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Jean-Luc Lagarce est mort du sida à 38 ans, en 1995. Depuis quelques années, il survivait. Son journal devient donc assez vite le journal d’un survivant, mais bien vivant. Jeune homme puis homme jeune, metteur en scène, dramaturge, homosexuel, allant vers la mort de corps en corps avec un sentiment d’horreur et un certain sourire, drelin drelin, en lutte légère, tenace, finale. Il a 20 ans lorsqu’il commence à le tenir, le mercredi 9 mars 1977 : «Pion au lycée de Montbéliard. Habite entre Besançon, chambre d’étudiant, ce lycée et chez mes parents à Valentigney. Amoureux de Ghislaine. Mon grand-père maternel a un cancer. Création du théâtre de la Roulotte (le 24).» D’emblée, la liste, non pas de ses envies, mais de ses constats. Les constats décollent un peu la membrane du poumon. Ça respire mieux tout en respirant mal, un peu plus vite peut-être.
A 21 ans, la liste ébauche la forme des monologues qui fleurissent alors au théâtre, bientôt dans le sien. Monologues secs, tendus, minutieux, taillant leur chemin dans les sous-sols d’une conscience qu’ils projettent, comme un menuisier rabote sa planche, de copeau en copeau : «Etre homosexuel mais être laid et ne pas être désirable. Etre obligé à des amours de rencontre dans des lieux sordides et furtifs. Un garçon noir, une nuit, à Audincourt, qui veut devenir chanteur de variétés. Un garçon dont la femme s’a
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