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C’est un rapport sur «la menace mondiale des terres asséchées» qui devrait faire date. Pour la première fois, un groupe d’experts internationaux a établi un état des lieux robuste de l’aridification actuelle et future de la planète. L’évolution de ce processus complexe, particulièrement difficile à estimer, avait jusqu’ici abouti à des résultats contradictoires. Dans leur analyse publiée ce lundi 9 décembre, les auteurs, des scientifiques rattachés à la Convention des Nations unies sur la lutte contre la désertification (CNULCD), l’équivalent d’un Giec pour la désertification, assurent que plus des trois quarts des terres de la planète ont connu un climat plus sec au cours des dernières décennies et que les zones arides couvrent désormais près de 41 % des terres émergées de la planète. «Une superficie globale égale à la moitié de la taille de l’Australie est passée de terres humides à des zones arides», détaillent-ils. Cela a notamment des effets dévastateurs pour l’agriculture et peut causer de la désertification.
A l’occasion de ce rapport, dévoilé à mi-chemin de la COP désertification qui se tient en ce moment à Riyad (Arabie Saoudite), Ibrahim Thiaw, secrétaire exécutif de la CNULCD avertit qu’une «menace existentielle» pèse sur l’humanité. Car «contrairement aux sécheresses – périodes temporaires de faibles précipitations –, l’aridité représente une transformation permanente et implacable», explique-t-il. La tendance mondiale à l’assèchement a commencé dans les années 1950 et s’accélère depuis les années 1990.
Deux fois plus de personnes concernées
Les experts écrivent que l’aridité menace «la vie et les moyens de subsistance de milliards de personnes dans presque toutes les régions du monde». Ils précisent qu’aucun retour en arrière n’est possible lorsqu’une zone a basculé dans l’aridité, c’est-à-dire un manque d’humidité durable. «Les climats plus secs qui affectent actuellement de vastes régions du monde ne redeviendront pas ce qu’ils étaient auparavant», souligne le rapport. Le changement climatique, induit par les activités humaines, fait monter le thermomètre mondial et est donc en grande partie «coupable» de cette aridité croissante. Cela peut entraîner de nombreux «effets en cascade», préviennent les auteurs : de l’insécurité alimentaire et hydrique, une faible fertilité des sols, des pertes de productivité des cultures et des plantes, le déclin de la biodiversité, la dégradation des écosystèmes, d’intenses tempêtes de sable et de poussière, des incendies de forêt, et des migrations humaines à grande échelle. Environ 20 % des terres du monde risquent de subir des transformations abruptes de leurs écosystèmes d’ici 2100 en raison de l’aridité croissante, selon le rapport.
Les auteurs ont évalué le nombre de personnes qui en sont et seront victimes. Ils ont établi que le nombre de personnes vivant dans les zones arides avait doublé au cours des dernières décennies et il pourrait encore plus que doubler d’ici la fin du siècle. «Aujourd’hui, un quart de la population mondiale vit dans les zones arides en expansion de la planète. Les projections sur l’aridité suggèrent que jusqu’à cinq milliards de personnes pourraient habiter les zones arides d’ici la fin du siècle», écrivent-ils. Environ la moitié des habitants des zones arides de la planète se trouvent actuellement en Asie et Afrique. La Californie fait aussi partie des zones arides les plus densément peuplées.
«Des mesures d’adaptation durables sont cruciales»
A l’avenir, «si le monde ne parvient pas à réduire les émissions de gaz à effet de serre, 3 % supplémentaires des zones humides de la planète deviendront des zones arides d’ici la fin du siècle», assure le rapport. Dans les scénarios d’émissions élevées de gaz à effet de serre, une expansion des zones arides est prévue dans le Midwest des Etats-Unis, le centre du Mexique, le nord du Venezuela, le nord-est du Brésil, le sud-est de l’Argentine, l’ensemble de la région méditerranéenne, la côte de la mer Noire, une grande partie de l’Afrique australe et le sud de l’Australie.
En plus des efforts pour atténuer rapidement nos émissions de gaz à effet de serre, «des mesures d’adaptation durables sont cruciales pour relever les défis croissants du changement climatique et de l’aridité», affirment les auteurs. Parmi les solutions, ils évoquent notamment une agriculture plus durable (notamment via l’agroécologie), une meilleure gestion de l’eau et des terres, ainsi que pour l’éducation et la sensibilisation des populations.
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