COP30 : une minorité de pays signataires de l’accord de Paris ont rendu leurs feuilles de route climatiques

COP30 : une minorité de pays signataires de l’accord de Paris ont rendu leurs feuilles de route climatiques

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Fâcheux auspices pour la COP30. Attendus l’automne prochaine à Belém, au Brésil, pour la prochaine conférence mondiale sur le climat, les Etats étaient appelés à préparer ce rendez-vous en soumettant aux Nations unies leurs nouvelles feuilles de route climatique, au plus tard, le lundi 10 février. La date limite est désormais passée et le compte n’y est pas du tout. Selon les documents publiés sur le site de l’ONU, douze pays sur les presque 200 parties – soit 6 % des nations soumises à l’accord de Paris –, ont fourni dans les temps leurs «contributions déterminées au niveau national» («NDC» en anglais), nom utilisé dans le jargon de la diplomatie climatique pour parler des engagements de chaque Etat pour baisser les émissions de gaz à effet de serre. «Il est inquiétant de constater que les pays ne parviennent pas à répondre à l’urgence du moment, réagit Champa Patel, experte au sein de l’ONG Climate Group. Nous n’avons pas de temps à perdre.»

En vertu de l’accord de Paris de 2015, qui vise à limiter l’augmentation de la température mondiale «bien en dessous» de 2 °C par rapport aux niveaux préindustriels (1850-1900), chaque signataire doit soumettre tous les cinq ans une feuille de route plus ambitieuse que la précédente. En 2021 déjà, 70 Etats seulement avaient restitué leurs copies à l’heure. Cette fois-ci, les mauvais élèves sont encore bien plus nombreux et seuls les Emirats arabes unis (organisateur de la COP28), le Brésil (hôte de la future COP 30), les Etats-Unis (les équipes de Joe Biden s’en sont chargées avant que Donald Trump ne revienne au pouvoir), l’Uruguay, la Suisse, le Royaume-Uni, la Nouvelle-Zélande, Andorre, l’Equateur, Sainte-Lucie, Singapour et les Iles Marshall ont remis leurs documents. Ni l’Union européenne, ni la Chine, ni l’Inde ne l’ont fait. Ces derniers représentent pourtant 44 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre. Si l’on y ajoute les quatorze autres membres du G20 qui n’ont pas non plus respecté les délais (Russie, Indonésie, Japon…), ce chiffre passe à 63 %.

«La COP de Belém est fortement liée à la présentation des NDC», a insisté jeudi 6 février auprès de l’AFP le diplomate brésilien André Corrêa do Lago, président de la COP30 et secrétaire chargé du climat au sein du ministère des Affaires étrangères. Concrètement, les nouvelles contributions doivent se focaliser sur les efforts à fournir d’ici 2035. André Corrêa do Lago assure que le retard importe peu tant que les versions définitives sont «ambitieuses» – un prérequis indispensable pour espérer des avancées lors du futur sommet onusien. «La COP30 sera un moment très important dans la mécanique de l’accord de Paris, expose Lola Vallejo, conseillère climat à l’Institut du développement durable et des relations internationales (Iddri). Elle doit permettre à la fois de tirer le bilan des dix premières années et d’engager des mesures concrètes sur les principes acquis de haute lutte lors de la COP à Dubaï. A savoir la transition hors des énergies fossiles, le triplement de la production d’énergies renouvelables et le doublement de l’efficacité énergétique en 2030.»

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La tâche s’annonce ardue. Ces derniers temps, sur la scène internationale, le climat ne fait pas le poids face au contexte géopolitique grave et polarisant. Le come-back de Donald Trump, qui a signé dès son retour à la Maison Blanche un décret actant le début du processus de retrait des Etats-Unis de l’accord de Paris (la NDC concoctée par Joe Biden n’a plus qu’une portée symbolique), n’arrange rien. Le populiste et ultralibéral président argentin Javier Milei envisage de lui emboîter le pas, faisant planer le risque d’un effet cascade. «Si les Etats-Unis ne veulent pas respecter l’accord international, pourquoi un pays comme l’Indonésie devrait-il s’y conformer ?» interrogeait il y a dix jours l’envoyé spécial indonésien pour le changement climatique et l’énergie. Depuis, son gouvernement a rectifié le tir en réaffirmant son soutien à l’accord de Paris. Mais cette sortie illustre la place de plus en plus grande que prennent les discours contraires aux mesures nécessaires de décarbonation.

Le retard dans le rendu des feuilles de routes climatiques peut servir de moyen de pression diplomatique. En novembre dernier, lors de la COP29 en Azerbaïdjan, les Etats se sont quittés sur un accord prévoyant que les pays riches et industrialisés, historiquement responsables du réchauffement climatique, fournissent d’ici 2035 «au moins 300 milliards de dollars annuels» aux pays plus pauvres, pour la plupart en première ligne face aux évènements extrêmes. Une somme que ces derniers espèrent rehausser jusqu’à 1 300 milliards de dollars à Belém. «De nombreux pays comme l’Inde, l’Afrique du Sud, la Chine, accompagnés des pays les moins avancés, sont dans cette posture de dire ‘’nous n’avons pas eu les financements espérés durant la COP29, donc, soit le Nord promet de mettre plus de moyens sur la table au Brésil, soit on rendra les NDC tardivement et elles seront moins ambitieuses’’, analyse la responsable gouvernance international au sein du Réseau Action climat, Marine Pouget. C’est évidemment un peu moins caricatural dans la réalité, mais, sans financement digne de ce nom, beaucoup d’Etats ne pourront de toute façon pas mettre en place de mesures d’atténuation structurelles.»

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Selon le programme des Nations unies pour l’environnement, les NDC actuelles placent la planète sur une trajectoire de réchauffement de +3,1 °C d’ici la fin du siècle. La minorité de pays qui a mis à jour ses contributions ne semble pas avoir livré de copies en adéquation avec l’objectif du 2 °C. Une analyse du collectif scientifique Climate Action Tracker juge que seul le Royaume-Uni est sur la bonne voie. Et les retardataires ? «On attend beaucoup de la Chine et de l’Union européenne, développe Lola Vallejo. La Chine, qui se positionne comme leader des technologies vertes, semble vouloir prendre son temps face à la déflagration venue des Etats-Unis, et elle veut montrer que personne ne peut lui imposer un calendrier. Quant à l’Union Européenne, elle veut embarquer les 27 dans le même élan, convaincre chaque Etat membre que les objectifs climatiques sont tenables et souhaitables avant de les exposer aux yeux de tous, et par les temps qui courent, ce n’est pas une mission facile.» L’ONU a annoncé prolonger jusqu’à septembre la deadline pour la remise des feuilles de route climatiques.

Libération

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