Sommet de l’Union européenne sur l’Ukraine : une révolution militaire ?

Sommet de l’Union européenne sur l’Ukraine : une révolution militaire ?

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Les Européens n’avaient plus l’excuse de la surprise : ils savaient, depuis le premier mandat de Donald Trump et sa campagne de 2024 qu’il était déterminé à faire exploser l’ordre mondial mis en place après 1945. Néanmoins, ils ont réussi l’exploit d’être étonnés par la violence du choc venant de Washington. Une impréparation qui les oblige à prendre des décisions dans l’urgence, tant pour essayer de pallier l’arrêt de l’aide américaine à l’Ukraine, et éviter qu’une paix injuste lui soit imposée, que pour bâtir une défense européenne après la rupture du lien transatlantique, faute d’avoir mis à profit la parenthèse Joe Biden.

Les Vingt-Sept se réunissent donc ce jeudi 6 mars à Bruxelles, en présence du président ukrainien, Volodymyr Zelensky, pour confirmer leur volonté d’augmenter l’aide financière et militaire à Kyiv et adopter les propositions de financement des budgets militaires concoctées à la hâte par la Commission. Il ne faut pas se tromper sur l’importance du moment : l’Europe de la défense sera aussi intégratrice que l’a été la monnaie unique ou l’emprunt européen post-Covid, qui a mutualisé les dépenses nécessaires au redémarrage des économies. Mais, pour y arriver, le chemin est encore long puisqu’augmenter les budgets militaires, qui atteignent difficilement en 2025 les 2 % du PIB, norme fixée par l’Otan, ne sera pas suffisant.

En effet, si c’est pour acheter à tour de bras du matériel américain sur étagère, vieille habitude européenne (60 % des achats militaires au sein de l’UE bénéficient aux Etats-Unis), l’Europe de la défense n’aura pas avancé d’un pouce. Autrement dit, il faut non seulement augmenter les capacités de production et créer de toutes pièces des filières d’armement, mais aussi introduire une préférence communautaire dans les marchés publics afin que les pays européens achètent européen quand le matériel existe. Dans le même temps, il va falloir mutualiser ces achats afin de remplir les carnets de commandes industriels que cela incitera à augmenter leurs capacités de production, à rationaliser les matériels pour éviter la dispersion actuelle (l’Union totalise 20 modèles d’avions de combat contre 6 aux Etats-Unis, par exemple) ou encore à éviter les redondances. Il faudra également se mettre d’accord sur une architecture politique, l’Union n’ayant ni la compétence ni la vocation à s’occuper de ce domaine de souveraineté, et sur une chaîne de commandement militaire… Ce qui prendra des années.

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Cette semaine, le futur chancelier allemand conservateur, Friedrich Merz, a levé les derniers obstacles à la naissance de cette Europe de la défense, comme l’avait fait son lointain prédécesseur Helmut Kohl, quand il s’était rallié en 1988 au projet de monnaie unique de Jacques Delors. Chrétiens-démocrates et sociaux-démocrates sont parvenus à un accord mardi sur la levée du frein constitutionnel à l’endettement pour le budget militaire (lire page 6), ce qui va permettre de l’augmenter dans des proportions considérables. «Pour la défense de l’Allemagne, la règle doit être quoiqu’il en coûte», a martelé Friedrich Merz.

Les Vingt-Sept devraient donc approuver sans difficulté le plan d’Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission qui a pris acte des changements intervenus à Berlin, et qui est censé dégager 800 milliards d’euros alors que les dépenses militaires de l’ensemble de l’Union se montent actuellement à 326 milliards d’euros.

Pour l’essentiel, cette somme proviendra des Etats dont les dépenses militaires seront sorties du calcul du déficit public autorisé par le Pacte de stabilité. Selon la Commission, si elles ­augmentent de 1,5 % du PIB, cela représentera 650 milliards d’euros. A cette somme s’ajoutera un nouveau fonds européen baptisé «ReArm Europe» de 150 milliards, empruntés sur les marchés par la Commission à taux bonifiés et reprêtés aux Etats, qui devront rembourser. Ce n’est donc pas une mutualisation des dépenses militaires mais cela ouvre le chemin. Fin mars, pour compléter cette accélération, la Commission présentera son «livre blanc» pour proposer une doctrine stratégique et, on l’espère, un projet d’organisation politique et militaire de l’Europe de la défense.

Libération

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