintillante posée sur le noir de la nuit. Certains appellent cette maille la «constellation Terre», une géographie nocturne où les espaces de lumière et d’obscurité s’affrontent.

Depuis le début du XXe siècle, les progrès techniques en matière d’éclairage artificiel ont offert à cet affrontement une très nette victoire de la lumière sur l’obscurité. Actuellement, 90% du ciel nocturne européen est touché. Dans la dernière décennie, la brillance du ciel du fait de l’éclairage artificiel a augmenté à un rythme de 10% par an au niveau mondial, soit un doublement en moins de huit ans. Ce phénomène à l’œuvre depuis près d’un siècle