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Le bras de fer s’intensifie en Bosnie-Herzégovine entre les autorités centrales et le sécessionniste en chef de la Republika Srpska (RS) – l‘une des deux entités qui compose le pays –, Milorad Dodik. Le parquet fédéral bosnien a demandé ce mercredi 12 mars à la police d’interpeller le leader des Serbes de Bosnie soutenu par la Russie pour avoir ignoré une convocation du tribunal dans le cadre d’une enquête pour «attaque contre l’ordre constitutionnel». Outre Dodik, le procureur fédéral souhaite entendre également le président du Parlement de la RS, Nenad Stevandic, et son Premier ministre, Radovan Viskovic.
«Je recommande à la [police fédérale] Sipa de ne pas agir et je crois qu’ils ne le feront pas», a averti Milorad Dodik à la mi-journée depuis son fief de Banja Luka (nord), chef-lieu de l’entité serbe de la RS, affirmant une fois encore qu’il ne se plierait pas aux demandes de la justice de l’Etat central. «Je reste à la tête du gouvernement et je fais tout ce que je faisais jusqu’à présent, a pour sa part assené le chef du gouvernement de l’entité, Radovan Viskovic. Je n’ai pas peur de leur persécution, des menaces.»
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«Personne n’arrêtera et ne peut arrêter les dirigeants de la RS. Ce qui se déroule n’est pas la mise en œuvre d’un Etat de droit mais une attaque évidente et sans ambiguïté contre la Republika Srpska», a réagi ce mercredi Radovan Kovacevic, un des conseillers de Milorad Dodik, sur les réseaux sociaux. Il a également affirmé que l’entité serbe allait répondre «avec férocité» à «toute forme de radicalisation en provenance de Sarajevo».
Le parquet a ouvert une enquête après l’adoption par le Parlement de la RS, fin février, d’une législation rejetant l’autorité de la justice et de la police (Sipa) de l’Etat central sur le territoire de l’entité serbe (49 % du territoire du pays). Après avoir promulgué la loi, Dodik avait lancé le 7 mars un appel aux Serbes à quitter ces institutions et à rejoindre celles de la RS. «Nous leur avons réservé un travail, en préservant leur statut juridique, leurs grades et positions. Ils auront le même salaire, voire un salaire plus important qu’ils avaient» jusque-là, avait-il ajouté, à l’issue d’une réunion avec le Premier ministre serbe, Milos Vucevic. Le secrétaire d’Etat américain, Marco Rubio, avait alors accusé Dodik de «saper la sécurité et la stabilité» de la Bosnie.
Le lendemain, la Cour constitutionnelle avait suspendu la législation de l’entité serbe, tandis que la Force européenne (Eufor) annonçait des renforts pour sa mission de maintien de la paix en Bosnie. En 1995, les Accords de paix avaient entériné la fin des combats qui avaient au moins 100 000 morts, et consacré la division ethnique entre deux entités, la Republika Srpska (49 % du territoire) et la Fédération croato-musulmane (51 %) liées par un Etat central faible et supervisé par une autorité internationale.
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A la tête de la RS depuis 2006, Milorad Dodik, 65 ans, n’en est pas à son coup d’essai dans son entreprise de destruction de l’Etat central et de l’ordre constitutionnel. Le 26 février, il avait déjà été condamné dans une affaire distincte pour le non-respect des décisions du Haut Représentant, Christian Schmidt, dont la légitimité est rejetée par les dirigeants serbes bosniens, et de la Cour constitutionnelle. Il avait écopé d’une peine d’un an de prison, assortie d’une interdiction d’exercer pendant six ans ses fonctions. Il a dénoncé un «procès politique» visant à l’«éliminer de l’arène politique». «Je demande le soutien du peuple. Le peuple doit comprendre que c’est une question existentielle politique et nationale.»
Avec le soutien de la Serbie et de la Russie, Dodik multiplie les déclarations sécessionnistes, les actions et manifestations séparatistes depuis une bonne dizaine d’années. Il fustige un «Etat impossible», celui de Bosnie-Herzégovine, qui, selon lui, doit être «dissous». Et ne cesse de franchir des paliers dans la surenchère verbale, législative et symbolique. Cette fois, il est au pied du mur et face à une possible arrestation.
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