Neige industrielle : quel est ce phénomène observé dans plusieurs régions de France ces derniers jours ?

Quelques régions de France se sont blanchies ces derniers jours : dans le Doubs, en Seine-Maritime ou encore en Saône-et-Loire, les flocons ont recouvert des secteurs très localisés. Mais ce manteau neigeux n’est pas tout à fait naturel. Il s’agit de neige «industrielle», une conséquence directe de la pollution humaine combinée à des conditions météorologiques hivernales particulières. Libé décrypte les spécificités de ce phénomène.

Qu’est-ce que la neige industrielle ?

Malgré l’absence de perturbations, il arrive qu’il neige en ville ou à proximité de complexes industriels, rapporte Météo France. En effet, dans certaines conditions anticycloniques, avec une masse d’air froid et humide, les particules fines émises par les activités humaines peuvent devenir des noyaux de condensation autour desquels va s’agglomérer la vapeur d’eau, formant ainsi des flocons de neige.

La formation de la neige «naturelle» dépend du même principe. Sauf que celle-ci se forme bien plus en altitude, autour de grains de poussière et lors de perturbations météorologiques étendues, précise le site Météo-Paris.

Comment se forment ces flocons ?

La neige industrielle – ou «urbaine» – dépend donc de conditions atmosphériques très spécifiques pour se former, par exemple un puissant anticyclone hivernal. Celui-ci agit comme un couvercle, piégeant les particules en suspension dans l’air près du sol et empêche la dispersion de l’humidité et de la pollution, explique Météo France.

Toutefois, les conditions météo à elles seules ne suffisent pas à produire de la neige industrielle. «En fait, c’est la pollution liée aux industries, à la circulation, aux appareils de chauffage qui va venir charger l’air ambiant d’humidité supplémentaire mais aussi de petites particules solides appelées noyaux de condensation», détaille l’institut météorologique. La vapeur d’eau se fixe sur ces noyaux, gèle et se transforme en neige très fine qui tombe souvent sous forme d’aiguilles. C’est d’ailleurs là une de ses spécificités, note Météo France.

Par ailleurs, cette neige tombe principalement à proximité des sources de particules fines, rendant visible les zones polluées. Le phénomène est donc souvent très localisé. Sous des conditions météorologiques identiques mais dans une atmosphère non chargée de particules fines, il n’y aura pas de chute de neige industrielle.

Le phénomène est difficile à prévoir, affirme Météo France, qui fait valoir qu’il est complexe de bien prévoir la persistance des conditions froides et humides dans les très basses couches de l’atmosphère. De plus, «les émissions humaines très locales [industries] ne sont pas prises en compte dans les modèles météorologiques.»

Quelle est la dangerosité de ce phénomène ?

Selon le site de Météo Centre-Val de Loire, «il vaut mieux éviter de jouer avec» la neige industrielle et se garder «de l’avaler». Toutefois, cette neige reste peu toxique pour le corps humain car les quantités de particules fines sont généralement très faibles, voire infimes dans les flocons. De plus, comme pour la pluie, la pollution située dans la neige industrielle est lessivée une fois tombée au sol. «S’il n’y avait pas cette humidité, cette pollution resterait piégée dans les basses couches de l’air, au lieu de retomber au sol, et on la respirerait», ajoute Pascal Miquel, prévisionniste à Météo France, interrogé par ici Orléans.

Y a-t-il eu des épisodes marquants de neige industrielle ?

Si le phénomène n’est pas rare en France, il passe souvent inaperçu du fait de son aspect très localisé et généralement peu durable. Quelques épisodes marquants ont tout de même été observés ces dernières années, affirme Météo-Paris. Comme celui du 9 février 2021 en Moselle, près de la centrale nucléaire de Cattenom. «En raison d’un froid vif et d’une humidité abondante accentuée par les rejets de vapeur d’eau de la centrale, 15 à 30 cm sont tombés en une seule nuit sur un périmètre d’environ 10 km autour de la centrale seulement», retrace le site.

Libération