A Strasbourg, le syndicat étudiant UNI explose après la révélation de montages antisémites

A Strasbourg, le syndicat étudiant UNI explose après la révélation de montages antisémites

Главная страница » A Strasbourg, le syndicat étudiant UNI explose après la révélation de montages antisémites

Le président de l’UNI Strasbourg, ainsi que plusieurs membres du syndicat étudiant d’extrême droite, ont été suspendus ce mercredi 12 février de l’organisation par leur siège, après la publication sur les réseaux sociaux de plusieurs montages antisémites les mettant en scène. «Une plainte contre X est en train d’être déposée […], nous condamnons ce qui nuit gravement à la réputation de l’UNI», est-il écrit dans un communiqué du syndicat, qui se prévaut d’un «combat historique contre l’antisémitisme»

Le 6 février, la branche alsacienne de Golem, collectif juif de gauche, a révélé sur X une série de montages antisémites parodiant un jeu de cartes, sur lesquels apparaissent plusieurs membres de l’UNI Strasbourg. Son président, un certain Samy Amokrane, ancien membre de Génération Z, la branche jeune du mouvement Reconquête d’Eric Zemmour, y apparaît ainsi portant une kippa et sous le pseudonyme «Samuel Amokranovski». Une légende accompagne la chose : «Lorsque Samuel Amokranovski est posé, les autres joueurs perdent 20 euros, leur bijou le plus précieux et leurs factures augmentent de 300 %.»

Selon Rue89 Strasbourg, ces cartes sont apparues dans un groupe de la messagerie Snapchat composés de membres de l’UNI et nommé «Pragues» (sic), créé lors d’un voyage en septembre 2023. Selon plusieurs sources contactées par Libération, Samy Amokrane pourrait être l’un des auteurs, avec plusieurs copains, des montages en question. «Il en a montré quelques-unes dans un bar, un soir, raconte une source proche. Il était fier d’expliquer qu’il s’agissait de sa production, et s’en vantait.»

Sur une autre carte, intitulée «le tribunal de Nuremberg», on peut apercevoir un groupe de jeunes hommes, dont fait partie Mathis Gachon, délégué national de l’UNI, pratiquer un signe «White power» de la main droite, la marque de ralliement des suprémacistes blancs. Sont aussi présents Robin Gerolt, candidat Reconquête aux dernières élections législatives dans le Bas-Rhin (1,09 %, 678 voix), Samy Amokrane ou encore Vivien Boresy, vice-président de l’UNI Strasbourg, étudiant en histoire et assistant parlementaire de l’eurodéputée du Rassemblement national Mathilde Androuët. La carte est ornée de cette légende : «Toutes les cartes juives détenues par les joueurs doivent être jetées dans la pile (tout en bas).» Un troisième montage montre Vivien Boresy, surnommé cette fois «Jewvien Jacob Borevski» («jew» signifiant juif en anglais), grimé en rabbin, avec la légende : «Dérobe les gains du joueur précédent.»

Contacté, aucun de ces hommes, la plupart âgés d’une vingtaine d’années, n’a répondu aux sollicitations de Libération. L’eurodéputée d’extrême droite Mathilde Androuët affirme quant à elle que son assistant parlementaire lui assure que les cartes en question seraient des «montages hostiles visant à nuire à l’UNI». «Si l’enquête aboutit à la culpabilité de mon assistant, il sera licencié, dit-elle. Si l’enquête aboutit à la culpabilité d’antifas locaux qui pourrissent la vie actuelle de la fac de Strasbourg, je ne doute pas que les journalistes laveront la réputation de ces jeunes étudiants.»

Le président de l’université de Strasbourg, Michel Deneken, a de son côté annoncé avoir effectué un signalement au parquet au titre de l’article 40 du code pénal, selon lequel tout fonctionnaire ayant la connaissance d’un crime ou d’un délit est tenu d’en donner avis au procureur. Dans un communiqué publié mardi 11 février sur le site de l’université de Strasbourg, il a qualifié des faits «graves, condamnés par la loi, qui nuisent à la conception d’une université ouverte, respectueuse des différences et de la diversité», tout en signalant l’ouverture d’une enquête administrative. Dans ce contexte, plusieurs étudiants de l’université, dont font tous partie les jeunes hommes présents sur les montages antisémites, vont être convoqués dans le cadre d’une procédure disciplinaire. «L’antisémitisme est une horreur, quelle que soit l’origine de ces montages», précise Michel Deneken auprès de Libération.

Samy Amokrane est étudiant en troisième année de droit. Il a pris la présidence de l’UNI Strasbourg en mai 2023. Selon plusieurs anciens membres du syndicat étudiant, celui-ci, déjà bien à droite, a alors opéré un virage à l’extrême droite, quand Samy Amokrane a ouvert les portes de l’UNI à ses amis de Génération Z et à plusieurs membres du RN, faisant fuir la plupart des jeunes LR de l’ancien bureau. En novembre 2023, l’UNI Strasbourg comptait environ 70 membres, dont, par exemple, Laurent Ochsenbein, 20 ans, membre du RN en Alsace. «Des gars d’extrême droite, soutenant le RN ou Eric Zemmour, sont apparus un à un, avec des idées extrémistes et des pensées vraiment “abusées”», raconte un ancien membre.

A l’époque, les comportements ou propos racistes et sexistes deviennent récurrents. L’un des adhérents, qui tracte et colle alors des affiches régulièrement pour l’UNI Strasbourg, un certain Josselin H., se filme en octobre 2023, dans un cadre privé, en train d’effectuer un salut nazi. Dans une discussion de l’UNI locale sur l’application Messenger, à laquelle Libération a eu en partie accès, on peut le voir discuter du conflit israélo-palestinien. Il explique être «pro-Palestine, comme tous les nationalistes», avant de se qualifier d’«antisioniste». L’un de ses camarades, un certain «Robin», le reprend alors : «Tu ne vas pas me faire croire que tu t’es senti pousser un sentiment de fraternité avec un peuple arabe. [Tout cela], c’est un conflit entre des Juifs et des Arabes, je ne vois même pas pourquoi cela compterait autant pour certains, en tant que chrétiens français.» Membre de l’UNI Strasbourg à partir de février 2023, Josselin H. finit par quitter la branche strasbourgeoise du syndicat de lui-même en octobre pour des divergences politiques internes. Contacté, il dit aujourd’hui «regretter» son geste de l’époque et chercher à «étudier paisiblement».

La révélation des montages attribués à l’UNI Strasbourg n’a pas empêché, quelques jours plus tard, l’unique eurodéputée Reconquête Sarah Knafo de s’afficher avec l’organisation étudiante. Dans une publication sur Instagram, le 11 février, celle-ci s’affiche avec plusieurs de ses militants, dont Samy Amokrane, dans un bar de la ville, l’Exils. «Les militants de l’UNI Strasbourg viennent d’être séquestrés dans leur propre université, pourchassés par des antifas armés de couteaux et tabassés. Qui parle de ce scandale ? Je suis à leurs côtés», écrit Knafo. Selon plusieurs sources, notamment le président de la fac, Michel Deneken, les étudiants d’extrême droite ont effectivement été pris à partie jeudi 6 janvier lors d’une opération de tractage, dans le cadre des élections étudiantes. Ils ont en réalité été protégés par les agents de sécurité de l’université, qui les ont fait rentrer dans un bâtiment pour éviter qu’ils ne soient molestés. Sans doute cette version de l’histoire était-elle moins vendeuse pour l’extrême droite sur les réseaux sociaux.

Libération

Post navigation

Leave a Comment

Добавить комментарий

Ваш адрес email не будет опубликован. Обязательные поля помечены *