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Sur un fil
Les Roumains ont placé le parti des sociaux-démocrates devant les autres formations dimanche 1er décembre, lors des élections législatives. Mais l’ensemble des forces d’extrême droite cumulent plus de 31 % des voix.
Jamais, depuis la chute du communisme en 1989, l’extrême droite n’avait réalisé une telle percée. Si les sociaux-démocrates pro-européens sont arrivés en tête des élections législatives roumaines dimanche 1er décembre, la droite de la droite confirme sa forte avancée, plongeant dans l’incertitude cet Etat voisin de l’Ukraine, membre de l’UE et de l’Otan. Le PSD – qui gouvernait jusqu’à présent avec les libéraux – a recueilli 22,4 % des voix, devançant les autres formations, selon des résultats quasi complets (plus de 99 % des circonscriptions ont été dépouillées). Toutefois l’ensemble des forces d’extrême droite combinées se situent à plus de 31 %, soit le triple du précédent scrutin de 2020.
Dans une séquence inédite, ces élections interviennent une semaine après le succès surprise du candidat d’extrême droite Calin Georgescu au premier tour de la présidentielle, un résultat qui a suscité des craintes dans l’ouest du continent quant au positionnement stratégique de la Roumanie. Les législatives n’ont pas permis de «clarifier» la situation, estime le politologue Cristian Pirvulescu. «Nous sommes face à un Parlement extraordinairement fragmenté qui pose de nombreux risques» et laisse augurer de difficiles négociations pour former un gouvernement, explique-t-il.
Identité et valeurs nationales
Si le Premier ministre social-démocrate Marcel Ciolacu, éliminé le 24 novembre de la course à la présidence, s’est félicité de la première place de son parti, il a pris acte de la poussée des nationalistes. «Les Roumains ont lancé un important signal à la classe politique», a-t-il réagi : poursuivre sur la voie européenne «mais aussi protéger notre identité et nos valeurs nationales».
L’extrême droite, disséminée entre plusieurs formations qui ont en commun de s’opposer au soutien à Kyiv au nom de la «paix» et de défendre des «valeurs chrétiennes», s’est félicitée de ces résultats. «Aujourd’hui le peuple roumain a voté pour les forces souverainistes», a déclaré le chef du parti AUR (Alliance pour l’unité des Roumains), George Simion. La formation a obtenu 17,8 % des voix. «C’est le début d’une nouvelle ère où les Roumains se réapproprient le droit de décider de leur propre destin», a-t-il ajouté, alors que le taux de participation a atteint son plus haut niveau en deux décennies (52 %) pour des législatives. Dans le même camp, SOS Romania, dirigé par la tempétueuse candidate favorable au Kremlin Diana Sosoaca, et le tout nouveau Parti de la jeunesse (POT) font leur entrée au Parlement avec respectivement 7,2 % et 6,3 % des voix.
Ce scrutin peut s’expliquer par la colère d’une grande partie des 19 millions d’habitants devant les difficultés économiques et la guerre de l’autre côté de la frontière. «Cette forte montée de l’extrême droite, autour d’un tiers de l’électorat, témoigne des frustrations accumulées dans la société et de la grogne économique», a commenté l’analyste Radu Magdin. Pour autant, faute d’alliés, leur accession au pouvoir est loin d’être garantie.
Déjà plusieurs responsables politiques ont lancé des appels en faveur d’«un gouvernement d’unité nationale» résolument pro-européen. «Unis, nous pouvons faire des merveilles», a lancé la cheffe de file des centristes de l’USR (12,1 %), Elena Lasconi, qui s’est qualifiée la semaine dernière au second tour de la présidentielle. «Après ces journées cauchemardesques», elle a appelé à laisser de côté les querelles de partis pour défendre «la démocratie» et l’indépendance de la Roumanie face à la Russie.
Soupçons d’ingérence
Plus tôt dans la journée, plusieurs électeurs avaient confié leurs craintes que la Roumanie ne se détourne de l’UE, comme Dorina Burcea, 41 ans. «En tant que personne qui a vécu un peu sous le communisme et qui s’en souvient encore, et qui a pu ensuite profiter de toute l’ouverture de l’UE, je ne peux pas imaginer une autre option que l’Union européenne et l’Otan», a-t-elle confié.
Les élections se sont déroulées dans un climat fébrile après la décision de la justice de recompter les bulletins du premier tour de la présidentielle sur fond de suspicions quant à l’intégrité des élections. Les autorités ont mis en cause l’influence russe dans le contexte régional actuel et le rôle de la plateforme TikTok. Au point que la Cour constitutionnelle a ordonné un nouveau comptage et doit se prononcer lundi. Si le scrutin n’est pas annulé, le second tour aura lieu le 8 décembre.
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