L’armée russe contrôle plus de 18 % de l’Ukraine, au prix de pertes massives

Il est «irréaliste» d’envisager que l’Ukraine puisse retrouver ses frontières d’avant 2014. Le propos, émis le mercredi 12 février par le secrétaire d’Etat américain à la Défense, Pete Hegseth, est une négation frontale de l’objectif des autorités ukrainiennes, qui est précisément de récupérer les territoires annexés par la Russie en 2014 et ceux conquis depuis son invasion lancée le 24 février 2022. Soit, au total, un peu plus de 112 000 kilomètres carrés, ce qui représente 18,6 % de la superficie de l’Ukraine dans ses frontières reconnues par l’ONU, selon le site DeepState, qui scrute au jour le jour l’évolution des lignes de front. Des chiffres cohérents avec ceux compilés par l’Institute for the Study of War (ISW).

Ces pertes territoriales, massives, ont largement fluctué depuis février 2022. Lorsque la Russie lance son offensive, elle a déjà accaparé 7,3 % du territoire en annexant la Crimée et en contrôlant les républiques autoproclamées de Louhansk et Donetsk. Ses assauts, qui avaient pour objectif de prendre Kyiv en quelques jours et d’installer un gouvernement pro-Moscou, se traduisent par une avancée rapide de ses troupes, notamment au nord de la capitale.

En mars 2022, la Russie s’est emparée de plus de 20 % du territoire ukrainien. Ce sera son pic. L’armée ukrainienne, dépassée durant les premières semaines, se ressaisit. Kyiv ne tombe pas et, en avril, Moscou annonce stopper ses assauts dans le Nord et sur la capitale, pour se concentrer sur l’Est et la prise intégrale du Donbass. Mais le 29 août 2022, c’est l’armée ukrainienne qui lance une contre-offensive dans le Nord-Est puis dans le Sud, à Kherson. Elle reprend plusieurs milliers de kilomètres carrés. L’armée russe contrôle alors environ 18 % de l’Ukraine. Un niveau comparable à celui d’aujourd’hui.

Les lignes de front se sont désormais stabilisées. Elles dessinent une guerre de positions et de tranchées qui courent de l’est de Kharkiv, à proximité de la frontière russe, descendent dans le Donbass jusqu’aux régions de Kherson et Mykolaïv, dans le sud-ouest de l’Ukraine. Les combats sont acharnés, surtout dans la région de Donetsk. L’armée russe peut lancer plusieurs vagues d’assaut sur une même position plusieurs fois par jour. Elle avance, mais lentement, bataillant parfois des mois pour prendre un village cerné par les champs. Les forces ukrainiennes ont compliqué sa stratégie en lançant en août 2024 une incursion dans la province russe de Koursk.

L’an dernier, l’ISW a calculé que l’armée de Moscou avait pris un peu moins de 4 200 kilomètres carrés à l’Ukraine, l’équivalent du tiers de l’Ile-de-France. Un gain minimal au regard des pertes évaluées à 427 000 morts ou blessés par l’état-major ukrainien. Soit 102 par kilomètre carré gagné. Le mardi 11 février, le président ukrainien s’est dit prêt à un échange de territoires avec la Russie. Moscou a refusé le lendemain.