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Commençons par une petite pensée pour Michel Barnier, qui devrait passer ce mardi un bon après-midi. Plus que jamais menacé par une motion de censure, le Premier ministre savourera l’unanimité qui se dégagera, de l’extrême droite à l’extrême gauche en passant par son «socle commun», lors du débat suivi d’un vote sur le désormais très fameux traité Mercosur. Cet accord de libre-échange entre l’Europe et cinq pays d’Amérique du Sud, et non des moindres puisque l’on parle notamment du Brésil et de l’Argentine, est l’épouvantail que brandissent les agriculteurs sur les ronds points qu’ils occupent ou les barrages filtrants qu’ils organisent. En cause, entre autres, la baisse des droits de douane sur la viande bovine et la volaille, qui menacerait les filières françaises.
Ce bel élan d’unanimisme derrière le refus d’Emmanuel Macron et du gouvernement de valider «en l’état» cet accord commercial, pour symbolique et éphémère qu’il soit, ne pourra que servir l’exécutif dans sa bataille européenne, loin d’être gagnée, pour rallier suffisamment d’autres pays à son «non au Mercosur». Dans le camp d’en face, des poids lourds comme l’Allemagne, qui veut vendre plus de voitures en Amérique du Sud, ou l’Espagne et le Portugal, dont les échanges sont historiquement tournés vers ce continent.
Cette union nationale en France n’est évidemment pas dénuée chez certains d’hypocrisie, d’opportunisme électoral voire de démagogie à dénoncer un traité de libre-échange qui constitue leur habituel fonds de commerce, chef de l’Etat en tête. Précisons aussi que derrière ce «tous ensemble» contre le Mercosur se cache une réalité bien différente, certaines filières françaises industrielles mais aussi agricoles rêvant tout haut des débouchés que fait miroiter un tel accord.
Malgré ce qu’il convient d’appeler des postures dans ce front du refus, il n’en demeure pas moins vrai qu’il existe de bonnes raisons de s’opposer au Mercosur. La première relève presque de l’évidence : la durée des discussions. Vingt ans de négociations, cela cache forcément un vice de forme. La seconde raison découle presque de ce marathon hors norme : le monde entre-temps a changé et a pris, un peu, conscience des enjeux environnementaux. Et ils entrent indiscutablement en collision avec les intérêts commerciaux que veut favoriser le Mercosur. L’accord sur la table est d’une certaine manière daté. Réguler le commerce mondial avec pour seule boussole toujours plus d’échanges relève de l’anachronisme.
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