Résolution pour la libération de Boualem Sansal : les votes de Rima Hassan et Manon Aubry qualifiés de «honte» à gauche comme à droite

Les réactions outrées n’ont pas manqué de déferler. «Honte», «scandale», «infamie»… Le vote de plusieurs eurodéputés LFI sur la résolution du Parlement européen demandant la libération de l’écrivain Boualem Sansal, incarcéré depuis la mi-novembre en Algérie, a suscité un tollé ce vendredi 24 janvier, à gauche comme à droite.

Les députés européens ont voté jeudi à une écrasante majorité (533 voix pour, 24 contre et 48 abstentions) une résolution pour demander la libération de l’écrivain franco-algérien ainsi que d’autres critiques du pouvoir algérien. La délégation de La France insoumise s’est partagée entre quatre votes contre et deux abstentions. Rima Hassan a ainsi voté contre, tandis que Manon Aubry s’est abstenue.

Une «honte» pour la gauche

Mais c’est surtout le vote de la franco-palestinienne qui a retenu l’attention des concurrents ou adversaires politiques de LFI. «C’est une honte ! Franchement, s’abstenir ou voter contre un tel texte factuel où il n’y a rien d’idéologique, rien d’historique qui soit contestable, c’est simplement cautionner l’emprisonnement d’un immense écrivain dans des geôles et c’est profondément scandaleux», a déclaré sur BFMTV le responsable de Place publique Raphaël Glucksmann, qui siège au Parlement européen avec les socialistes.

L’ancien insoumis François Ruffin, lui, s’est dit en «désaccord complet» avec le vote de ses anciens camarades. «La place d’un écrivain n’est pas en prison, qu’on soit d’accord ou pas avec ce qu’il écrit. Evidemment qu’il faut tout faire pour la libération d’un écrivain», a-t-il réagi sur France Inter.

A droite aussi, ce vote a provoqué un tollé. «Vous vous rendez compte que cette résolution demandait la libération immédiate d’un homme malade, d’un homme âgé. Et madame Rima Hassan dit “non, je refuse, je vote contre”. C’est inhumain, c’est politiquement scandaleux. Et je demande d’ailleurs à LFI de se justifier», a fustigé le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau sur Europe1 /CNews.

Valérie Pécresse, elle a qualifié le vote de Rima Hassan d’«infamie». «Elle préfère défiler en soutien à des terroristes que de se tenir aux côtés de notre compatriote arbitrairement retenu dans les geôles algériennes», a-t-elle écrit sur le réseau social Bluesky.

«Toute honte bue»

Même son de cloche un peu plus au centre. «En deux jours, Rima Hassan affirme que si Boualem Sansal est en prison ou si les otages israéliens sont retenus par le Hamas, au fond, ils ne l’ont pas volé, se lâche l’eurodéputée Horizons Nathalie Loiseau. Un peu comme une femme violée dont la jupe était trop courte. Elle siège en commission des droits de l’homme. Toute honte bue.» Pour Naïma Moutchou, députée Horizons, «Rima Hassan s’illustre une fois de plus par son alignement flagrant sur des intérêts étrangers. Les droits humains qu’elle brandit à tout-va peuvent attendre. Ce qui l’anime est clair : tout sauf la France.»

Enfin, sans surprise, les résultats du vote ont fait bondir l’extrême droite. «Je suis ulcérée de voir que Manon Aubry et Rima Hassan refusent de voter au Parlement européen notre résolution pour demander la libération de Boualem Sansal. Ça s’appelle de l’intelligence avec l’ennemi», a cinglé l’eurodéputée Marion Maréchal, à l’initiative de cette résolution.

«Les choses sont claires : à la défense d’un écrivain et de sa liberté d’expression, l’extrême gauche préfère l’arbitraire d’un régime autoritaire et les intérêts communautaires de sa clientèle électorale», a également estimé Jordan Bardella, le président du Rassemblement national.

Soutien de la France insoumise

Les troupes insoumises, elles, ont tenu à serrer les rangs face au déferlement des réactions outrées. «La focalisation exclusive sur le vote de l’eurodéputée Rima Hassan alors que d’autres députés européens ont procédé au même vote ou se sont abstenus en dit long sur leur idéologie raciste», a critiqué le député et coordinateur de LFI Manuel Bompard face au tollé.

Disant de Rima Hassan qu’elle est une «franco-palestinienne au courage admirable», il estime que la France insoumise a, à de multiples reprises, pris position pour demander la libération de Boualem Sansal. «On peut contester vivement les propos (c’est mon cas) tout en considérant que sa place n’est pas en prison», a-t-il affirmé sur X. Toutefois, il juge ces votes d’urgence au Parlement «d’une hypocrisie totale» qui n’ont «aucun effet concret».

La principale intéressée s’est défendue en affirmant notamment «s’opposer à l’instrumentalisation qui est faite» du cas de Boualem Sansal par la droite et l’extrême droite dans les relations déjà houleuses entre la France et son ancienne colonie. Bruno Retailleau a d’ailleurs admis que Boualem Sansal était «sans doute l’otage de cette relation tendue entre les deux pays» et a demandé «au régime algérien un geste humanitaire».

Selon le Monde, le pouvoir algérien aurait mal pris des déclarations de Boualem Sansal au média français Frontières (anciennement Livre noir, tenu par le zemmouriste Erik Tegnér, reprenant la position du Maroc selon laquelle le territoire du pays aurait été tronqué sous la colonisation française au profit de l’Algérie.

Libération