La faune marine de la Méditerranée révélée par son ADN – Libération

La faune marine de la Méditerranée révélée par son ADN – Libération

Главная страница » La faune marine de la Méditerranée révélée par son ADN – Libération
Climat Libé Tourdossier

Dossiers liés

L’université de Montpellier s’est investie dans une aventure aussi ambitieuse qu’inédite : réaliser un inventaire du vivant sur toute la zone côtière méditerranéenne française. Une nouvelle cartographie qui livre des premiers résultats étonnants.

Inventorier toutes les espèces de poissons, de crustacés et de mammifères marins présents le long de nos côtes : c’est à cette improbable tâche que s’est attelée la mission BioDivMed entre les mois de mai et de juillet 2023. Cette cartographie de la biodiversité a été élaborée à fine échelle sur toute la zone côtière méditerranéenne, de Menton (Alpes-Maritimes) à Banyuls-sur-Mer (Pyrénées-Orientales), en passant par le pourtour corse et en incluant les ports, les embouchures de fleuves et les lagunes.

Pour établir un tel inventaire, les scientifiques ont eu recours à l’ADN environnemental (ADNe). Toutes les espèces sécrètent en effet des fluides et des cellules contenant de l’ADN, et ces séquences d’ADN peuvent persister plusieurs heures dans l’environnement. La technique consiste donc à prélever des échantillons d’eau de mer, puis à les verser dans des capsules contenant un filtre sur lequel se déposent les brins d’ADN. Analyser ces fragments permet alors d’identifier et d’inventorier les espèces marines présentes dans la zone.

«Plus de 700 prélèvements»

«Durant la mission BioDivMed, des prélèvements d’eau de mer ont été réalisés le long des côtes tous les 10 km, soit au total plus de 700 prélèvements, à partir desquels nous avons pu recenser 267 espèces de poissons», détaille David Mouillot, professeur en écologie marine à l’université de Montpellier et membre de l’unité de recherche Marbec (Marine Biodiversity, Exploitation and Conservation). Ce laboratoire montpelliérain a orchestré la mission BioDivMed au sein d’un consortium réunissant l’Agence de l’eau Rhône-Méditerranée-Corse, les sociétés Spygen et Andromède Océanologie, les associations OceanoScientific et We Are Méditerranée. «Etablir une telle cartographie s’avère aujourd’hui fondamental pour mesurer l’état de la biodiversité marine et pour accompagner les actions de conservation à l’échelle de la Méditerranée, car c’est à cette échelle que les politiques se décident», argumente Nicolas Mouquet, chercheur au CNRS rattaché à Marbec et directeur du Centre de synthèse et d’analyse sur la biodiversité (Cesab), à Montpellier.

Jusque-là, le suivi de la faune marine s’effectuait grâce à des techniques plus invasives et aux résultats parcellaires, comme la pêche, les recensements visuels en plongée ou via des caméras sous-marines, ou encore par des relevés acoustiques. L’ADNe permet, lui, de collecter des données précises et presque exhaustives. «Il constitue l’une des pistes les plus prometteuses afin d’acquérir ce type de données pour des milliers d’espèces marines», estime Nicolas Mouquet.

L’ADNe trahit en effet la présence d’espèces quasiment invisibles à l’œil nu ou bien très rares et donc difficiles à observer. Ainsi l’ange de mer, un poisson en danger critique d’extinction et considéré comme disparu en Méditerranée, a été repéré à plusieurs reprises lors de la mission BioDivMed. «Grâce à l’ADNe, nous avons pu identifier ses ultimes refuges, explique David Mouillot. De même, nous avons trouvé des traces ADN du poisson-lune alors que nous pensions qu’il avait disparu de nos eaux.»

Définir l’emplacement de nouvelles réserves marines

Dévoilés au mois de juin prochain, les résultats définitifs de cette mission devraient ainsi permettre d’améliorer le suivi d’espèces particulièrement surveillées car protégées, menacées ou envahissantes. BioDivMed se propose, en outre, d’élaborer une politique favorisant une pêche côtière durable et de définir l’emplacement de nouvelles réserves marines protégées. «Car nous avons constaté que certaines zones riches en biodiversité marine, comme du côté de Propriano, en Corse, ou près des îles des Embiez, vers Toulon, n’étaient pas ou pas assez protégées, poursuit David Mouillot. Or, il faut garder à l’esprit l’objectif défini par les Nations unies : 30 % des surfaces océaniques doivent être protégées d’ici 2030. Et nous n’en sommes aujourd’hui qu’à 8,5 %.»

Nicolas Mouquet évoque, quant à lui, les résultats d’une étude qu’il a récemment menée avec son équipe : «Grâce à l’intelligence artificielle, nous avons établi que le nombre d’espèces de poissons menacées d’extinction était cinq fois plus élevé que l’estimation initiale avancée par l’Union internationale pour la conservation de la nature. C’est un résultat marquant, entraînant de fortes conséquences pour la conservation de la biodiversité marine.»

Libération

Post navigation

Leave a Comment

Schreibe einen Kommentar

Deine E-Mail-Adresse wird nicht veröffentlicht. Erforderliche Felder sind mit * markiert

L’armée de gardes du corps de Gérald Darmanin

Au comptoir de Chez Pol Article réservé aux abonnés Violences sexuellesdossier Indiscrétions piquantes, maladresses vaches ou douces confessions : chaque jour, retrouvez les brèves qui auscultent le monde politique. Extrait…