«La Maison et le Monde» (1984), magistral Bengale

«La Maison et le Monde» (1984), magistral Bengale

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Il y a des premiers films qui semblent contenir toute l’œuvre à venir. Il y a aussi ceux de la maturité dont l’éclairage tardif vient confirmer ce qu’on a toujours su d’un cinéaste – cela s’appelle recréer a posteriori la généalogie d’un regard. Et puis il y a les films qui rusent avec la chronologie. Les derniers dont on découvre qu’ils furent les premiers ou qui auraient dû l’être. La Maison et le Monde (1984) de Satyajit Ray, immense cinéaste bengali qui n’a jamais cessé de nous éblouir, est de ceux-là. Adapté d’un roman du poète Rabindranath Tagore (Ghare Baire, publié en 1916), ce 25e long métrage, son testament spirituel dirait-on, tant il atteint des sommets de somptuosité formelle et s’offre comme un concentré raffiné de tous les grands motifs rayiens – la dialectique entre le dedans et le dehors, l’enfermement et l’émancipation des femmes, la petite et la grande histoire mêlées –, est en réalité le premier de ses projets de cinéma, l’étincelle d’où le feu partira. Dès 1948, Ray, qui n’était pas encore cinéaste, avait voulu porter à l’écran ce récit à trois voix, séduit par son rythme pendulaire, ses volutes polyphoniques, où sur fond de lutte nationaliste se noue un triangle amoureux, pris dans le tumulte de

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