«L’accusation d’angélisme est une vieille lune» : contre le narcotrafic, cette gauche qui prend le train de la répression

«L’accusation d’angélisme est une vieille lune» : contre le narcotrafic, cette gauche qui prend le train de la répression

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Jérôme Durain, tout bosseur qu’il est, n’est pas le sénateur socialiste le plus connu. Mais ce lundi 27 janvier, le parlementaire de Saône-et-Loire tient sa première une de quotidien national. Sous le titre «L’union sacrée», voilà le quinquagénaire en grand sur la couverture du Parisien, aux côtés de trois hommes de droite : le sénateur LR Etienne Blanc et les ministres de l’Intérieur et de la Justice, Bruno Retailleau et Gérald Darmanin. Un drôle d’attelage réuni au Palais du Luxembourg, le 22 janvier, pour discuter de la proposition de loi transpartisane visant à «sortir la France du piège du narcotrafic», dont l’examen débute ce mardi 28 janvier au Sénat. L’occasion pour Durain de montrer que, malgré les accusations récurrentes de laxisme, son parti et plus largement la gauche n’hésite pas à s’engager pour lutter contre ce fléau. Et donc pour les questions de sécurité.

Les caricatures collent néanmoins toujours aux partis de gauche. Ces derniers, selon la droite, l’extrême droite et une partie du paysage médiatique, refuseraient d’aborder les thématiques liées au trafic de drogue ou de sécurité et chercheraient toujours des excuses aux personnes coupables de crimes et délits. «L’accusation d’angélisme est une vieille lune», note le député PS d’Indre-et-Loire Laurent Baumel. Pour ce proche d’Olivier Faure, le Parti socialiste a pourtant commencé à prendre le problème du narcotrafic à bras-le-corps au début des années 2000, sous Lionel Jospin. Depuis, de nombreux élus locaux, confrontés à la réalité du terrain, ne parlent plus seulement de prévention ou d’accompagnement, mais bien de répression.

«On découvre une réalité qu’on ne connaissait pas»

«On a notre place dans un dispositif répressif qui lutte contre des organisations criminelles qui s’en prennent aux plus fragiles», insiste ainsi le sénateur Jérôme Durain dans un entretien auprès de Libération. «Aujourd’hui, il faut une mobilisation parce que le narcotrafic est une réalité qui déstabilise la cohésion de la société et la vie dans nos villes», plaidait aussi lundi matin sur France Inter le maire de Montpellier, Michaël Delafosse. «C’est un sujet sur lequel travaille beaucoup Johanna Rolland», affirme encore l’entourage de la maire socialiste de Nantes, en rappelant qu’en 2023, elle était à l’initiative d’une tribune dans le Monde, signée par de nombreux élus locaux, demandant la création «d’un véritable plan national et européen contre le trafic de drogue».

Le secrétaire national du Parti communiste français, Fabien Roussel, aime aussi parler de ces sujets associés habituellement à la droite. «Je suis l’un des rares, à gauche, à prendre le sujet du trafic de drogue à bras-le-corps», estimait-il le 22 janvier dans une interview à la Dépêche du midi. Quelques jours plus tôt, l’ancien député avait rencontré Bruno Retailleau pour échanger sur le sujet. L’occasion de demander au locataire de la Place Beauvau «une police judiciaire plus fournie avec des moyens d’enquête, de surveillance, d’écoute, de contrôle des comptes en banque», comme il l’expliquait au quotidien régional. Le 26 novembre, Roussel s’était par ailleurs rendu à Echirolles, en Isère, pour soutenir la maire PCF Amandine Demore, qui réclame un commissariat pour lutter contre les trafics.

Arrivés à la tête de grandes villes lors des municipales de 2020, les écologistes ont, à leur tour, étaient confrontés directement au problème. C’est ainsi que le 1er novembre, la maire de Poitiers (Vienne), Léonore Moncond’huy, s’est retrouvée en duplex sur BFM TV, après une fusillade dans un quartier de sa ville, pour souligner que «le narcotrafic est de plus en plus présent» sur le territoire français. «Quand on a la main dedans, on découvre une réalité qu’on ne connaissait pas et on cherche des solutions, parce que l’impact du trafic est énorme», reconnaît l’adjoint à la médiation, la sécurité et à la tranquillité publique de la ville poitevine, Amir Mistrih.

«On doit aller les chercher, les mettre en prison»

Parfois, ces prises de conscience entraînent de vrais revirements, comme à Bordeaux où le maire, Pierre Hurmic, a annoncé en novembre armer les policiers municipaux de la cité girondine après s’y être toujours opposé. Chez les verts, la «répression» n’est plus forcément un gros mot. «Bien entendu que la répression doit être mise en place. Les narcotrafiquants doivent être sanctionnés, on doit aller les chercher, les mettre en prison. Mais ça doit se faire dans une solution globale», abonde le sénateur écolo des Bouches-du-Rhône Guy Benarroche, chef de file de son groupe pour le texte sur la lutte contre le narcotrafic. Le groupe des Ecologistes plaide également pour la dépénalisation de l’usage des drogues. Comme, d’ailleurs, le sénateur socialiste Jérôme Durain, qui y voit un indispensable chantier à ouvrir, en complément du texte transpartisan qu’il soutient à la chambre haute.

Cette mesure est aussi proposée par la France insoumise. En novembre, le groupe parlementaire du mouvement mélenchoniste a rendu public un «plan de lutte» comprenant 14 propositions pour esquisser «une approche globale de la criminalité organisée». Car ne parler que de narcotrafic, disent-ils, «revient à méconnaître l’architecture globale de la criminalité organisée et en particulier du phénomène mafieux». Dans leur document de 30 pages, les insoumis reprochent à Bruno Retailleau d’«invisibiliser une partie du problème posé par la criminalité organisée et [de faire] fait le jeu de l’engrenage de la violence en érigeant la seule réponse répressive comme efficiente». «L’escalade répressive prônée par les irresponsables politiques du gouvernement et de l’extrême droite est non seulement inefficace, mais elle est aussi dangereuse pour les citoyennes et citoyens», insistent-ils. Outre la légalisation du cannabis, ils proposent, entre autres, de «taper au portefeuille les trafiquants» en renforçant les moyens alloués aux services douaniers, en particulier dans les zones portuaires ou en redéployant les services publics. En résumé «un changement total d’approche».

Libération

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