Bélarus : débarrassé de l’opposition, Alexandre Loukachenko s’apprête à rafler un 7e mandat présidentiel

Bélarus : débarrassé de l’opposition, Alexandre Loukachenko s’apprête à rafler un 7e mandat présidentiel

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De la farce présidentielle prévue pour se jouer dimanche 26 janvier au Bélarus, tout est déjà écrit. Sur les bulletins de vote figureront cinq candidats : trois fidèles du régime, une opposante «constructive» sortie de nulle part pour donner le change, et le président Alexandre Loukachenko en route vers un septième mandat que rien ne saurait empêcher. La seule inconnue est purement numérique. De quel score le gratifiera la Commission électorale toute dévouée aux autorités ? 80 % des voix, comme lors de l’élection volée de 2020 ? Ou plus encore ?

«Loukachenko mettra l’accent sur la participation, mais personne ne comptera les voix, personne n’ira chercher les vrais chiffres. Tout est faux», a déjà prévenu Svetlana Tikhanovskaïa, leader de l’opposition en exil, forcée de fuir son pays après avoir défié l’autocrate lors de la précédente présidentielle. Cette année, aucune contestation ne devrait suivre le simulacre électoral. En quatre ans, le KGB bélarusse a méthodiquement réprimé tout signe d’opposition, tout souvenir des manifestations géantes de l’été 2020. Au matraquage des protestataires et à l’emprisonnement des leaders de l’opposition ont succédé des poursuites judiciaires sans fin contre des Bélarusses ordinaires, coupables d’avoir été un peu trop critiques sur les réseaux sociaux ou d’avoir porté des chaussettes aux couleurs de la révolution. Les universitaires et les religieux ont été réprimés. Des associations de tous types ont été interdites par centaines pour «extrémisme».

Peur «inhumaine»

En quatre ans, au moins 65 000 personnes auraient fait l’objet de persécutions politiques – arrestations, fouilles, interrogatoires. L’organisation de défense des droits de l’homme Viasna, elle-même harcelée par le régime, a recensé plus de 6 500 cas de condamnations politiques lors de procès au pénal. Plus de 1 200 prisonniers politiques sont toujours derrière les barreaux, les plus connus soumis à un isolement sans fin. On estime qu’au total, environ 30 000 personnes ont été emprisonnées, souvent pour des périodes courtes, pour des motifs politiques. Entre 200 000 et 500 000 personnes ont fui le pays, par peur des représailles.

Selon Andreï Sannikov, opposant de longue date et ancien prisonnier politique, la répression au Bélarus est aujourd’hui plus forte qu’elle ne l’a jamais été. «Ils arrêtent des gens qui se sont opposés au régime il y a plus dix ans. Ils en condamnent d’autres qui sont déjà en prison à des peines additionnelles. La peur de Loukachenko chez les Bélarusses dépasse la paranoïa, elle atteint un niveau absolument inhumain», décrit-il dans une interview au site russe indépendant Meduza.

A l’approche de l’élection, les autorités ont bétonné le terrain, en poussant toujours plus loin les curseurs de la répression. A la mi-novembre, un raid du KGB a ciblé les familles de prisonniers politiques. Un mois plus tard, Mikalai Khilo, un Bélarusse employé par la représentation de l’Union européenne à Minsk, a été condamné à quatre ans de prison. Puis en janvier, une nouvelle disposition légale a été prise pour autoriser à placer aux mains des services sociaux les enfants dont les parents auraient diffusé des «documents extrémistes». Le tout à l’issue d’une année où jamais autant de personnes, d’écrits ou d’entités n’ont été qualifiées d’«extrémistes». Le terme a même été appliqué à un refuge pour animaux et à une chanson dont les paroles sont tirées d’un poème écrit en… 1908.

Tentative de contact avec l’Occident

Dans ces conditions, impossible d’émettre la moindre critique. «Je ne veux pas que des gens se sacrifient en vain», a reconnu Svetlana Tikhanovskaïa. La cheffe de l’opposition, qui craint que les électeurs ne soient forcés à voter, les appelle à cocher la case «contre tous» si tel était le cas – qui équivaut à un vote blanc. A l’étranger, les Bélarusses en exil ont prévu de se rassembler à Varsovie pour clamer qu’ils représentent davantage le futur de leur pays qu’un autocrate de 70 ans.

La principale tâche de l’opposition est de convaincre les Occidentaux de ne pas relâcher la pression sur le Bélarus. «Nous demandons à nos alliés de déclarer le vote illégitime à l’avance et de signaler que le monde ne se remettra pas à faire comme si de rien n’était avec Loukachenko après ce simulacre d’élection», indique Tikhanovskaïa dans une interview au Grand Continent. La Pologne et la Lituanie, où vit une importante partie de la diaspora, ont déjà indiqué qu’elles ne reconnaîtraient pas le vote.

Depuis quelques mois, l’autocrate a tenté d’envoyer quelques signaux de conciliation vers l’étranger. Plus de 200 prisonniers politiques ont été libérés depuis l’été, en plusieurs vagues. «En relâchant des prisonniers, Loukachenko cherche à projeter une image d’adoucissement et de désescalade […]. Cela s’inscrit dans une stratégie plus large, visant à signaler sa volonté de reprendre le dialogue avec les pouvoirs occidentaux pour potentiellement réduire les sanctions [qui visent le régime depuis 2020, et plus encore depuis son appui à la guerre en Ukraine à partir de 2022, ndlr]», écrit la chercheuse Victoria Leukavets dans une note pour le Centre de Stockholm pour les études sur l’Europe de l’Est. Un objectif qui semble difficilement atteignable tant le Bélarus est devenu, au fil des prêts russes et du soutien politique de Poutine à Loukachenko, un pays vassal de Moscou.

Libération

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