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Le patron de la première chaîne de salons de beauté française est de très mauvais poil. Jean-Christophe David (fils du coiffeur Jean-Louis David) est en guerre contre l’influenceuse TikTok, Laurène Lévy, après que celle-ci a posté sur la plateforme, en octobre 2022, une vidéo humoristique, caricaturant une séance d’épilation chez Body Minute. La parodie, classique sur les réseaux sociaux pour critiquer une enseigne, a déclenché les foudres du dirigeant. Il a tout tenté pour effacer la vidéo, jusqu’à assigner son autrice au tribunal de commerce de Paris pour «dénigrement». L’audience est prévue ce jeudi 16 janvier.
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Au départ, la vidéo compte seulement quelques dizaines de milliers de vues. Elle figure cependant en haut dans les moteurs de recherche, à cause du hashtag #bodyminute. Le fondateur de l’enseigne le découvre, sans pouvoir l’empêcher, un principe clé des réseaux sociaux. Deux ans plus tard, il ne décolère pas : «On n’est pas maître de son hashtag, il est jeté à la vindicte publique !», explique-t-il à nos confrères de l’AFP.
Quand d’autres marques optent pour l’humour ou la discrétion, lui contre-attaque tous azimuts pour, plaide-t-il, défendre les 2 200 jeunes esthéticiennes de ses 450 salons franchisés. Contre-vidéos, courriers à l’employeur, huissiers, campagne hostile… Jean-Christophe David multiple les canaux pour faire supprimer le contenu de Laurène Lévy, et créé la polémique.
Prime à la liberté d’expression
Dans d’autres posts sur TikTok, Laurène Lévy raconte publiquement ces tentatives : «Ils ont ensuite envoyé des huissiers dans mon entreprise pour fouiller les ordinateurs afin de prouver que mon employeur m’avait demandé de dénigrer Body Minute pour le compte d’un concurrent. Sauf que c’était faux !». Elle reçoit le soutien d’internautes scandalisés, qui fustigent une tentative de museler la parole sur les réseaux sociaux. Sa vidéo originale devient virale.
De son côté, le patron de Body Minute demande en vain à TikTok de bloquer la vidéo. «Les agences spécialisées TikTok m’ont toutes appelé – j’en ai pris trois en deux ans – et m’ont dit “vous allez voir, on va la faire baisser”. Ça m’a coûté 300 000 balles !», explique-t-il. TikTok lui propose une vidéo sponsorisée, visible en tête des recherches : «60 000 balles !». TikTok n’a pas souhaité s’exprimer auprès de l’AFP.
Le patron encourage également ses employées à faire pression sur l’influenceuse, surnommée dans un courrier interne «Laurène La Haine». Deux esthéticiennes préviennent Laurène Lévy, qui dénonce publiquement cette manœuvre. Jean-Christophe David multiplie alors les vidéos de promotion, l’une accusant même l’influenceuse de faux commentaires.
En décembre dernier, Body Minute assigne finalement Laurène Lévy pour «dénigrement» – notion qui vise en principe des concurrents – et l’accuse d’en tirer profit en gagnant des abonnés (339 000 aujourd’hui). Un pari car la jurisprudence privilégie la liberté d’expression, soulignent des avocats spécialisés. «Le principe constitutionnel de liberté d’expression autorise et même promeut le droit de critique, notamment le droit à l’humour. Même si ce n’est pas un blanc-seing», confirme auprès de l’AFP Me Basile Ader, du cabinet August Debouzy, sans se prononcer sur l’affaire.
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