:quality(70)/cloudfront-eu-central-1.images.arcpublishing.com/liberation/2CDU6GEOHBE5LLQT6YY4STK5OA.jpg)
Pour la première fois en presque quatorze mois, les bombardements devraient se taire à Gaza. Au moins pour quelques jours. Autant de mois de négociations impossibles ont fini par aboutir ce mercredi 15 janvier – en partie grâce aux menaces d’un Donald Trump triomphant avant son retour à la Maison Blanche – à ce qu’Israël et le Hamas s’accordent sur le principe d’une trêve dans l’enclave palestinienne. Un accord qui doit encore être officiellement ratifié jeudi par le cabinet de sécurité israélien, et Benyamin Nétanyahou, le Premier ministre, met en garde contre quelques détails qu’il faudrait encore régler. «Nous avons un accord pour les otages au Moyen-Orient. Ils seront libérés sous peu», a pourtant immédiatement réagi le président élu américain sur son réseau Truth Social.
L’accord conclu ce mercredi ressemble beaucoup à celui proposé par Joe Biden vendredi 31 mai et sur lequel planchaient médiateurs et négociateurs depuis des mois. Il prévoit une première période de six semaines de cessez-le-feu pour permettre la libération au compte-goutte de 33 otages – les femmes, les enfants et les hommes de plus de 50 ans – contre un millier de prisonniers palestiniens. Israël se serait engagé à libérer 30 Palestiniens pour un civil israélien, et 50 si l’otage est un militaire. Cette première phase devrait débuter dimanche, a indiqué mercredi soir le Premier ministre qatari, précisant que son pays, l’Egypte et les Etats-Unis surveilleraient l’application de l’accord.
Au 16e jour de la trêve, une reprise des négociations devrait avoir lieu pour définir la phase suivante, qui doit permettre la libération du reste des captifs vivants, un cessez-le-feu permanent et un retrait complet des forces israéliennes. Une troisième phase doit suivre pour permettre le retour en Israël des dépouilles des otages restées – ou emmenées le 7 Octobre – à Gaza, et voir débuter une reconstruction de l’enclave palestinienne sous la supervision de l’Egypte, du Qatar et des Nations Unies.
A lire aussi
Selon le Haaretz, Israël consent au cours de cette première phase à se retirer du corridor de Netzarim, qui coupe l’enclave en deux, pour permettre aux Gazaouis de remonter du sud vers le nord du territoire. Les hommes de Tsahal seront redéployés dans une zone tampon d’environ un kilomètre de large tout au long de la frontière avec l’Etat hébreu. Les Gazaouis, dont au moins 46 500 ont péri depuis le début du conflit, devraient enfin pouvoir retrouver un peu de répit au milieu d’une enclave réduite à l’état de ruines. Plusieurs centaines d’entre eux ont laissé éclater leur joie à l’annonce de l’accord.
Celui-ci prévoit d’ailleurs que 600 camions d’aide humanitaire entreront chaque jour dans le territoire palestinien, dont la moitié dédiés au nord de Gaza, de loin la plus touchée par les destructions. Une cinquantaine transporteront de l’essence, essentielle pour faire tourner les générateurs et remettre en marche les hôpitaux. Selon les médias égyptiens, des pourparlers étaient en cours, mercredi soir, pour permettre l’ouverture d’un passage à la frontière entre l’Egypte et Gaza à l’aide humanitaire.
Pression
Depuis son élection, le 6 novembre, et son retour revanchard, Donald Trump n’a cessé de répéter que si les otages israéliens, retenus depuis le 7 Octobre, n’étaient pas libérés avant son investiture, «les portes de l’enfer s’ouvrir [aient] sur tout le Moyen-Orient». En parallèle des menaces publiques, le milliardaire a également dépêché dans la région son émissaire pour le Moyen-Orient, Steve Witkoff, qui a rencontré samedi dernier le Premier ministre israélien, mais aussi participé aux négociations menées au Qatar, aux côtés du représentant de Joe Biden, Brett McGurk. «Biden et Trump ont fait ce qu’aucun président sortant et président élu n’avaient jamais fait. Ils ont travaillé ensemble pendant la période de transition sur un énorme accord diplomatique, et ils l’ont obtenu», a commenté mercredi le journaliste israélien Barak Ravid.
S’il ne fait guère de doute que l’investiture imminente de Trump a joué un rôle dans le timing de cet accord, l’influence du futur président reste difficile à mesurer. Si certaines sources ont fait état d’un entretien tendu entre Witkoff et Nétanyahou, d’autres, évoquées notamment par le média israélien Ynet, assurent que Trump aurait promis au Premier ministre israélien que s’il acceptait rapidement une trêve, il soutiendrait ensuite une éventuelle reprise de la guerre à Gaza. Dans un communiqué publié avant toute réaction de la Maison Blanche, Donald Trump a sans surprise tiré la couverture à lui : «Cet accord épique n’aurait pu voir le jour qu’après notre victoire historique en novembre, car elle a indiqué au monde entier que mon administration rechercherait la paix.» Peu après, Joe Biden a salué à son tour ce cessez-le-feu, l’attribuant notamment à une campagne diplomatique américaine «opiniâtre et minutieuse», tout en reconnaissant avoir travaillé «en équipe» avec Trump.
L’accord «est le produit de la ténacité légendaire de notre peuple palestinien», a réagi de son côté le Hamas. Acculé, privé de ses principaux chefs et fortement affaibli par les bombardements et opérations terrestres de Tsahal, le mouvement terroriste palestinien s’est retrouvé contraint de consentir à un accord. Sans forcément obtenir la garantie du départ à terme des troupes israéliennes de Gaza, ce qui était pourtant présenté jusqu’ici comme une ligne rouge.
Le Premier ministre israélien va pouvoir se targuer, auprès des familles d’otages qui réclament un accord depuis des mois, d’avoir réussi par la force à libérer quelques-uns des 97 personnes encore retenues à Gaza d’après un décompte de CheckNews – et dont 34 sont officiellement considérées comme mortes. Les choses se sont accélérées dans la nuit du dimanche 12 au lundi 13 janvier, avec «une percée» dans les négociations, selon un responsable proche des discussions qui a permis l’envoi, par le Qatar, d’un texte de résolution finale aux deux belligérants.
La question de l’après
Lors de la première trêve, qui n’avait duré qu’une semaine en novembre 2023, une centaine d’otages avaient été libérés. Ceux qui vont retourner en Israël dans les prochains jours auront passé infiniment plus de temps dans les tunnels de l’organisation islamistes et de leurs divers ravisseurs. Reste à définir le futur d’une enclave en grande partie détruite, avec près de 2 millions d’habitants exilés sur leurs propres terres. La question de la gouvernance du territoire va aussi très vite se poser. Tandis qu’en Israël, le Premier ministre va encore devoir composer avec la pression de l’extrême droite, qui l’a porté au pouvoir. Celle-là même qui, par la voix du ministre des Finances, Bezalel Smotrich, refusait encore catégoriquement dans les derniers jours de négociations un «accord de reddition qui inclurait la libération d’hyperterroristes, l’arrêt de la guerre, et la perte de ce qui a été acquis au prix de beaucoup de sang versé et de l’abandon d’un grand nombre d’otages».
Toujours est-il que pour la première fois depuis le 7 Octobre et grâce au cessez-le-feu obtenu au Liban fin novembre, aucun combat ne devrait agiter cette région troublée qui n’a déjà plus rien à voir avec ce qu’elle était à la veille de l’attaque terroriste du Hamas, en cette funeste journée de 2023.
Mis à jour à 19 heures, avec les détails de l’accord selon Reuters.
Mis à jour à 19 h 45, avec des détails sur le rôle de Donald Trump dans les négociations.
Mis à jour à 20h29 avec réaction de Joe Biden, du Premier ministre du Qatar et du Hamas
Leave a Comment