Raclette pour étudiants précaires : «A cause des prix, on mange souvent des pâtes»

Raclette pour étudiants précaires : «A cause des prix, on mange souvent des pâtes»

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L’odeur puissante de fromage chatouille les narines depuis l’entrée de la rue Didot. Au 110, le restaurant La Cop1ne est bondé. Il faut dire que ce mardi 21 janvier, c’est raclette, et elle est à un euro. Dans les assiettes creuses, des pommes de terre nappées de fromage fondu, agrémentées de cornichons, d’oignons frits et de morceaux de fenouil. L’association de solidarité étudiante Cop1, à qui appartient le restaurant, organise ce soir-là un repas pour «pousser» le vote de la loi pour rendre accessible un repas à 1 euro à tous les étudiants. Depuis 2020, les étudiants boursiers et précaires peuvent déjà bénéficier de la mesure quand les autres payent 3,30 euros au restaurant universitaire. «Si on n’est pas boursier, ça ne veut pas forcément dire qu’on a une bonne situation financière», témoigne Ayoub Elomary, 29 ans, étudiant international en dernière année d’école d’ingénieur. Il reconnaît sauter régulièrement le repas du midi. Il n’est pas le seul. Selon le baromètre annuel de l’Ifop sur la situation des étudiants en France, en 2024, plus d’un tiers des jeunes a sauté «souvent ou de temps en temps» un repas par manque d’argent, sept points de plus que la moyenne nationale. Pour JR a’Weng, directeur général de Cop1, le dispositif de repas à un euro doit être généralisé pour tous les étudiants : «Beaucoup ne se sentent pas légitimes. Ils s’inscrivent à nos distributions alimentaires et veulent repartir estimant que d’autres doivent être encore plus en galère.»

«Je me prive de sorties»

Eve Bodilis, 20 ans, ne s’estime pas précaire, mais se dit favorable à la mesure. C’est la première année que cette étudiante en information et communication touche une bourse et mange régulièrement au Crous. «Je fais mes courses dans des enseignes discount comme Lidl. Après, on ne se fait pas de la cuisine Michelin, rit la jeune femme. Hier, par exemple, j’ai mangé du pain de mie toasté avec de la harissa et du citron.» Pour elle, le problème réside surtout dans la difficulté à se faire de la cuisine de qualité. «On mange souvent des pâtes», soupire la jeune femme en trouvant l’approbation de ses voisins de table.

La soirée permet plus généralement d’alerter sur la précarité étudiante. Des banderoles sont affichées contre les parois vitrées de la salle. Sur l’une, on peut lire, en énorme «un quart des étudiantes vivent avec 50 euros par mois après avoir payé leurs factures». Une fois englouti sa part de raclette, Quentin, 25 ans, se lance dans une partie de cartes avec trois autres étudiants. S’il n’est pas boursier, bénéficier d’un repas à un euro au resto U serait pour lui «vital» alors que la vie est très chère à Paris. «Pour se faire à manger, c’est au moins 3 euros le steak, et tu ne manges pas que ça…» déplore celui qui est à la fois bénévole et bénéficiaire de l’association Cop1. Ce doctorant en histoire du droit se dit sous la pression des charges, notamment de transports. «Ma famille habite loin. Je me prive de sorties, de déjeuner avec des potes et parfois même d’aller les voir», déplore le jeune homme.

Niche parlementaire

La députée PS Fatiha Keloua-Hachi, à l’initiative de la proposition de loi, est présente. Ce jeudi 23 janvier, à l’occasion de la niche parlementaire du PS, les députés se prononceront sur le texte. Déjà présentée à l’Assemblée en février 2023, la loi n’était pas passée à une voix près. Les députés Renaissance s’y sont opposés, arguant une mesure «injuste». «Les enfants de votre ami Bernard Arnault pourront aller au Crous et ne payer qu’un euro», avait lancé le député Renaissance Sylvain Maillard dans l’hémicycle. «Penser qu’élargir le repas à un euro reviendrait à donner aux plus riches, c’est de la méconnaissance du système universitaire», répond Fatiha Keloua-Hachi. «Beaucoup d’étudiants sont dans la zone grise et ne rentrent pas dans les critères de bourses. Certains ne sont précaires que trois mois dans l’année par exemple, lorsqu’il fait froid et qu’ils doivent supporter des charges de chauffage supplémentaires», souligne JR a’Weng. Fatiha Keloua Hachi se dit confiante quant à l’adoption de la proposition de loi cette fois-ci. Celle-ci a été votée à la majorité en commission.

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