Chute du régime de Bachar Al-Assad : que signifie le nouveau drapeau syrien brandi par les opposants ?

Chute du régime de Bachar Al-Assad : que signifie le nouveau drapeau syrien brandi par les opposants ?

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Amenée à remplacer celle du régime déchu, la bannière brandie des révolutionnaires syriens a une longue histoire, qui remonte aux années 30. Dans le pays, elle est liée à une mémoire collective associée à des moments de liberté et d’autonomie.

Il est quasiment sur toutes les photos immortalisant la chute du régime de Bachar al-Assad et flottait dès ce lundi 9 décembre au matin sur l’ambassade syrienne à Moscou. En Syrie, le drapeau vert blanc et noir, orné de trois étoiles rouges a, de facto, remplacé celui utilisé depuis 1980 par le régime Al-Assad – rouge blanc et noir avec deux étoiles vertes. A la faveur notamment de la guerre civile syrienne, à partir de 2011, cette bannière est devenue un symbole de l’opposition au dictateur déchu.

A quand remonte la première apparition du drapeau révolutionnaire ?

L’histoire de ce drapeau remonte aux années 30, lorsque la Syrie est encore sous mandat français. Comme nous l’apprend une thèse de l’architecte et écrivaine syrio-américaine Lina Sergie (1), il est utilisé «entre 1932 et 1946 […] par les révolutionnaires» qui réclament l’indépendance du pays. Il reprend à l’époque les quatre couleurs du drapeau de la Révolte arabe contre l’Empire ottoman entre 1916 et 1918 : le rouge, le vert, le blanc et le noir.

A la proclamation de l’indépendance de la Syrie, le 17 avril 1946, ce drapeau est conservé par les nouvelles autorités et devient alors «le vrai drapeau de l’autonomie, représentant l’Etat syrien dans son ensemble, avec ses frontières plus ou moins stabilisées», marquant une rupture avec les anciens symboles coloniaux. Remplacé en 1958, il sera réintroduit une dernière fois entre 1961 et 1963.

Que symbolise-t-il ?

D’après la thèse de Lina Sergie, le drapeau révolutionnaire est étroitement lié à une mémoire collective syrienne faite de moments historiques associés à la liberté, à l’autonomie et à la victoire contre la domination étrangère. Selon Lina Sergie, «le noir représente le passé oppressif, le blanc le futur prometteur, et le rouge le sang nécessaire pour aller de l’avant». Reste le vert, couleur omniprésente dans la civilisation islamique, qui l’associe à Mahomet, à la nature et à la fertilité. Quant aux trois étoiles rouges à cinq branches, elles symbolisent les trois grandes régions syriennes unies sous le mandat français : Damas, Alep et Deir el-Zor.

Au moment de la révolution de 2011, les opposants s’emparent de nouveau de ce drapeau pour marquer leur rejet du régime al-Assad. Le Conseil national syrien, l’autorité politique de transition créée à l’occasion de la guerre civile, l’adopte alors comme emblème. «C’était une manière de se réapproprier l’Etat» contre le clan al-Assad, se souvient Firas Kontar, figure de l’opposition démocratique syrienne. Le politologue, qui rappelle que cette bannière était initialement «haïe» par les groupes islamistes syriens, parmi lesquels Hayat Tahrir al-Sham (HTS), à la tête de la coalition rebelle qui vient de renverser la dictature. «HTS a compris avec le temps qu’il ne pouvait pas inspirer totalement sa loi. Le fait qu’il ait accepté le drapeau révolutionnaire est l’un des signes de son évolution : il est devenu un mouvement avant tout national», explique-t-il.

Quid de l’ancien drapeau, celui du régime ?

C’est en 1980, sous le règne de Hafez al-Assad, père de Bachar, que la bannière aux trois bandes, rouge, blanche et noire, avec deux étoiles vertes, avait été définitivement adoptée. Elle avait déjà été brièvement introduite quelques années plus tôt, en 1958, au moment de la République arabe unie (une éphémère tentative d’union entre l’Egypte, la Syrie et le Yémen) et représentait l’idéal du panarabisme. «Ses couleurs sont celles du parti Baas [celui de la famille Al-Assad, ndlr] avant d’être celles de la Syrie, souligne Firas Kontar. Cela témoigne de la mainmise d’un parti et d’une famille sur un pays qu’ils ont tenté de privatiser.» Quant aux deux étoiles vertes, comme le rappelle le Monde, elles représentent la Syrie et l’Egypte, l’union avec le Yémen ayant été trop brève.

De Damas à Alep en passant par les capitales étrangères où se sont exilés les millions de réfugiés syriens, les adversaires de Bachar al-Assad brûlent désormais le drapeau du régime, devenu le symbole d’une dictature qui s’est effondrée.

(1) «Recollecting History : Songs, Flags and a Syrian Square», Massachusetts Institute of Technology, 2003.

Libération

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