:quality(70)/cloudfront-eu-central-1.images.arcpublishing.com/liberation/76WWEGSK4ZDRHFESSF5TFRI62I.jpg)
«Che bello !» se dira sans doute Gérald Darmanin ce lundi en Italie. Le ministre de la Justice est attendu à Rome pour une visite d’étude du régime carcéral transalpin réservé aux détenus les plus dangereux, dans le cadre de son projet de créer un établissement de haute sécurité pour les «100 des plus grands narcotrafiquants écroués». Il doit notamment visiter dans la matinée le centre pénitentiaire romain de Rebibbia, où une cinquantaine de détenus affiliés au crime organisé sont soumis à un régime d’isolement et de surveillance particulièrement draconien. Le garde des Sceaux doit ensuite s’entretenir avec son homologue, l’ancien juge membre de Fratelli d’Italia Carlo Nordio, et le procureur national antimafia et antiterrorisme, Giovanni Melillo, avant une conférence de presse en fin de journée.
A lire aussi
Très restrictif, le modèle italien de détention réservé aux condamnés les plus dangereux pourrait inspirer Gérald Darmanin dans son ambition de doter l’administration pénitentiaire de prisons bunker. La Botte est dotée d’un régime de détention connu sous le nom de 41-bis, qui depuis 1986 est appliqué essentiellement à des prisonniers poursuivis pour crimes mafieux et terroristes. Cet article du règlement pénitentiaire, qui suspend de fait les conditions habituelles de détention, est devenu une arme essentielle de l’arsenal de l’Etat contre le crime organisé. Ce régime connu sous le nom de «prison dure» peut également être appliqué à d’autres crimes violents et au terrorisme.
Il prévoit l’isolement total pour le prisonnier, sauf deux heures quotidiennes à l’air libre dans un groupe ne pouvant pas dépasser quatre détenus soigneusement choisis pour éviter plusieurs risques : d’un côté celui de la connivence avec d’autres personnes appartenant au même groupe criminel, de l’autre d’éventuels conflits avec un groupe criminel opposé. Les détenus ont en outre droit à un seul entretien par mois avec des membres de leur famille, derrière une paroi de verre. Le tout enregistré par les autorités carcérales. Ceux qui ne profitent pas de ce droit ont, après au moins six mois de détention, le droit à un appel téléphonique par mois, d’une durée de dix minutes maximum, avec des membres de leur famille, également enregistré. Des limites sont également introduites concernant les sommes d’argent et autres biens que ces détenus peuvent recevoir.
Ce régime de détention est régulièrement dénoncé par les ONG, comme Antigone, qui s’occupe des conditions des détenus en Italie. Elle a dénoncé dans un récent rapport «certaines restrictions dont l’objectif semble être de harceler davantage plutôt que de garantir la sécurité : par exemple la taille des casseroles autorisées ou le nombre et la taille des photos et livres pouvant être gardés dans la cellule».
Le 41-bis est un amendement à une loi créée en 1975 pour éviter des mutineries, mais il a été introduit à plus grande échelle après la vague d’attentats et d’assassinats perpétrés par la mafia dans les années 1980 et 1990. Selon des chiffres de février 2024, 725 détenus étaient soumis à ce régime carcéral, dont quatre terroristes, les autres appartenant aux principaux groupes mafieux et groupes criminels organisés de la péninsule.
Les détenus occupent des sections dédiées des prisons italiennes et sont surveillés par des gardes appartenant à un groupe spécial de la police pénitentiaire. Ces derniers changent de prison tous les six mois, pour éviter des contacts prolongés avec des détenus dangereux. L’objectif de ce système est double : couper la communication des prisonniers avec l’extérieur – empêchant ainsi les mafieux de diriger leurs organisations depuis la prison – et les convaincre, en raison des conditions pénibles, de devenir des collaborateurs de justice.
Leave a Comment