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La polémique avait enflé au point de mobiliser la ministre de la Culture. Lors de sa chronique sur le plateau de C à vous sur France 5 vendredi 31 janvier, l’humoriste Merwane Benlazar a déclenché un tollé. En cause, sa tenue : sa barbe et son bonnet hipster assimilé par certains à la mouvance salafiste. Le jeune comique d’à peine 30 ans, qui officie au micro de France Inter depuis un an, avait exceptionnellement remplacé Bertrand Chameroy sur France 5 et signé sa première chronique télévisuelle.
De vieux tweets de l’humoriste, datant de 2013 à 2021 et jugés tendancieux, ont été exhumés. «Ma meuf, elle tape des bises à des gars ça peut m’agacer», écrivait-il par exemple il y a quelques années. Des blagues sorties de leur contexte, du second degré, assure l’entourage du jeune homme.
Après plusieurs jours de silence, Merwane Benlazar a finalement choisi son terrain de prédilection, les planches d’un théâtre, en l’occurrence celles du temple parisien du stand-up, l’Européen (XVIIe), pour revenir sur le tumulte causé par son apparition sur France 5, rapporte le Parisien. «Ça a créé une vague de haine. De vendredi à lundi matin, j’avais que des insultes, le chiffre, c’est entre 10 et 15 insultes ou menaces par minute», a-t-il révélé. Filmé jeudi, le sketch a été publié samedi 8 février sur le compte Instagram de l’humoriste.
L’affaire a pris de l’ampleur lorsque certains élus, de l’extrême droite au centre, dont l’eurodéputée (Renew) Nathalie Loiseau, s’en sont emparés. La ministre de la Culture, Rachida Dati, a elle-même annoncé mercredi 5 février au soir, au Sénat, qu’au regard du caractère «scandaleux» des publications ayant été mises au jour, l’humoriste ne reviendrait pas dans C à vous, rappelle le Parisien. «France Télévisions en a tiré les conséquences, il ne sera plus à l’écran», a-t-elle affirmé.
Sollicité par l’AFP, le groupe Mediawan, qui produit C à vous, avait précisé mercredi que la participation de l’humoriste n’était de toute façon prévue que pour un seul numéro. «Il était remplaçant one shot, il n’y a pas lieu de revenir ou pas», a déclaré l’entreprise. Merwane Benlazar «a été choisi par la société de production […] en l’absence de son humoriste habituel (Bertrand Chameroy) et de son remplaçant (Pierre-Antoine Damecour)», a fait valoir France Télévisions. La chronique «n’a occasionné aucun manquement à ses obligations de la part de France Télévisions», a insisté le groupe public.
Un épisode qu’évoque l’humoriste dans sa réponse. «Alors, vous avez passé une bonne semaine, vous ? attaque-t-il devant le public. Moi, hier, on lisait mes tweets au Sénat et j’ai été viré de mon poste de chroniqueur télé par… Rachida Dati, c’est beaucoup d’informations. Je savais que j’allais être viré un jour, par une Arabe, c’est chiant, mais je savais.»
Sur les tweets qui ont refait surface, il tacle les «racistes» qui «n’ont rien trouvé». «Du coup, ce qu’ils font quand c’est comme ça, ils prennent des morceaux de conversation et, avec, ils essayent de faire dire des trucs à des mots tirés de leur contexte», dit-il dans son sketch.
Quant au fameux bonnet de la discorde, Merwane Benlazar s’amuse des conseils vestimentaires de sa femme, qui lui avait déconseillé de porter une casquette pour masquer sa calvitie à l’antenne : «Ça fait banlieue.» Ils choisissent finalement un bonnet marron qui, pensent-ils, donne un look «bobo». «Elle m’a dit : Au moins, ça fera taire les racistes. Elle a du pif, ma femme», ironise l’humoriste.
Le comédien retrouvera ce lundi son micro dans l’émission Zoom Zoom Zen de Matthieu Noël. «Merwane est chez nous à France Inter et restera chez nous», avait déclaré plus tôt le présentateur dans un article de Mediapart. «Je tiens à la liberté d’expression des humoristes tant que ça nous fait marrer et il nous fait bien marrer, poursuivait Matthieu Noël. Mais l’air du temps semble être au racisme et pousse une certaine frange des réseaux sociaux à s’attaquer à quelqu’un sur la base de clichés.»
Merwane Benlazar a récolté de nombreux soutiens parmi ses collègues, du chroniqueur de RTL Alex Vizorek à Charline Vanhoenacker en passant par les humoristes Kheiron et Doully ou encore Panayotis Pascot. «Moi, je peux me défendre, mais tous les jours, il y a des centaines d’Arabes qui sont renvoyés parce qu’ils n’ont pas mis le bon pull, qui ne sont pas pris parce qu’ils n’ont pas mis le bon bonnet et eux, ils se défendront jamais, a tancé Merwane Benlazar dans son sketch-réponse. Il faut que ça [la polémique, ndlr] serve à quelque chose, que ça change un peu pour ces gens-là.»
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