La Finlande, nouveau membre de l’OTAN qui partage 1 300 kilomètres de frontière avec la Russie et a dû céder à l’Union soviétique 10 % de son territoire à l’issue de la « guerre d’hiver » (entre novembre 1939 et mars 1940), suit les discussions sur un éventuel dénouement de la guerre en Ukraine avec une attention toute particulière.
Pour son président, Alexander Stubb, l’alternative qui se présente à l’Europe est « soit le moment Yalta, soit le moment Helsinki ».
Dans un entretien accordé au Monde samedi 7 décembre à Paris parallèlement à la rencontre du président élu américain Donald Trump, du président ukrainien Volodymyr Zelensky et d’Emmanuel Macron à l’Élysée, M. Stubb, venu assister à la cérémonie de réouverture de Notre-Dame, estime qu’« il faut être très clair avec les Russes. S’ils veulent nous pousser vers des arrangements sur la sécurité en Europe, il faut leur dire : nous les avons déjà depuis les accords d’Helsinki de 1975, renforcés en 1992 par les accords de Paris, qui ont établi l’OSCE [Organisation de sécurité et de coopération en Europe]. Il n’y aura pas de retour à Yalta. »
« Le moment Yalta, rappelle le dirigeant finlandais, c’était les grandes puissances qui décidaient de diviser l’Europe en sphères d’intérêt. Le moment Helsinki, c’était la décision de se fonder sur trois piliers du droit international : l’indépendance, l’intégrité territoriale et la souveraineté », qui implique « le droit de choisir à quelle organisation vous voulez appartenir ».
« Comme Finlandais, j’attache beaucoup d’importance à ces trois piliers, poursuit-il. En 1944 avec la paix de Staline, la Finlande a maintenu son indépendance mais perdu du territoire et sa souveraineté. Elle n’a recouvré sa souveraineté qu’en 1991 avec l’effondrement de l’Union soviétique. Nous avons pu alors choisir notre propre destin en rejoignant d’abord l’Union européenne [en 1994], puis l’OTAN en 2023. »
Apporter des « garanties de sécurité »
Pour ces mêmes raisons, Alexander Stubb se dit « violemment opposé » à l’option de la finlandisation pour l’Ukraine, « car elle signifierait la perte de territoire et la perte de la souveraineté. Nous ne devrons jamais laisser la négociation aller aussi loin. L’Ukraine ne doit pas seulement gagner la guerre, elle doit aussi gagner la paix ».
Pour lui, il appartient aux Ukrainiens de décider si une perte de territoire « de facto, mais pas de jure », en gardant une revendication sur les territoires provisoirement perdus, est acceptable. En revanche, il se dit « maximaliste » sur la question des garanties de sécurité que les alliés de l’Ukraine devront lui fournir dans le cadre d’un éventuel accord de cessez-le-feu, d’armistice ou de paix. « Nous n’enverrons pas de troupes [en Ukraine] en temps de guerre, mais s’il y a un règlement de paix, avec une nécessité de préserver la paix en position de force, alors les Européens et les États-Unis doivent apporter ces garanties de sécurité. Et là, les États-Unis devront décider s’ils participent aux “boots on the ground” [“à l’envoi de troupes”] ». Prudent, le président finlandais juge prématuré de se prononcer sur une éventuelle participation de son pays mais ne l’exclut pas sur la base d’un mandat international ou européen.
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