Trois articles courts, pas un de plus. Rares sont les lois aussi minimalistes. Celle qui justifie que le gouvernement démissionnaire de Michel Barnier se retrouve pour un conseil des ministres hors normes, ce mercredi 11 décembre, est aussi exceptionnelle par sa brièveté que par son objet : « garantir la continuité de la vie nationale ». Après la motion de censure qui a rendu impossible l’adoption d’un budget pour 2025, la « loi spéciale » soumise aux ministres réunis pour la première fois depuis leur démission collective vise simplement à éviter que l’Etat et la Sécurité sociale n’aient plus les moyens d’agir à partir du 1er janvier 2025.
« Inutile de paniquer ou d’exulter prématurément : ce texte va donner au gouvernement les moyens minimaux pour éviter le shutdown à l’américaine, et les contribuables vont continuer à payer des impôts », résume Emmanuelle Mignon, ancienne directrice du cabinet de Nicolas Sarkozy à l’Elysée, désormais associée au sein du cabinet d’avocats August Debouzy.
Après son passage en conseil des ministres, le projet de loi sera présenté mercredi après-midi à la commission des finances de l’Assemblée par les ministres démissionnaires de Bercy, puis examiné lundi en séance, avant d’être étudié au Sénat le 16 décembre. Objectif du gouvernement, obtenir un vote identique des deux assemblées, sans amendement, pour que cette loi soit promulguée au plus vite, avant la fin de l’année.
Brouillard
L’exécutif avance ici dans un certain brouillard. Dans la Constitution, aucune procédure ne correspond exactement au cas présent. Et, sous la Ve République, la France n’a voté qu’une seule loi spéciale de ce type, en 1979. Un avis rendu lundi par le Conseil d’Etat balise cependant le terrain. Ses conclusions ? Même démissionnaire, le gouvernement est en droit de soumettre au vote une loi d’urgence comme celle préparée ces derniers jours, au nom de la nécessaire continuité de l’Etat. Mais le texte doit se limiter précisément à cette fonction. Il ne peut remplacer le futur budget.
La loi se limitera donc à une poignée de phrases. Comme en 1979, la première autorisera le gouvernement « à continuer à percevoir les impôts existants » jusqu’au vote du budget. Ainsi l’argent entrera-t-il toujours dans les caisses publiques, mais seulement à partir des règles arrêtées fin 2023. Aucune nouvelle mesure fiscale n’est possible. Les deux articles suivants autoriseront l’Etat à recourir à l’emprunt, et la sécurité sociale à faire de même, en relevant le plafond d’endettement de l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss).
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